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Moyen-Orient - ENTRETIEN EXPRESS

Pourquoi Ali Shamkhani, chef de la sécurité nationale en Iran, a t-il été remplacé ?

Ali Shamkhani, à la tête du Conseil suprême de sécurité nationale d’Iran durant dix ans, a été remplacé lundi par Ali Akbar Ahmadian, selon un décret officiel iranien. Saeid Golkar, de l’Université de Tennessee à Chattanooga, fait le point pour « L’Orient-Le Jour ».

Pourquoi Ali Shamkhani, chef de la sécurité nationale  en Iran, a t-il été remplacé ?

Ali Shamkhani lors d'une réunion sur la sécurité nationale en 2018. Photo d'archives AFP

Ali Akbar Ahmadian, général du Corps des gardiens de la révolution islamique (IRGC), a été nommé lundi par le président iranien Ebrahim Raïssi à la tête du Conseil suprême de sécurité nationale, la plus haute instance sécuritaire de la République islamique. Il remplace Ali Shamkhani, âgé de 67 ans, qui avait annoncé la veille sa « démission ». À ce poste qu’il occupait depuis 10 ans, celui-ci avait joué un rôle-clé dans la restauration des liens diplomatiques entre Téhéran et Riyad sous l’égide de Pékin, et avait été profondément impliqué dans des négociations concernant le nucléaire iranien. Son successeur, placé sur la liste noire des États-Unis depuis 2007, avait quant à lui rejoint les rangs des IRGC peu après la révolution de 1979, combattant durant la guerre Iran-Irak. Il a ensuite été aux commandes de la marine des gardiens et était jusqu’à présent responsable de leur centre stratégique Saeid Golkar, professeur adjoint de sciences politiques à l’Université de Tennessee à Chattanooga, aborde les enjeux de ce changement pour L’Orient-Le Jour.

Comment expliquer le timing du départ de Ali Shamkhani, sachant qu'il a été un acteur-clé de la normalisation avec l'Arabie saoudite?

Cela fait deux ou trois mois qu’il y a des spéculations à propos de la démission de Ali Shamkhani, notamment à cause de deux controverses le concernant. La première était sa relation avec Ali Reza Akbari, binational exécuté pour espionnage pour le compte du Royaume-Uni (en janvier 2023, NDLR). La deuxième concernait la corruption entourant des membres de sa famille et particulièrement son fils. Ali Shamkhani est l'oligarque le plus corrompu d'Iran, mais il a été capable de contrôler ses ennemis et rivaux pendant de nombreuses années. Il a été une personnalité importante, qui a travaillé à la réforme administrative sous l’ancien président Mohammad Khatami en tant que ministre de la Défense, et également avec les partisans de la ligne dure, avec Hassan Rouhani, etc. À mon avis, son succès est dû au fait qu’il était arabophone et en mesure de gérer les affaires sociales et politiques de la République islamique pour l'ayatollah Khamenei.

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C’est très improbable qu’il soit nommé à un poste plus important. Il y a eu quelques spéculations sur le fait qu'il serait le prochain candidat à la présidence, mais je pense que c'est complètement faux, nous ne le reverrons pas à un autre poste. Cela ne ressemblerait pas à l’ayatollah Khamenei si on reprend l’histoire depuis qu'il est devenu guide suprême. Selon moi, Ali Shamkhani n’est plus. Peut-être qu'il pourrait être nommé membre du Conseil du discernement de l’intérêt supérieur du régime, mais c’est presque insignifiant : c’est un garage politique où l’ayatollah Khamenei envoie les personnes qui ont été mises à la retraite politiquement. Il ne faut pas oublier que toutes les décisions prises en Iran impliquent directement l'ayatollah Khamenei. Même si Ali Shamkhani a négocié avec les Saoudiens à Pékin, tout a été fait directement avec l’approbation de l'ayatollah Khamenei, qui a été le seul à signer l’accord. Celui-ci est par ailleurs plus un accord de désescalade que de normalisation, et pourrait encore changer à long terme. Aussi, son rôle de négociateur avec le royaume wahhabite n’est pas une preuve d’influence.

Dans quelle mesure la nomination de Ali Akbar Ahmadian comme remplaçant annonce-t-elle un renforcement de l'emprise des gardiens de la révolution sur le pouvoir politique en Iran ?

Ali Akbar Ahmadian est l'un des plus grands stratèges du IRGC, qui, en général, se compose de membres qui parlent plus qu’ils ne pensent, comme son commandant en chef, le général Hossein Salami. Plutôt proche de la stratégie de l'ancien commandant en chef des gardiens, Ali Jafari, Ali Akbar Ahmadian se positionne sur une ligne très antioccidentale, antiaméricaine. De l’autre côté, il est également très calme et discret : depuis qu'il est devenu le chef du centre stratégique des gardiens, il n’a pas fait plus de cinq ou six entretiens médiatiques.

Ali-Akbar Ahmadian lors d'une conférence de presse à Téhéran en 1998. Photo d'archives AFP

Mais il faut être clair, les gardiens de la révolution ne sont pas séparés du régime, et ils n'essaient pas non plus de le contrôler : le régime et les gardiens ne font qu'un. La République islamique est à deux visages : le clergé et les gardiens de la révolution, qui en sont l'une des institutions les plus importantes, le principal pilier du régime de l’ayatollah Khamenei. La nomination de Ali Akbar Ahmadian est un phénomène très naturel, car il est très clairement allié à l’ayatollah Khamenei et à ses intérêts. Ce n’est pas particulièrement un renforcement du pouvoir des gardiens. Depuis 2009, on assiste progressivement à un renouvellement de l'élite politique en Iran. D'abord dans les instances non élues, puis au Parlement et à la présidence, presque tous les hauts responsables ont été remplacés. Le seul poste qui devait encore être changé était celui du responsable du Conseil suprême de sécurité nationale. Selon moi, c’est une préparation supplémentaire pour le guide suprême, qui essaie d’homogénéiser l’élite pour faire face aux crises à venir, tentant ainsi de s'assurer que lors de sa succession, elle sera sur la même longueur d'onde.

Dans quelle mesure cette nomination est-elle susceptible de modifier la politique extérieure de la République islamique ?

Tout d’abord il faut dire que le Conseil suprême de sécurité nationale est une grande organisation, et que son noyau dirigeant est composé de cinq à dix personnes, avec en sus beaucoup de commissions de travail et de chercheurs externes travaillant autour. Ils ont grandi rapidement au cours des vingt dernières années, et la prise de décision fait l’objet de négociations très lentes entre tous les groupes du régime : entre le Conseil suprême de sécurité nationale, et le Conseil du discernement et toutes les branches du pouvoir. Mais, il est vrai que Ali Akbar Ahmadian est très antioccidental et antiaméricain, proche de la ligne dure, et croit activement en la République islamique.

Eclairage

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Je pense que nous pouvons prédire que ces groupes qui gravitent autour du Conseil suprême de sécurité nationale auront de plus en plus d'influence sur l'élite politique, même s’ils sont déjà très forts. Ils deviendront de plus en plus antioccidentaux et antiaméricains, visant Israël, et poursuivant donc l’idéologie de base sur laquelle la République islamique est fondée. Nous pouvons supposer que l'avenir de l’Iran sera basé sur plus d'isolement face à la menace de l'Occident et d'Israël. De manière générale, nous n'allons donc pas assister à une désescalade, mais plutôt à une escalade avec l'Occident, qui ne concernera pas vraiment la région. Pour la République islamique, la région représente beaucoup moins d’enjeux comparé à la question d’Israël et des États-Unis. Ses principales priorités sont donc de saper Israël, de ne pas normaliser ses relations avec les États-Unis et d’essayer d'affaiblir le pouvoir de ces derniers dans la région. À mon humble avis, Ali Akbar Ahmadian renforcera ces priorités.

Ali Akbar Ahmadian, général du Corps des gardiens de la révolution islamique (IRGC), a été nommé lundi par le président iranien Ebrahim Raïssi à la tête du Conseil suprême de sécurité nationale, la plus haute instance sécuritaire de la République islamique. Il remplace Ali Shamkhani, âgé de 67 ans, qui avait annoncé la veille sa « démission ». À ce poste qu’il occupait...
commentaires (3)

Raiissiii a sûrement réalisé qu'à 67 ans, le gars est trop vieux!

Wlek Sanferlou

14 h 16, le 23 mai 2023

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Commentaires (3)

  • Raiissiii a sûrement réalisé qu'à 67 ans, le gars est trop vieux!

    Wlek Sanferlou

    14 h 16, le 23 mai 2023

  • CHEZ EUX, on peut garder son poste 5 ,10 ,15 ans, mais une fois «mal vue» ON REMPLACE . CHEZ NOUS si on est « mal vue» PENDANT 30 ans ON JUSTIFIE ET ON PROTÈGE ???

    aliosha

    13 h 41, le 23 mai 2023

  • Le dernier de nos soucis ,qu il aille au diable

    Robert Moumdjian

    04 h 28, le 23 mai 2023

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