Twitter et l'Arabie saoudite poursuivis aux Etats-Unis après la détention d'un utilisateur

La soeur d'un ressortissant saoudien emprisonné à la suite de tweets critiquant les autorités a engagé des poursuites mercredi en Californie contre twitter et l'Arabie saoudite, les accusant d'avoir collaboré à des fins de "répression". La plainte, déposée devant un tribunal fédéral de San Francisco, nomme directement le puissant prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane, et demande un procès en vue d'accorder des dommages-intérêts.

Abdulrahman al-Sadhan, employé du Croissant-Rouge saoudien, avait été arrêté dans son bureau à Ryad par la police secrète saoudienne en mars 2018, selon sa famille. Il avait ensuite été condamné à 20 ans de prison. Le travailleur humanitaire, qui avait étudié aux Etats-Unis, avait créé un compte twitter anonyme à travers lequel il critiquait le régime et retweetait certaines figures d'opposition. En décembre 2022, un tribunal de San Francisco a condamné un ancien employé de twitter pour espionnage en faveur de responsables saoudiens, tandis qu'un autre ancien employé de l'entreprise, soupçonné d'avoir fui pour l'Arabie saoudite, était recherché par les autorités américaines pour les mêmes raisons.

Sous la férule de Mohammed ben Salmane, l'Arabie saoudite mène une vaste répression contre les critiques et les dissidents, arrêtant des militants, des journalistes, des religieux et même des membres de la famille royale. Areej al-Sadhan, la soeur de Abdulrahman al-Sadhan et citoyenne américaine, affirme dans la plainte avoir appris que la police secrète saoudienne avait "brisé la main de (son frère) et broyé ses doigts, et le narguait en déclarant: +C'est la main avec laquelle tu tweetes+". La plainte avance également qu'Abdulrahman al-Sadhan a subi, en outre, des électrocutions et des coups de fouet, et qu'il a été placé à l'isolement "pendant plusieurs années".

Twitter et l'Etat saoudien sont accusés de s'être illégalement coordonnés à des fins de profits financiers. "Malheureusement, twitter est devenu un outil actif de la répression transnationale pour faire taire les voix dissidentes, au-delà des frontières de l'Arabie saoudite (...), et ce afin de monétiser la relation commerciale" avec le royaume, avance la plainte. Elle note en outre qu'un fonds d'investissement saoudien est devenu l'an dernier le deuxième actionnaire le plus important de twitter après Elon Musk et que certaines des parts saoudiennes avaient été vendues au fonds souverain du royaume.

Areej al-Sadhan affirme être "en vigilance constante" depuis l'arrestation de son frère. Elle dit craindre d'être enlevée et vivre un "cauchemar éveillé".