Un tribunal américain ouvre la voie à l'action d'un déposant contre une banque libanaise

Une cour d'appel américaine vient de déterminer que les actions en justice contre les banques commerciales libanaises pourront être jugées à l'extérieur du Liban, selon une décision consultée par l'agence Reuters, ouvrant ainsi la voie à d'autres cas de déposants cherchant à récupérer leurs fonds illégalement bloqués.

Au cours des trois dernières années d'effondrement financier du Liban, les banques ont imposé des contrôles stricts sur les retraits en dollars américains et dans la monnaie locale, qui a perdu plus de 90 % de sa valeur. Ces restrictions, qui n'ont pas force de loi, ont été contestées devant les tribunaux locaux et internationaux par des épargnants qui cherchent à débloquer leur argent en dollars américains, avec des résultats mitigés.

La décision du tribunal, rendue jeudi dans une affaire intentée par des déposants libanais contre le leader du marché des crédits Bank Audi, a annulé la décision d'un tribunal fédéral de district qui avait déclaré que les tribunaux de Beyrouth avaient "compétence exclusive" pour juger les affaires contre les banques libanaises. 

Récit

La banque, le braqueur et le déposant

Intenté par la famille Raad devant la Cour suprême de New York en décembre 2020, le procès faisait valoir que Bank Audi avait rompu son contrat en refusant de transférer les fonds à l'étranger au début de la crise financière, selon le document judiciaire. Cette banque a porté le dossier devant un tribunal fédéral de district, qui a rejeté la demande au motif que de telles affaires ne devraient être entendues que par des tribunaux libanais.

Nada Abdelsater, une avocate du cabinet ASAS Law représentant Patricia, Stéphanie et David Raad aux côtés de l'avocat Douglas Kellner, a déclaré que la décision prise cette semaine pourrait leur permettre de poursuivre l'affaire, affirmant qu'elle avait "marqué l'histoire". Elle a précisé qu'il s'agissait de la première décision new-yorkaise contre une banque libanaise depuis que la crise a éclaté en 2019. "La porte est maintenant ouverte, et la véritable action commence", a-t-elle dit à Reuters. "Cette décision lève à juste titre le principal obstacle qui empêchait jusqu'à présent les affaires d'être engagées (...) et cette décision de New York nous permet de poursuivre les procédures devant les tribunaux compétents en dehors du Liban", a ajouté l'avocate.

Mme Abdelsater a précisé que les Raad voulaient pouvoir accéder aux 17 millions de dollars qu'ils avaient en épargne à la Bank Audi.

La Bank Audi à Beyrouth n'a pas donné suite immédiatement à une demande de commentaire déposée hors des heures de bureau. Dans une réaction à Reuters par courriel, Jeffrey Rotenberg, un avocat de DLA Piper représentant Bank Audi dans cette affaire, a estimé que la décision n'avait "pas valeur de précédent", ajoutant qu'il existe plusieurs autres motifs de rejet que nous continuerons à faire valoir devant le tribunal de district".