Rares sont les musiciens qui se font un nom et percent sur la scène pop dans le monde arabe, mais André Soueid, l’un des plus célèbres jeunes violonistes locaux, a bien prouvé le contraire. Sur YouTube, parmi les Libanais, il est le premier musicien et le second artiste à avoir plus d’un million d’abonnés grâce à des reprises au violon des plus grands tubes arabes du moment qui accumulent les vues sur la toile, à leur tête Majbour, Ma baaref ou Talat Daqat. Son physique ainsi que son violon-signature aux couleurs bleues et aux formes futuristes y sont sûrement pour quelque chose. « C’est plus dur pour un musicien de devenir célèbre car il s’adresse généralement à un public plus sélectif, et puis, les gens préfèrent les chanteurs, estime l’artiste. Et il m’est encore plus difficile, à moi, d’expliquer ce qui a fait la différence. Je n’aime pas dire que je joue mieux que d’autres, mais plutôt que j’ai su comment toucher le public avec mes reprises et mes arrangements. Quand on reprend des chansons pop au violon, on leur donne une nouvelle vie, on les change. Comme Despacito, par exemple, que j’ai transformé d’un titre dansant en un titre slow.
Le succès, aussi, c’est beaucoup de travail sur les réseaux sociaux. » Sur les plateformes, le premier grand hit du violoniste de 30 ans remonte à 2016, avec la ballade romantique Ya ghali aalayi de Nancy Ajram.
« J’avais d’abord commencé à interpréter des chansons en anglais, explique-t-il. Mais j’ai très vite compris que ce marché était saturé. Quand Nancy a partagé ma reprise de son titre sur ses pages, cela a créé un effet boule de neige. J’ai enchaîné les enregistrements, avec notamment des chansons de Nassif Zeytoun et toujours en cherchant de nouvelles idées de reprises et d’arrangements réalisés en collaboration avec les AB Brothers, mais aussi avec le soutien précieux de ma sœur. »
Un parcours atypique
La musique, pour André Soueid, c’est d’abord et surtout une histoire de famille. Enfant, il accompagnait son père au conservatoire où ce dernier enseignait, lui-même issu d’une famille de musiciens. « Tous les instruments me fascinaient, se rappelle le musicien. Mais le violon m’a beaucoup plu. Mon père m’a alors inscrit à 6 ans au conservatoire et j’ai pu obtenir mon baccalauréat 9 ans plus tard. Ensuite, je me suis intéressé à des choses moins classiques, plus modernes, plus orientales. » Quand on lui demande, à seulement 15 ans, de jouer à un mariage, il commence à envisager la musique comme profession. Il participe à des concerts de stars comme Elissa et Ragheb Alamé, et avec l’orchestre national, avant d’être reconnu par le grand public via internet. Il sort alors deux singles et un minialbum avec le DJ Jad Halal regroupant cinq de ses propres compositions. L’année 2022 marque un tournant dans sa carrière, puisqu’il sort son premier clip en tant que violoniste et chanteur intitulé Lali. « J’ai pris des cours de chant, assure André. Quand je chante, c’est une valeur ajoutée pour mon show, mais cela restera évidemment secondaire. Le violon, c’est ma base dans la vie. Je ne compte pas devenir chanteur ! »
S’il ne se fait pas d’illusion sur ce plan, son idée la plus récente et la plus ambitieuse jusque-là a pour titre Wahem. Il s’agit d’un projet qui regroupera une série de sets de musique interprétés en direct, offrant un mélange de reprises et de compositions originales aux sonorités Deep House et Techno.
Le premier set, d’une durée de 20 minutes et qui comprend également le titre Wahem, est déjà disponible sur YouTube. « J’ai des affinités Deep House et Techno, et j’aime mélanger ces genres avec l’oriental, explique-t-il. Dans Wahem que je prépare, l’ambiance est progressive, chill, avec de longs sets sur lesquels on peut s’oublier en voiture avec les copains. Je joue, je chante, on s’amuse, et plus de cinq sets sont déjà prêts. Il y aura également des collaborations merveilleuses avec de nombreux artistes. » Filmé sur l’île aux Lapins, jaziret el-Araneb, le clip de Wahem offre des images dignes des destinations les plus exotiques, propices à des escapades estivales, et baigne dans une ambiance envoûtante faite de plages, de sable et de voyages entre Orient et Occident. « J’aime tourner mes clips au Liban car nous avons des endroits magnifiques. Les Libanais ont été surpris de savoir que ce clip a bien été tourné chez nous. » Outre ce projet atypique, André Soueid veut proposer plus de compositions originales, sans toutefois laisser tomber les reprises, le public l’ayant surtout apprécié dans ce style. Il vient d’ailleurs de sortir une reprise du tube récent d’Elissa et de Saad Lamjarred, Men awal dekika, à l’intention de ses fidèles fans. Le violoniste, qui s’autoproduit « pour garder une indépendance artistique », s’apprête également à rencontrer son public en direct lors de concerts. « J’ai trouvé le moyen de faire de la musique une carrière et de pouvoir en vivre. Comme dans tout domaine, on peut réussir ou pas. Mais la finalité de notre travail, ce qu’on aime par-dessus tout, c’est ce contact avec les gens quand ils vibrent au son des cordes. »