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Politique - Éclairage

Raï élève la voix pour défendre les acquis des chrétiens

Le chef de l’Église maronite dénonce un plan destiné à usurper les postes-clés qui reviennent aux maronites, notamment.

Raï élève la voix pour défendre les acquis des chrétiens

Le patriarche maronite Béchara Raï prononçant son homélie dominicale, hier. Photo tirée du compte Twitter de Bkerké

Le patriarche maronite Béchara Raï a eu des mots extrêmement durs à l’égard de la classe politique, hier, en pointant du doigt « la corruption et l’arrogance » des responsables. À l’occasion de son homélie dominicale à Bkerké, il a par ailleurs dénoncé, ouvertement cette fois-ci, des tentatives visant à usurper les postes-clés qui reviennent de droit aux chrétiens, notamment maronites.

Mgr Raï, qui ne cesse de hausser le ton depuis que l’échéance présidentielle fait l’objet d’un bazar injustifié à ses yeux, a tancé la classe politique et dénoncé sa « pathologie destructrice », alors que le pays est plongé dans une crise économique sans précédent et dans une vacance politique totale au niveau de l’exécutif. « Tout le peuple libanais demande aux groupes parlementaires d’arrêter de détruire le pays et ses institutions et d’appauvrir les citoyens », a martelé le prélat, appelant pour la énième fois à élire sans plus tarder un chef de l’État. Après dix séances parlementaires consacrées à l’élection présidentielle tenues depuis septembre dernier, les députés n’ont toujours pas élu de successeur à Michel Aoun dont le mandat est arrivé à terme le 31 octobre dernier. Une onzième séance doit se tenir ce jeudi, mais risque de finir comme les précédentes, alors que le camp du Hezbollah s’arme toujours du défaut de quorum pour faire durer le blocage.

« Vous avez épuisé tous les moyens, vous vous êtes perdus dans les défis et les slogans », a fustigé le prélat en s’adressant à l’ensemble de la classe politique. « Vous n’êtes arrivés à élire ni un président de défi, ni de consensus, ni rien », a-t-il encore dit dans une critique qui ne ménage aucune partie. « Nous appelons à élire un président conformément à la Constitution, un chef de l’État qui défende le bien commun et la Loi fondamentale, loin de tout intérêt personnel ou sectaire », a-t-il poursuivi.

Défendre les institutions, pas les personnes

Cette fois-ci, le patriarche a été un peu plus loin dans la réprobation, en évoquant « pour la première fois en ces termes », comme il le dit lui-même, ses appréhensions de voir l’ensemble des postes-clés occupés par les chrétiens, les maronites plus précisément, menacés, et non seulement la présidence de la République. Ayant souvent évité de défendre les intérêts chrétiens entendus dans leur sens étroit, le chef de l’Église maronite a ainsi franchi un cap hier. En prenant explicitement la défense des positions qui reviennent de droit aux maronites, le patriarche a choisi d’appeler les choses par leurs noms.

Focus

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« Si la vacance (à la présidence) se prolonge, d’autres vacances au sein de grandes institutions judiciaires, financières, militaires et diplomatiques vont suivre. Nous mettons en garde dès à présent contre un plan qui serait en gestation et qui viserait à créer un vide au niveau des postes maronites et chrétiens », a-t-il prévenu. « Nous constatons que plusieurs postes chrétiens sont aujourd’hui convoités afin qu’ils soient arrachés par le fait accompli et par le biais de manœuvres judiciaires, ou encore d’une jurisprudence dictée selon les besoins du moment », a-t-il persiflé. Le patriarche fait allusion au clivage qui a affecté même le corps judiciaire, que l’affaire de l’enquête sur l’explosion au port a fini par polariser à l’extrême. Il fait notamment allusion à la situation inconfortable dans laquelle se trouve aujourd’hui la présidence du Conseil supérieur de la magistrature, actuellement occupée par le juge Souheil Abboud, et les multiples conflits à caractère politique qui minent le CSM depuis peu, le juge Abboud étant dans le viseur des membres dits proches du 8 Mars.

Le patriarche maronite cible aussi la guerre menée par le camp aouniste contre le gouverneur de la Banque du Liban Riad Salamé. Une dérive devenue inacceptable pour Bkerké, du fait de la polarisation politique entre les camps du 8 et du 14 Mars, mais aussi des conflits entre les leaders chrétiens eux-mêmes, qui s’étripent dans le cadre d’un jeu de pouvoir. Béchara Raï s’est toutefois dépêché de préciser que ce ne sont pas les personnes qui occupent ces postes que l’Église cherche à défendre, mais la continuité et le bon fonctionnement de ces institutions. Car si la vacance présidentielle persiste, cela aboutira à une vacance au niveau des trois principaux postes chrétiens de la République. « Ce n’est pas le président du CSM qui nous intéresse, mais la justice. Ce n’est pas le gouverneur de la Banque du Liban qui nous intéresse, mais la banque centrale. Ce ne sont pas les banquiers qui nous intéressent, mais le système bancaire et l’argent des déposants », a-t-il lancé. Le patriarche craint effectivement que d’ici à la fin de 2023, les mandats du commandant en chef de l’armée (le général Joseph Aoun) et de Riad Salamé ne viennent à terme sans que l’on puisse leur trouver de successeur.

Qui remplacera Salamé ?

Ce que Bkerké craint aussi, c’est le scénario selon lequel une fois que le départ de Riad Salamé – prévu au mois de juin prochain – sera effectif sans qu’un successeur puisse être désigné en plein vide exécutif, l’un des vice-gouverneurs de la BDL, Wassim Mansouri, de confession chiite et présumé proche du mouvement Amal, ne le remplace par la force des choses. « C’est une succession prévue par le code de la monnaie et du crédit, mais qui est en principe valide dans le cas d’une démission de M. Salamé. Le texte n’est pas très clair au sujet de l’expiration du mandat de ce dernier », confie à L’Orient-Le Jour, sous le couvert de l’anonymat, un ancien cadre de la BDL. Selon le principe de la continuité des services publics, il est donc très probable que le texte s’applique à ce moment-là à la fin du mandat de M. Salamé.

Décryptage

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« Les chrétiens étaient les maîtres de l’industrie, du commerce, de l’éducation... Qu’en est-il aujourd’hui ? » a récemment souligné l’ancien Premier ministre Fouad Siniora, qui s’exprimait sur les craintes de l’avenir des chrétiens que répercute Bkerké depuis un moment. M. Siniora a dénoncé par la même occasion le « crime qui a été commis à l’égard des chrétiens et des Libanais en général sous le label de la récupération des droits », dans une allusion claire au mandat de l’ex-

président Michel Aoun. Selon lui, les chrétiens doivent se rendre à l’évidence qu’ils ne peuvent pas mener la bataille démographique, mais celle de leur rôle au sein de la société. Un message qui fait écho aux inquiétudes du patriarche.

Le patriarche maronite Béchara Raï a eu des mots extrêmement durs à l’égard de la classe politique, hier, en pointant du doigt « la corruption et l’arrogance » des responsables. À l’occasion de son homélie dominicale à Bkerké, il a par ailleurs dénoncé, ouvertement cette fois-ci, des tentatives visant à usurper les postes-clés qui reviennent de droit aux chrétiens,...

commentaires (4)

Ça n’est autre que l’ex président fort et fantoche qui leur a cédé tous les postes clés, les clefs des coffres forts et le pays contre un équitable partage et pour pouvoir trôner sur un fauteuil en qualité de figurant pour les photos. M. RAÏ, vous avez assisté au manège sans manifester la moindre opposition aux projets des deux comparses qui fricotaient avec nos ennemis. Il serait judicieux de nommer les choses et de demander une explication quand à l’implication de certains dans cette usurpation de notre pays, tolérée et approuvée moyennant dollars, postes et un simulacre de pouvoir. Nous les connaissons tous, et il serait temps de les juger et de les sanctionner à la hauteur de leurs crimes, qui qu’ils soient. Pour bâtir un nouveau pays il faut se débarrasser des bases fissurées et endommagées pour éviter un nouvel effondrement.

Sissi zayyat

12 h 31, le 17 janvier 2023

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Commentaires (4)

  • Ça n’est autre que l’ex président fort et fantoche qui leur a cédé tous les postes clés, les clefs des coffres forts et le pays contre un équitable partage et pour pouvoir trôner sur un fauteuil en qualité de figurant pour les photos. M. RAÏ, vous avez assisté au manège sans manifester la moindre opposition aux projets des deux comparses qui fricotaient avec nos ennemis. Il serait judicieux de nommer les choses et de demander une explication quand à l’implication de certains dans cette usurpation de notre pays, tolérée et approuvée moyennant dollars, postes et un simulacre de pouvoir. Nous les connaissons tous, et il serait temps de les juger et de les sanctionner à la hauteur de leurs crimes, qui qu’ils soient. Pour bâtir un nouveau pays il faut se débarrasser des bases fissurées et endommagées pour éviter un nouvel effondrement.

    Sissi zayyat

    12 h 31, le 17 janvier 2023

  • "Après dix séances parlementaires consacrées à l’élection présidentielle tenues depuis septembre dernier, les députés n’ont toujours pas élu de successeur à Michel Aoun dont le mandat est arrivé à terme le 31 octobre dernier". Et alors? Sa Béatitude a-t-elle oublié que la vacance présidentielle post-sleimanesque a duré 29 mois? Nous en sommes encore au milieu du troisième mois post-aounesque!!!

    Georges MELKI

    10 h 44, le 16 janvier 2023

  • Vous vous réveillez un peu tard Monseigneur. Ça fait des années que l’on vous dit que le projet du Hezbollah demeure celui clairement déclaré par Hassan Nasrallah à la télé face au martyr Gebran Tueni à savoir, la transformation du Liban en république islamique. Et devinez à présent qui l’a aidé, consciemment ou inconsciemment, dans ce projet : le CPL et son fondateur uniquement pour arriver à la magistrature suprême et terminer le travail débuté en 1989 qui a eu comme résultat la faillite totale de toutes les institutions, de l’économie et de la monnaie nationale.

    Lecteur excédé par la censure

    09 h 04, le 16 janvier 2023

  • Un constat évident. A croire que seuls les chrétiens ne peuvent plus se défendre car un parti qui dit vouloir récupérer les droits des chrétiens est le véritable instigateur de cette cabale. Par intérêt égoiste et politicien ce Parti a vendu son âme au diable. Il a mis une grande partie des chrétiens sous la botte chiite, et maintenant que tout est perdu il gigote pour s’en sortir mais ne sait plus comment. La seule promesse qu’il a tenue c’est de nous emmener en enfer. Haro sur le baudet !

    Goraieb Nada

    08 h 28, le 16 janvier 2023

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