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Culture - Entretien

Sabine Sciortino : Beyrouth Livres, un rendez-vous majeur et incontournable de la rentrée

Le festival littéraire – initié et porté par l’Institut français du Liban (IFL) – revient cette année pour une seconde édition qui s’étale sur 7 jours, du 2 au 8 octobre 2023. La conseillère de coopération et d’action culturelle et directrice de l’Institut français du Liban en trace les grandes lignes pour « L’Orient-Le Jour » et dont le programme a été annoncé lors d'une conférence de presse ce mercredi matin à la Résidence des Pins en présence de l'ambassadeur de France Hervé Magro.

Sabine Sciortino : Beyrouth Livres, un rendez-vous majeur et incontournable de la rentrée

Sabine Sciortino, conseillère de coopération et d’action culturelle et directrice de l’Institut français du Liban. Photo Marielle Salloum

La seconde édition de Beyrouth Livres aura lieu du 2 au 8 octobre 2023. Qui dit seconde édition dit première édition assez réussie pour faire rebelote. Quel bilan pouvez-vous tirer de l’édition 2022 ? Votre propre évaluation de l’événement avec les points forts et les moins forts ? Et comment remédier à ces derniers ?

La première édition du festival Beyrouth Livres, organisée en octobre 2022, était réellement un pari fait par l’Institut français du Liban. Le pari de se dire, quatre ans après la tenue du dernier Salon du livre francophone en 2018 et alors que le Liban s’enfonçait dans une crise économique, financière, sociale et politique profonde, qu’il y avait encore de la place pour un grand rendez-vous autour de la littérature francophone. Évidemment, il avait été nécessaire de revoir les modalités pour adapter ce type de rendez-vous aux nouvelles réalités du Liban. Il fallait par exemple prendre en compte le fait que la majorité des Libanais et des Libanaises ont aujourd’hui des difficultés à se déplacer ou à acheter des livres importés en raison de la cherté du coût de la vie. D’où le choix de la formule souple d’un festival, décloisonné et à même d’être projeté dans l’ensemble des régions, au plus près des territoires et de la population, plutôt que d’être concentré dans un lieu unique.

Le pari de la première édition a, je crois, été relevé. Le public en tout cas a répondu présent avec engouement. Ce sont près de 23 000 visiteurs qui ont assisté aux diverses manifestations de la programmation 2022. Dans les écoles, l’enthousiasme a été tout aussi palpable, avec par exemple plus de 130 000 jeunes des écoles publiques et privées se joignant au « quart d’heure de lecture national ».

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Le succès de la première édition a résidé dans son accessibilité et son caractère résolument moderne et innovant. Le choix a été fait d’événements entièrement gratuits, centrés autour du livre tout en laissant une large place à la pluridisciplinarité, faisant dialoguer les auteurs et auteures invités avec des musiciens, des comédiens ou encore des artistes d’horizons divers dans des formats originaux. Évidemment, nous avons privilégié un ancrage local, en coconstruction permanente avec nos partenaires libanais, à l’écoute des besoins exprimés, pour rester pertinents dans nos propositions.

Sur les points d’amélioration, nous avons réalisé avec l’équipe que si de nombreux acteurs de la filière (éditeurs, traducteurs, libraires, diffuseurs…) avaient fait le déplacement pour la première édition, il leur manquait un temps et un espace dédiés pour pouvoir se retrouver, échanger sur les enjeux-clés du secteur et nouer de nouveaux partenariats. C’est chose faite avec la seconde édition, au cours de laquelle se déploiera une journée professionnelle le 6 octobre à l’École supérieure des affaires, qui permettra notamment d’aborder des sujets aussi cruciaux que le numérique, la traduction, l’économie du secteur ou l’impact de l’intelligence artificielle sur la création littéraire.

Pouvons-nous dire que Beyrouth Livres est le plus grand événement organisé par l’IFL ?

L’IFL construit depuis plusieurs années sa programmation culturelle autour de « temps forts » égrenés tout au long de l’année, chaque temps fort ciblant des publics variés et se structurant autour d’une thématique phare comme la musique, le cinéma ou encore le débat d’idées. Il est clair que le festival Beyrouth Livres est LE temps fort de l’Institut français dans le domaine de la littérature. Par le volume d’invités (70 auteurs et auteures invités cette année), le nombre d’événements programmés (80) et la diversité des implantations (34 lieux répartis dans 14 villes), c’est assurément un rendez-vous majeur et incontournable de la rentrée !

Comment cet événement répond-il à (aux) la mission(s) de l’IFL ? Quels sont les axes majeurs de cette édition ?

L’une des missions premières de l’IFL est la promotion de la francophonie dans toute sa diversité. Avec l’invitation d’auteurs représentant une dizaine de nationalités différentes, en provenance par exemple du Liban, de France, de Suisse, de Belgique, du Sénégal, d’Algérie, de Grèce ou encore du Canada, il s’agit de mettre en lumière une francophonie vivante et moderne. Une francophonie qui, loin de s’enfermer sur elle-même, s’insère au contraire parfaitement dans le plurilinguisme qui fait depuis toujours la force et la singularité du Liban.

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Une autre mission fondamentale de l’IFL porte sur l’éducation et la jeunesse. Nous avons en effet la conviction qu’il ne pourra y avoir de redressement du pays qu’avec le soutien apporté à ses forces vives et aux générations montantes à même de dessiner le Liban de demain. C’est la raison pour laquelle nous avons choisi de faire de la jeunesse un axe majeur de notre programmation. Une dizaine d’auteurs et d’éditeurs jeunesse des éditions Bayard feront ainsi le déplacement cette année. Deux expositions – Badass, les nouvelles héroïnes de la bande dessinée jeunesse et Dans l’atelier d’Aurélie Neyret – sont exclusivement réservées au réseau scolaire. Surtout, nous sommes heureux de constater, cette année encore, la réaction enthousiaste des auteurs du festival lorsque nous avons proposé de les envoyer aux quatre coins du pays à la rencontre des jeunes publics : plus de 80 écoles publiques et privées et une dizaine d’universités auront ainsi la chance de pouvoir accueillir un auteur invité dans leurs murs.

Le campus de l’ESA se place cette année un peu comme le point de convergence des événements...

La marque de fabrique du festival Beyrouth Livres est d’investir chaque année des lieux nouveaux et originaux, à Beyrouth et en régions, avec le souci de se renouveler constamment. Notre public pourra ainsi tout aussi bien déambuler à Beyrouth dans les quartiers de Monnot, Gemmayzé, Sursock et Musée que partir à la découverte de lieux patrimoniaux ou insolites dans 13 autres villes du pays. L’ouverture du festival se fera d’ailleurs cette année simultanément dans quatre lieux, à Baalbeck, Byblos, Tyr et Tripoli. À l’Institut français du Liban, alors que notre salle Montaigne est fermée quelques mois pour travaux de rénovation, le choix de l’École supérieure des Affaires et du quartier Clemenceau pour tenir notre grand week-end de clôture est paru comme une évidence. Le campus offre en effet des infrastructures exceptionnelles dans un cadre idyllique et revêt un caractère très symbolique, lui qui a accueilli par le passé l’ancienne ambassade de France. Nous espérons donc vous y retrouver nombreux pour une fin de semaine riche en festivités, sur quatre scènes parallèles spécialement installées pour l’occasion. Vous pourrez également y retrouver les derniers ouvrages des auteurs invités grâce à l’installation éphémère de la Grande Librairie du festival les 7 et 8 octobre.

Un Salon international du livre du Liban va avoir lieu du 13 au 23 octobre au Forum de Beyrouth. Il est organisé par le syndicat de l’union des éditeurs au Liban, l’un de vos anciens partenaires dans le Salon du livre francophone. Les autres partenaires, notamment le club culturel arabe, semblent absents. Pourquoi est-il devenu impossible de réunir de nouveau les partenaires du Salon du livre francophone ? Et pourquoi ne pas faire concorder les dates du festival littéraire avec celles du Salon du livre ?

Le paysage du livre au Liban a connu de profonds bouleversements depuis quatre ans, avec le quasi-effondrement du secteur et la disparition des grands rendez-vous littéraires. Il est certain que la situation actuelle au Liban fait qu’il n’y a pas de retour possible au « monde d’avant », il faut constamment innover et penser des articulations et des formats inédits. Que de nouvelles initiatives voient désormais le jour est une excellente nouvelle, nous avons besoin de ce foisonnement. Je vois de nombreuses complémentarités possibles à l’avenir, entre un festival Beyrouth Livres qui se veut décentralisé, accessible et festif, et un Salon international du livre qui souhaite renouer avec la présence des grandes maisons d’édition. Nous-mêmes positionnons le festival comme une pierre à l’édifice plus global visant à soutenir la filière du livre au Liban, que ce soit par la visibilité que nous apportons aux auteurs, par la journée professionnelle du 6 octobre ou encore par le partenariat que nous avons mis en place avec cinq libraires francophones tout au long de la programmation.

Pour conclure sur une note positive : la rencontre, le spectacle, l’auteur(e) que vous ne rateriez sous aucun prétexte ?

Il y a une vraie diversité dans les formats, les auteurs, les lieux proposés. C’est tout ce qui fait la richesse du festival. La grande soirée Tarab de lectures, dessins et musiques autour de Charles Berberian devant le musée Sursock le jeudi 5 octobre sera assurément un grand moment, de même que la lecture illustrée de Zeina Abirached au théâtre Monnot le 3 octobre à l’occasion du centenaire du Prophète de Gebran Khalil Gebran. Le samedi soir sur le campus de l’ESA, une soirée exceptionnelle verra le collectif Mazza proposer un concert intitulé Playlist visuelle. Ces jeunes auteurs issus de l’Académie libanaise des beaux-arts (ALBA) sont la relève de la bande dessinée libanaise, ils précèderont Yuksek qui nous fera l’honneur d’un DJ Set. En bref, il y en a pour tous les goûts et il sera sûrement difficile de choisir !

La seconde édition de Beyrouth Livres aura lieu du 2 au 8 octobre 2023. Qui dit seconde édition dit première édition assez réussie pour faire rebelote. Quel bilan pouvez-vous tirer de l’édition 2022 ? Votre propre évaluation de l’événement avec les points forts et les moins forts ? Et comment remédier à ces derniers ?La première édition du festival Beyrouth Livres,...

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