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Moyen-Orient - REPORTAGE

Des bus éducatifs à l’écoute des enfants du Nord-Ouest syrien

Plusieurs mois après le séisme destructeur du 6 février, de nombreuses écoles restent inutilisables.

Des bus éducatifs à l’écoute des enfants du Nord-Ouest syrien

Des enfants du Nord-Ouest syrien s’apprêtant à monter dans les bus éducatifs. Photo Moawia Atrash

Impatients, les enfants accourent vers les bus flamboyants garés derrière le camp de déplacés d’al-Mahatta. Leurs sacs d’écolier sur le dos, ils forment une longue file devant l’entrée de ces véhicules décorés d’images enfantines et de lettres de l’alphabet. Car ces bus offrent ce que le séisme du 6 février leur a brusquement arraché : un accès à l’éducation.

Le tremblement de terre qui a fait plus de 50 000 morts en Turquie et en Syrie a notamment dévasté le système scolaire déjà fragile du Nord-Ouest syrien, dernière poche rebelle du pays sous administration du groupe jihadiste Hay’at Tahrir al-Cham (HTC) ou de factions d’opposition. Ici, plus de 450 établissements scolaires se sont effondrés ou ont été endommagés.

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« Après le séisme, aller à l’école est devenu très difficile, à cause de la distance », raconte Moustapha Hilal, en classe de sixième. Sa maison, ainsi que l’école qu’il fréquentait à Jenderes, ont été détruites lors de la catastrophe. Depuis, il vit sous une tente. La ville, une des plus sévèrement touchées par le tremblement de terre, est désormais entourée de camps de déplacés. Et il a fallu se montrer créatif pour permettre à des milliers d’enfants de poursuivre leur scolarité. Trois mois après le séisme, Orange, une ONG locale, a lancé un projet d’éducation mobile dans cette zone échappant au contrôle de Bachar el-Assad, le président syrien. Plusieurs bus aménagés en petites salles de classe sillonnent quotidiennement Jenderes et ses alentours, couvrant 37 centres éducatifs et accueillant des élèves de 6 à 12 ans, pour dispenser divers cours.

Des élèves du Nord-Ouest syrien suivant les cours mis en place dans les bus éducatifs. Photo Moawia Atrash

Dans chaque véhicule, deux rangées de chaises et de tables se font face, pour une capacité moyenne de 12 enfants. Au fond, un tableau velleda pour suivre la leçon donnée par le maître d’école. Et des élèves enthousiastes et volontaires. « Finalement, les enfants préfèrent apprendre dans les bus qu’à l'école, parce qu’ils s’y sentent plus en sécurité depuis le tremblement de terre », avance Almas Naasan, enseignante dans le cadre du projet.

C’est ce que ressent Ahmad el-Ali, en CM2. « J’ai commencé à avoir peur de rentrer dans les bâtiments, comme à l’école. Du bus, on peut courir vite pour rejoindre notre famille si ça arrive de nouveau », confie l’élève qui n’en est pas à son premier traumatisme. « Dans mon village de Jarjanaz (sud de la province d’Idleb), j’étais effrayé à l’idée d’aller à l’école à cause des bombardements. Mais je me suis habitué à y retourner après qu’on a trouvé refuge à Jenderes, et je m’y sentais finalement en sécurité... Jusqu’au séisme qui a détruit mon établissement scolaire et ma maison. »

Recréer une normalité

Dans un camp de déplacés depuis lors, Ahmad el-Ali s’est fait de nouveaux amis dans les bus, avec lesquels il prend plaisir à apprendre. Pour le jeune garçon, les activités matinales, avant de débuter les cours, lui permettent aussi de « tenter d’oublier ce qu’on a vu pendant le tremblement de terre ». Depuis le terrain où sont garés les bus, s’élèvent dès le matin les voix des enfants, enthousiastes et joyeuses, lors de ces sessions de soutien psychologique. « Les activités et les leçons servent à recréer une routine quotidienne chez les enfants, en leur permettant notamment de continuer à apprendre, souligne Mohammad Chehab, responsable éducatif pour le projet de l’ONG Orange. En même temps, les activités de soutien doivent aider à ramener une normalité dans leur vie. »

Une classe dans un bus éducatif pour les enfants du Nord-Ouest syrien. Photo Moawia Atrash

Le jeune Moustapha Hilal est reconnaissant : « Les bus nous ont permis de reprendre les cours nécessaires afin de ne pas interrompre notre éducation. » Le projet a déjà vu défiler plus de 3 100 élèves dans ces salles de classe mobiles. Encore bien loin de combler les besoins existants, néanmoins. Selon l’Unicef, l’agence des Nations unies pour l’enfance, l’éducation de près de deux millions d’enfants a été perturbée par le séisme, tandis que de nombreuses écoles servent encore à accueillir des déplacés.

Impatients, les enfants accourent vers les bus flamboyants garés derrière le camp de déplacés d’al-Mahatta. Leurs sacs d’écolier sur le dos, ils forment une longue file devant l’entrée de ces véhicules décorés d’images enfantines et de lettres de l’alphabet. Car ces bus offrent ce que le séisme du 6 février leur a brusquement arraché : un accès à l’éducation....

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