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Agenda - HOMMAGE À PIERRE FARAH

Toujours prêt !

Son impeccable nœud papillon était une élégance bienvenue qui rythmait nos cours pendant les premières années de médecine. Dans un pays qui nous prodiguait dès lors tour à tour le meilleur et le pire, où le chaos était quasiment un mode de fonctionnement, Pierre Farah était un phare de civilisation.

À la faculté, rue de Damas, dans l’amphi C, il prenait le micro comme on prend la mer, et à la tribune portait toujours beau. Capitaine du savoir chirurgical, il disséquait les cours et nous transmettait l’anatomie avec éloquence et poésie. En salle d’opération, il prenait appui sur Hugo et Baudelaire pour chasser l’appréhension et alléger l’âpreté de la guerre.

Son allure de dandy donnait régulièrement extrasystoles et frissons à la gent féminine des lieux. L’œil pétillant, il faut dire qu’il savait si finement tourner le compliment en vers de Ferré, Brassens et Ferrat.

Une complicité tacite, parfaitement catholique, nous liait hors Hippocrate. L’appartenance sans doute à cette éducation levantine où le français était encore porteur d’espoir et la messe du dimanche un rendez-vous hebdomadaire.

L’engagement infaillible de l’homme était exemplaire entraînant avec lui, déjà tout en admiration, les apprentis médecins que nous étions.

Pétri de scoutisme et de dévouement, il n’hésitait pas à traverser barrages et champs de bataille pour porter secours à un blessé, l’humain toujours en ligne de mire indiquant par l’exemple ce qui fait l’essence même de notre métier.

Ses fonctions de doyen de la faculté de médecine avaient donné tempo plein à son talent fédérateur. La créativité en étendard, il avait totalement dépoussiéré les rouages de la machine, toujours avec élégance.

Après trois mandats successifs, c’est au Tchad que cet infatigable bâtisseur devait trouver un écho à sa vocation. Sur cette « terra incognita » où les hasards de la vie l’avaient posé en 2007, l’homme de bonne volonté établira un pont de savoir entre la faculté de médecine de l’Université Saint-Joseph et le Centre hospitalier universitaire de N’Djamena, « Le bon samaritain », où il s’appliquera pendant plus de quinze ans à exercer et enseigner bénévolement. Dans cette incroyable aventure humaine, il avait permis à quelques disciples choisis de le suivre pour goûter pleinement le métier.

Plus qu’un hasard, ces années africaines étaient d’abord un rendez-vous avec lui-même et avec l’essentiel.

Être un homme pour les autres n’aura jamais été si pleinement expliqué.

« Il restera de toi ce que tu as donné. Ce que tu as donné, en d’autres fleurira. Celui qui perd sa vie, un jour la trouvera. »

Merci cher Pierre de ce que tu as donné et qui a fleuri chez beaucoup de tes élèves aujourd’hui.

Son impeccable nœud papillon était une élégance bienvenue qui rythmait nos cours pendant les premières années de médecine. Dans un pays qui nous prodiguait dès lors tour à tour le meilleur et le pire, où le chaos était quasiment un mode de fonctionnement, Pierre Farah était un phare de civilisation.À la faculté, rue de Damas, dans l’amphi C, il prenait le micro comme on prend la...