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Culture - Quoi qu’on en lise

Tu ne mourras point

Dans « Vivre vite » de Brigitte Giraud (à qui a été attribué, ce jeudi, le Goncourt 2022, ndlr) et « Comment j’ai tué mon père » de Sara Jamillo Klinkert, les deux écrivaines reviennent dans leur roman sur la mort de l’un de leurs proches.

Tu ne mourras point

Brigitte Giraud. Photo Pascal Ito ©Flammarion

La religion est pour de nombreux croyants une réponse à la question irrésolue de la mort. Pour Brigitte Giraud et Sara Jamillo Klinkert, c’est le roman qui tente de répondre à cette inconnue. Dans Vivre vite (Flammarion), Brigitte Giraud raconte l’histoire de son mari mort dans un accident de moto. Sara Jamillo Klinkert revient sur l’assassinat de son père, abattu en Colombie par un tueur à gages, dans Comment j’ai tué mon père (Stock). Chez l’une comme l’autre, leur roman semble guidé par un seul commandement, le commandement manquant dans l’Ancien Testament : Tu ne mourras point.

Le temps suspendu

Et si Brigitte Giraud n’avait pas voulu vendre l’appartement, et si son frère n’avait pas pris une semaine de vacances, et si, et si, et si, l’écrivaine revient avec des si sur le décès de Claude, son mari, dans un accident de moto, une moto qui ne lui appartenait pas, qui appartenait au frère de Brigitte, une « Honda 900 CBR Fireblade », « cette Honda mensongère a fini par être retirée de la vente en 2004 », écrit-elle. Vivre vite est une enquête sur la possibilité d’éviter une mort, cette mort, celle de Claude, le 22 juin 1999. Est-ce possible d’éviter un drame si l’on avait fait les choses autrement ?

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Brigitte Giraud enquête méticuleusement sur les heures, les jours, les semaines… qui ont précédé l’accident, et c’est une histoire d’amour qu’elle déplie, un amour giraudien qui aimait chez son mari ce qui a éventuellement causé sa mort : un besoin de virilité, une certaine fougue, une envie de vivre vite, pleinement, comme ses icônes : Lou Reed, James Dean et d’autres, des icônes de vie et de mort, qui trouvaient une sensation de plénitude dans les dangers et les excès. Vivre vite a été écrit vingt ans après le décès de Claude et l’écriture de Brigitte Giraud reste fougueuse, elle prend aux tripes, comme si Claude était mort hier, comme si le temps s’était arrêté le 22 juin 1999.

Brigitte Giraud. Pascal Ito ©Flammarion


Un « Roma » colombien

Les jours bizarres de Medellin : « À la télévision, on voyait des bombes exploser, des gens assassinés, et rien n’était plus dangereux qu’une moto stoppant à votre hauteur à un feu rouge ! Tout sauf ça. » Chaque pays a ses propres angoisses et selon les époques elles diffèrent. Pour Sara Jamillo Klinkert, c’était les motos qu’elle craignait le plus en Colombie à la fin des années 80. « Il me suffisait d’en voir une pour commencer à trembler et sentir dans mon ventre un creux impossible à combler », écrit-elle au début de son roman. La première scène du livre laisse sans voix. Une jeune fille de onze ans, en voiture avec sa famille, se trouve nez à nez avec deux hommes à moto, des armes à la main. S’enclenche un ballet incessant de va-et-vient entre la voiture et la moto. La suite est tragique. Son père, avocat, mourra ainsi quelques jours plus tard. Sara Jamillo Klinkert revient sur ce drame, son enfance, loin des histoires clichées sur les narcos. Ici, l’histoire est celle des victimes, en particulier des proches de la victime. Le roman rappelle à certains moments le film Roma d’Alfonso Cuarón, dans le rapport des enfants à la gouvernante, le sens des détails, l’élégance de l’écriture. Avec Comment j’ai tué mon père, Sara Jamillo Klinkert livre un premier roman d’une grande sensibilité, où elle « tue » son père « avec des mots » pour lui redonner vie à jamais.

Sara Jamillo Klinkert. Photo Ricardo Quesada


Vivre vite - Brigitte Giraud – Flammarion.

Comment j’ai tué mon père - Sara Jamillo Klinkert - traduit de l’espagnol (Colombie) par Anne Plantagenet – Stock.

Écrivain, journaliste, photographe et commissaire d’exposition, Sabyl Ghoussoub a sorti le 24 août dernier son troisième roman, Beyrouth-sur-Seine, aux éditions Stock, qui figurait dans la première sélection du prix Goncourt. Il a publié auparavant deux autres romans aux éditions de l’Antilope : Le Nez juif et Beyrouth entre parenthèses.

La religion est pour de nombreux croyants une réponse à la question irrésolue de la mort. Pour Brigitte Giraud et Sara Jamillo Klinkert, c’est le roman qui tente de répondre à cette inconnue. Dans Vivre vite (Flammarion), Brigitte Giraud raconte l’histoire de son mari mort dans un accident de moto. Sara Jamillo Klinkert revient sur l’assassinat de son père, abattu en Colombie par un...

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Merci pour ces recensions qui font l’éloge de l’écriture et de la littérature

Chemla Yves

08 h 29, le 03 novembre 2022

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Commentaires (1)

  • Merci pour ces recensions qui font l’éloge de l’écriture et de la littérature

    Chemla Yves

    08 h 29, le 03 novembre 2022

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