Rechercher
Rechercher

Politique - Liban-Israël

Frontière maritime : tout est une question de timing

Les deux camps affichent un optimisme prudent quant à l’imminence d’un accord et espèrent en tirer profit localement.

Frontière maritime : tout est une question de timing

Une plateforme flottante de la société Energean PLC, le 2 juin 2022 sur le canal de Suez. Suez Canal Authority/HO/AFP

Se rapproche-t-on de la ligne d’arrivée ? Une proposition écrite transmise par le médiateur américain, Amos Hochstein, chargé des négociations indirectes sur la frontière maritime entre le Liban et Israël, devrait être reçue par Baabda avant la fin de la semaine, selon une déclaration publiée hier sur le compte Twitter du président Michel Aoun. Le conseiller de ce dernier, le vice-président du Parlement Élias Bou Saab, a remis au diplomate américain, mardi dernier à New York, la réponse du Liban aux dernières demandes israéliennes. En marge de l’Assemblée générale des Nations unies, le Premier ministre sortant, Nagib Mikati, s’est lui aussi entretenu avec M. Hochstein, qui est entré en contact avec les autorités israéliennes pour rapprocher les points de vue. Tant du côté libanais que du côté israélien, on se dit proche d’un accord. Michel Aoun est même allé jusqu’à affirmer il y a quelques jours que les négociations étaient entrées dans leur « phase finale ». Les choses semblent donc s’accélérer... mais au final, ce sera une question de timing. Et à chaque camp ses propres calculs.

Enjeux électoraux

Côté israélien, le Premier ministre, Yaïr Lapid, a estimé dimanche qu’un accord devrait être trouvé « dans les deux semaines », selon des propos rapportés dans des médias israéliens. Il a toutefois indiqué qu’Israël pourrait mener des « opérations secrètes » contre le Hezbollah, son ennemi juré au Liban. « Mon pays mène des opérations secrètes contre le Hezbollah et il n’est pas nécessaire d’entrer en guerre à chaque fois que le parti libanais lance des menaces. Il y a toujours des solutions médianes », a déclaré M. Lapid. Le ministre israélien de la Défense, Benny Gantz, a lui aussi estimé qu’un accord avec le Liban est « possible », prévenant dans le même temps que si le Hezbollah choisissait l’escalade contre l’État hébreu, « c’est le Liban qui en payerait le prix ». Depuis plusieurs semaines, le Hezbollah multiplie les menaces d’une confrontation militaire si Israël commence à extraire du gaz du champ de Karish avant que le Liban puisse en faire de même dans sa zone économique exclusive (ZEE). Dans sa dernière allocution la semaine dernière, Hassan Nasrallah a rappelé que pour le Hezbollah, la « ligne rouge, c’est le début de l’exploitation par Israël du pétrole et du gaz de Karish ». « Nos yeux sont braqués sur Karish et nos missiles aussi », avait-il menacé. Mais dans ce discours, la volonté de laisser plus de temps aux négociations – sans rappeler l’ultimatum de fin septembre – primait sur le reste.

Lire aussi

Frontière maritime : le sprint final a débuté

Les déclarations de MM. Lapid et Gantz, deux figures centristes, interviennent à quelques semaines des élections législatives israéliennes, les cinquièmes en seulement quatre ans. Et ces derniers jours, le dossier des négociations avec le Liban s’est invité dans la campagne : la droite israélienne, principalement l’ancien Premier ministre Benjamin Netanyahu, accuse le gouvernement en place de plier face aux menaces du Hezbollah, et espère capitaliser là-dessus. A contrario, M. Lapid espère qu’en parvenant à un accord avec le Liban, il pourra se poser en homme d’État capable de ramener la stabilité à la population israélienne.Au Liban aussi, le dossier est éminemment politique. D’un côté, le camp du président Michel Aoun espère arriver à un accord au plus vite, alors qu’il ne reste qu’environ un mois avant la fin du sexennat. La résolution de ce litige ouvrirait en effet la voie à une exploitation lucrative des champs gaziers libanais et pourrait donc être considérée comme un – rare – exploit du mandat Aoun. D’ailleurs, Gebran Bassil, le gendre du président, a déjà donné le ton. « Que ce soit avant ou après la fin du mandat, la signature d’un accord sur la frontière maritime sera une victoire de Michel Aoun », a-t-il affirmé dimanche. Ce qui ne serait pas sans déplaire à Nabih Berry. Le président du Parlement, farouche adversaire du camp aouniste, était l’interlocuteur privilégié des États-Unis dans ce dossier. C’est lui qui a annoncé, le 1er octobre 2020, la conclusion de l’accord-cadre sur le mécanisme de négociation entre le Liban et Israël, avant de passer le relais au président de la République. Sauf que Nabih Berry ne veut pas que Michel Aoun récolte seul les fruits d’un accord et mise, pour cela, sur le temps. C’est la principale raison pour laquelle il insiste pour que les deux camps retournent à Naqoura, au siège de la Finul, pour poursuivre leurs pourparlers et finaliser les derniers détails avant de sceller l’entente.

Technicalités

Les considérations politiques semblent donc primer sur les considérations techniques. En effet, selon les informations obtenues par L’Orient-Le Jour auprès d’une source diplomatique, il ne reste que quelques détails à finaliser. Lors de sa dernière visite au Liban, le 9 septembre, Amos Hochstein a fait parvenir aux autorités de nouvelles conditions israéliennes, que le Hezbollah a vite qualifiées de « piège ». En échange de la revendication libanaise de la ligne 23 et de l’intégralité du champ de Cana, Israël a demandé que le tracé de la frontière prenne en compte la « ligne des bouées ». Cette dernière, qui s’étend sur 6 kilomètres à partir de Ras Naqoura, a été mise en place par Israël après son retrait du Liban-Sud en 2000. Si la ligne 23 est adoptée comme frontière maritime entre les deux pays, la ligne des bouées sera alors du côté libanais.

Lire aussi

Frontière maritime : la « ligne des bouées », un piège israélien ?

Pour éviter ce scénario, Israël a demandé que le tracé soit dévié pour prendre en compte la ligne des bouées avant de rejoindre la ligne 23. Sauf que la principale condition du Liban, c’est que la ligne des bouées n’ait aucun impact sur le tracé de la frontière terrestre, et il exige un texte écrit dans ce sens. Et pour cause, le point de départ de la frontière maritime doit être le même que celui de la frontière terrestre. Or la ligne 23 débute au point B1 tandis que la ligne des bouées commence au point 31, plus au nord. Dans la réponse transmise la semaine dernière à Amos Hochstein par Élias Bou Saab, Beyrouth accepte que cette zone qui se situe entre la ligne des bouées et la ligne 23 soit déclarée zone sûre, mais sous souveraineté libanaise, étant donné qu’elle appartient à la ZEE du Liban. Beyrouth ne s’oppose pas non plus à ce que cette zone soit supervisée par la Force intérimaire des Nations unies, dont le mandat devrait alors être amendé.

Se rapproche-t-on de la ligne d’arrivée ? Une proposition écrite transmise par le médiateur américain, Amos Hochstein, chargé des négociations indirectes sur la frontière maritime entre le Liban et Israël, devrait être reçue par Baabda avant la fin de la semaine, selon une déclaration publiée hier sur le compte Twitter du président Michel Aoun. Le conseiller de ce dernier, le...

commentaires (3)

A qui Israel va faire cadeau ???? Aoun ? Berri ? Mikati ? Le Hezb ? Mais certainement pas aux Libanais. La canaille politichienne a deja fait voter une loi de "joint venture" et cree les coquilles vides qui doivent engranger pour eux les benefices du cote Libanais. A esperer "in fine" qu'il n'y ait ni gas ni petrole pour alimenter leur structure mafieuse.

Michel Trad

16 h 46, le 27 septembre 2022

Tous les commentaires

Commentaires (3)

  • A qui Israel va faire cadeau ???? Aoun ? Berri ? Mikati ? Le Hezb ? Mais certainement pas aux Libanais. La canaille politichienne a deja fait voter une loi de "joint venture" et cree les coquilles vides qui doivent engranger pour eux les benefices du cote Libanais. A esperer "in fine" qu'il n'y ait ni gas ni petrole pour alimenter leur structure mafieuse.

    Michel Trad

    16 h 46, le 27 septembre 2022

  • Que ce soit Pierre Paul Ali ou Hussein qui ait oeuvré pour la réalisation d’un accord l’Histoire nous le dira

    PIERRE GUILBERT

    08 h 03, le 27 septembre 2022

  • Wooow! Quel timing épatant... des frontières connues et disputées il y a plus de 10 ans ne seront (seront-elles?) établies qu'une fois la Patrie sera complètement detruite. Timing incroyablement parfait.

    Wlek Sanferlou

    04 h 22, le 27 septembre 2022

Retour en haut