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Moyen-Orient - PORTRAIT

Ryyan Alshebl : de Soueïda à la tête d’une mairie en Allemagne

Huit ans après avoir traversé la Méditerranée pour fuir la guerre en Syrie, le jeune homme de 29 ans, a pris lundi ses fonctions d’élu d’une commune allemande de 2 500 habitants. 

Ryyan Alshebl : de Soueïda à la tête d’une mairie en Allemagne

L’affiche de la campagne électorale de Ryyan Alshebl. Christoph Schmidt/AFP

Son premier réflexe a été d’appeler la Syrie pour y joindre sa mère. Le 2 avril, Ryyan Alshebl a obtenu la majorité absolue des suffrages dès le premier tour des élections municipales de la commune d’Ostelsheim, dans le sud-ouest de l’Allemagne, près de Stuttgart. Un scrutin historique. C’est la première fois qu’un réfugié syrien ayant fui la guerre civile syrienne en cours depuis 2011 se présente et remporte un poste de maire en Allemagne. Lundi, deux mois et demi après son élection, il a pris ses fonctions dans son village d’adoption. Huit ans après avoir traversé la Méditerranée sur un canot pneumatique.

Une preuve d’ouverture

Membre du parti écologiste allemand, c’est sans étiquette qu’il se lance au début de l’année 2023 dans la campagne municipale. Il réalise du porte-à-porte pour comprendre les problématiques locales, multiplie les réunions avec les entreprises, les associations et même le club de tricot de la ville. Et réussit à convaincre en parlant à tout le monde, obtenant 55 % des voix face à deux autres candidats locaux. « Ce n’est pas évident de gagner dans une région rurale marquée par le conservatisme », déclare-t-il le soir de son élection.

Mais Ryyan Alshebl a su s’imposer. « Ça montre que la société est prête, plus seulement pour accueillir des gens, mais aussi pour leur confier des responsabilités politiques. C’est une preuve d’ouverture sur le monde », a-t-il déclaré face aux médias après l’obtention des résultats. « Aujourd’hui, Ostelsheim a envoyé un exemple d’ouverture d’esprit et de cosmopolitisme à toute l’Allemagne », s’est alors réjoui le nouveau maire au micro de la chaîne publique allemande ZDF.

Portrait de Ryyan Alshebl. John MacDougall/AFP

Durant la campagne, Ryyan Alshebl a pourtant dû faire face, même si elles étaient rares, à certaines remarques racistes. Tantôt qualifié d’extrémiste islamiste, tantôt accusé d’être un militant kurde... alors qu’il vient d’une famille druze. Son ami Ghaith Akl, avec qui il est arrivé en Allemagne de Syrie, confie avoir eu peur pour lui durant la campagne, affirmant au New York Times que « c’est un petit village ici » et que « les perceptions des réfugiés ne sont pas toujours les plus agréables à entendre ».

Issu d’une famille politisée

Mais le jeune homme originaire de Soueïda aime la politique. Il y baigne depuis tout petit. Entre sa mère enseignante et son père ingénieur agricole, la famille est politisée. « J’ai grandi dans une famille où les questions politiques et sociales ont fait l’objet de discussions profondes », raconte Ryyan Alshebl sur son compte Instagram. Des conversations restées toutefois privées et secrètes, par peur de la répression du régime Assad.

Et ces craintes ne font que s’accentuer avec les tentatives d’écrasement de la révolution de mars 2011, qui plongent le pays dans une guerre sans fin. Il a 21 ans lorsqu’il décide de quitter son pays natal, alors qu’il devait réaliser son service militaire puis être enrôlé dans l’armée syrienne. Ryyan Alshebl traverse la Turquie, monte dans une embarcation de fortune et parvient à atteindre l’île grecque de Lesbos. « C’était en novembre 2015, je ne me souviens plus du jour », raconte le Syrien au journal Libération. « Sur le canot, on était quarante-neuf (alors que la capacité était de 15 personnes, NDLR), il n’y avait aucune lumière, il faisait froid », poursuit-il. Avec son sac à dos, 1 000 dollars qu’il lui restait de ses parents et accompagné de trois amis décidés également à fuir l’horreur en Syrie, il emprunte la « route des Balkans » et traverse l’Europe pendant douze jours. C’est en Allemagne que se termine son éprouvant parcours, faisant partie des près d’un million de Syriens fuyant la guerre, le groupe État islamique et la répression auxquels la chancelière Angela Merkel a ouvert les portes du pays.

Symbole d’une intégration réussie ?

Ryyan Alshebl arrive dans la région de Bade-Wurtemberg avec l’équivalent d’un baccalauréat syrien en poche, non reconnu par l’administration allemande. S’il avait entamé des études de finance et de gestion bancaire en Syrie, interrompues par la guerre, il décide en Allemagne de suivre une formation dans l’administration, offerte par son pays d’accueil. Hébergé dans un centre d’accueil, il devient ensuite employé administratif dans une commune voisine d’Ostelsheim.

En parallèle, il suit assidûment des cours d’allemand, qui lui permettent aujourd’hui de maîtriser parfaitement la langue. « Quand on est à la campagne, on n’a pas vraiment d’autre choix que de parler allemand », commente-t-il. Il obtient la nationalité en janvier 2022. Et suite aux conseils de son supérieur, il se présente en janvier 2023 à la mairie d’Ostelsheim, comptant 2 500 habitants.

Ryyan Alshebl est-il devenu le symbole de l’intégration réussie des migrants arrivés en Allemagne ? Le ministre des Affaires sociales, de la Santé et de l’Intégration, Manne Lucha, a salué la réussite du jeune homme : « Je serais très heureux si son élection encourageait davantage de personnes ayant des antécédents migratoires à se présenter à des élections politiques », a-t-il soutenu. Selon un rapport du groupe de recherche Mediendienst Integration publié en mai 2022, en Allemagne, 27 % de la population totale est d’origines étrangère, mais seulement 1,2 % des maires de villes allemandes sont issus de l’immigration.

Son premier réflexe a été d’appeler la Syrie pour y joindre sa mère. Le 2 avril, Ryyan Alshebl a obtenu la majorité absolue des suffrages dès le premier tour des élections municipales de la commune d’Ostelsheim, dans le sud-ouest de l’Allemagne, près de Stuttgart. Un scrutin historique. C’est la première fois qu’un réfugié syrien ayant fui la guerre civile syrienne...

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Encore une preuve de plus que le « grand remplacement » en Europe est bien en marche…

JPF

15 h 39, le 21 juin 2023

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Commentaires (1)

  • Encore une preuve de plus que le « grand remplacement » en Europe est bien en marche…

    JPF

    15 h 39, le 21 juin 2023

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