C’est « la liste de la honte ». Celle des pays qui ont voté contre un projet de résolution de la troisième commission de l’Assemblée générale de l’ONU condamnant les violations des droits de l’homme en Iran. Une fois de plus, le Liban y conserve sa place.
Le mercredi 16 novembre, le projet de résolution a été adopté à la majorité des voix : 80 ont voté pour, 28 contre, dont le pays du Cèdre, et 64 pays se sont abstenus. Le comité onusien a exhorté la République islamique à cesser de recourir à une force excessive contre les manifestants, qui organisent des rassemblements quotidiens à travers le pays depuis l’arrestation arbitraire de Mahsa Amini et sa mort le 16 septembre dernier alors qu’elle était en garde à vue. L’Iran a rejeté la dernière résolution en estimant qu’elle n’est qu’une simple répétition « d’accusations sans fondement » portées contre lui, dans le but de le « diffamer » et de « propager l’iranophobie », selon les termes employés par le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, Nasser Kanaani. Depuis le début de la vague de protestations toujours en cours, 350 manifestants ont été tués et 14 000 personnes ont été emprisonnées, la justice iranienne condamnant plusieurs d’entre elles à mort dans des procès fictifs. Une situation que feint d’ignorer un proche du président du Parlement libanais Nabih Berry, qui affirme ne pas « suivre les nouvelles internationales ».
L’Iran est considéré par la diplomatie libanaise comme une ligne rouge, et aucun changement ne semble être à l’ordre du jour. « Les amis du Liban à l’ONU sont surpris que ce pays soit désormais en dehors du consensus mondial sur les droits de l’homme, bien qu’il se targue d’être l’un des auteurs de la Déclaration universelle des droits de l’homme », déplore une source diplomatique étrangère qui a requis l’anonymat. « Il pourrait au moins s’abstenir », appuie la source. Le vote de l’Assemblée générale de l’ONU est passé quasi inaperçu dans les milieux officiels, où on se renvoie l’ascenseur. « Il faudrait poser la question au ministère des Affaires étrangères », lance un conseiller du Premier ministre désigné Nagib Mikati. Sauf que le chef de la diplomatie, Abdallah Bou Habib, n’a pas donné suite à nos appels.
Selon le conseiller de M. Mikati, le Liban est resté fidèle à une « position traditionnelle de ne pas condamner » l’Iran. Il s’était déjà opposé en novembre 2020 à une résolution de l’ONU dénonçant la répression de la République islamique, lors des manifestations qui ont eu lieu entre novembre 2019 et juillet 2020. Cette décision lui avait valu de figurer sur la « liste de la honte » de l’ONG onusienne UNWatch. Le 24 novembre, le Liban devrait donc, sans surprise, se ranger une fois encore du côté de l’Iran, lors du vote d’une résolution visant à tenir la République islamique pour responsable lors d’une session extraordinaire du Conseil des droits de l’homme de l’ONU.
« Nous n’avons pas changé de position par rapport au dernier vote concernant la République islamique », confirme un responsable gouvernemental haut placé. « Nous avons, une nouvelle fois, voté contre une résolution qui condamne l’Iran et nous nous sommes abstenus pour ce qui a trait à la Syrie », explique-t-il sous couvert d’anonymat. Nombre d’observateurs déplorent ce vote systématique (en faveur de l’Iran), alors que lors de la dernière séance, le Liban s’était abstenu de voter en faveur d’une résolution condamnant les violations des droits de l’homme en Syrie.
« La stupidité » des Libanais
« La résolution en question n’est pas contraignante et n’a pas d’importantes incidences sur la scène politique internationale », ajoute ce responsable, comme pour minimiser la portée du choix fait par la diplomatie libanaise. Du côté de Aïn el-Tiné, on renvoie d’emblée la balle dans le camp du palais Bustros. « Il ne s’agit pas d’une résolution du Conseil de sécurité, mais de l’Assemblée générale », nous dit le proche de Nabih Berry. « Et comme d’habitude, le Liban s’oppose à toute résolution contre l’Iran », précise ce proche du président de la Chambre, allié traditionnel du Hezbollah pro-iranien. Et de rappeler qu’à la faveur de la politique officielle de distanciation par rapport aux conflits régionaux, Beyrouth opte pour l’abstention au moment du vote d’une résolution portant sur la Syrie. En octobre dernier, le Liban s’était pourtant rangé du côté des capitales occidentales, en votant à l’Assemblée générale en faveur d’une résolution condamnant l’annexion par la Russie de quatre régions séparatistes de l’est de l’Ukraine. Le Hezbollah s’était d’ailleurs abstenu de commenter une décision qui était intervenue en pleines négociations avec les États-Unis sur le tracé de la frontière maritime avec Israël. Quelques mois plus tôt, en mars, Beyrouth avait également voté à l’Assemblée onusienne une résolution isolant Moscou, tout comme la majorité des pays arabes. Contacté, le parti chiite n’a pas répondu à nos appels, alors que son allié chrétien, le Courant patriotique libre, tout comme les Forces libanaises, se sont abstenus de commenter en arguant du fait que la question n’a pas encore été débattue, deux jours pourtant après que le vote ait eu lieu à New York. Usant du sens de la répartie qu’on lui connaît, le leader druze Walid Joumblatt dénonce « la stupidité des Libanais » qui vont « à l’encontre du sens de l’histoire ». « Les Libanais font les malins, croyant que le Liban est le nombril du monde en termes de libertés, mais c’est un grand mensonge. Ils n’ont rien appris », déplore le chef druze dans sa critique des autorités diplomatiques et politiques.
ce n'est pas le Liban qui a voté c'est Hezbollah /l'iran c'est les mercenaires de la dictature qui ont voté
15 h 53, le 20 novembre 2022