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Politique - Éclairage

Pourquoi le Hezbollah s’active-t-il à la frontière ?

Le parti chiite justifie le redéploiement de ses éléments au Liban-Sud par l’exacerbation de la crise autour de la délimitation de la frontière maritime.

Pourquoi le Hezbollah s’active-t-il à la frontière ?

Un Casque bleu de la Finul posté à Naqoura, une localité du Liban-Sud à la frontière avec Israël, le 4 mai 2021. Reuters/Aziz Taher

Depuis quelques semaines la tension monte crescendo au Liban-Sud où le Hezbollah a intensifié ses activités à la frontière avec Israël. Outre le redéploiement progressif de ses combattants revenus de Syrie, le parti chiite s’est attelé à l’installation d’une dizaine de conteneurs à la lisière du mur édifié par Israël, sans que la Force intérimaires des Nations unies ne puisse y accéder.

À ce jour, la fonction exacte de ces conteneurs est un mystère. Une source des forces sécuritaires estime qu’ils servent à des fins de surveillance et de collecte d’informations pour se prémunir contre toute éventuelle action qu’envisagerait l’État hébreu. Il n’empêche que ces nouveaux postes d’observation inquiètent au plus haut point, notamment au lendemain des menaces proférées par le secrétaire général du Hezbollah. Hassan Nasrallah avait mis en garde l’État hébreu contre toute tentative d’empiéter sur ce qu’il considère être le droit du Liban à ses ressources en hydrocarbures dans la zone maritime contestée entre les deux pays. Le leader chiite avait tenu ces propos quelques jours après l’arrivée, le 5 juin dernier, de l’unité flottante Energean Power, chargée d’extraire et de stocker le gaz pour le compte d’Israël. Il avait prévenu que la « Résistance » pouvait « empêcher l’ennemi d’extraire le pétrole et le gaz du champ de Karish », un gisement de gaz qui, selon Israël, fait partie de sa Zone économique exclusive, mais qui d’après le Liban se trouve dans des eaux contestées. Le dignitaire chiite, qui a évoqué une « agression », est allé jusqu’à parler d’une « nouvelle phase » qui a commencé avec l’arrivée de ce navire.

Dans les milieux du parti chiite, on refuse de donner de plus amples détails sur les conteneurs, d’infirmer ou de confirmer leur existence, pourtant visible, « pour des considérations de secret militaire ». Mais les officiels de la formation confirment les informations relatives au redéploiement au Liban-Sud de tous les combattants hezbollahis, y compris les forces de Radwane, une unité d’élite, qui se sont repositionnées « dans leurs villages respectifs ». « Il est clair que la mobilisation de nos unités est liée à la question de la délimitation de la frontière maritime », précise à L’Orient-Le Jour le porte-parole du Hezbollah, Mohammad Afif Naboulsi. « La mobilisation récente de nos éléments n’est un secret pour personne puisque le secrétaire général l’a clairement annoncée, en soulignant que nous nous préparons à toutes les éventualités », ajoute-t-il.

Une cyberopération contre la Finul ?
La présence de ces conteneurs ne serait toutefois pas uniquement liée au dossier de la frontière maritime, ceux-ci étant positionnés dans l’hinterland, le long de la frontière terrestre. L’objectif du Hezbollah serait à rechercher ailleurs. Mardi, le quotidien israélien Haaretz a confirmé la présence de ces conteneurs, et évoqué des objectifs à portée plus stratégique dépassant la crise provoquée par les négociations sur la frontière maritime. Outre une mission de renseignement dont seraient chargés des éléments du Hezbollah présents dans ces conteneurs, le quotidien évoque un autre objectif : « Garder à distance les forces de la Finul et les empêcher de s’approcher des nouveaux postes du Hezbollah. » D’après une source militaire libanaise qui a requis l’anonymat, ces conteneurs abritent effectivement des « observateurs » du Hezb mais « ne contiennent pas d’armes ».

Mercredi, le ministre israélien de la Défense, Benny Gantz, a accusé l’Iran de « mener une cyberopération contre les forces onusiennes visant à voler des données sur leur déploiement au Sud au profit du Hezbollah ». « Il s’agit là d’une nouvelle attaque de l’Iran et du Hezbollah contre les citoyens libanais et la stabilité du Liban », a fustigé le ministre israélien dans des propos au Jerusalem Post. Il a également affirmé que l’État hébreu « connaît les cybersystèmes et les méthodes opérationnelles de son adversaire ». Joint par L’Orient-Le Jour, le bureau de presse de la Finul a indiqué n’avoir reçu « aucune information directe sur l’incident présumé ». « La Finul et les Nations unies prennent la cybersécurité très au sérieux et ont mis en place des mesures solides pour protéger nos données », a affirmé la porte-parole de la Finul, Kandice Ardiel.

« Propriétés privées »
Pour les Casques bleus, c’est un nouveau défi. Si la Finul a réussi à instaurer un modus vivendi, en essayant de s’acquitter, autant que possible, de sa mission, ses relations avec le Hezbollah ne sont pas dénuées d’accrocs. La Finul, qui compte actuellement un peu plus de 10 000 Casques bleus, a été établie en 1978 par le Conseil de sécurité pour confirmer le retrait des troupes israéliennes du Liban-Sud. Après la guerre de l’été 2006, opposant Israël au Hezbollah, elle a été chargée de contrôler la cessation des hostilités et l’application de la résolution 1701 du Conseil de sécurité qui avait mis un terme au conflit. La 1701 définit le périmètre d’action de la Finul et prévoit l’établissement entre la ligne bleue et le Litani, d’une zone d’exclusion de tout personnel armé, biens et armes autres que ceux du gouvernement libanais et des Casques bleus. Sauf qu’il reste extrêmement difficile de clairement identifier les éléments du parti chiite qui circulent le plus souvent en tenue civile, et les distinguer des habitants dont ils sont de toute manière issus. Un flou voulu et qui sert au plus haut point les desseins du parti de Dieu.

Pour réduire la liberté de mouvement et d’investigation des forces onusiennes, le Hezbollah brandit également régulièrement l’argument de la violation des « propriétés privées ». Ce serait le cas avec les nouveaux conteneurs qui, selon la source militaire libanaise précitée, s’inscrivent dans le prolongement de douze autres structures déjà érigées et réparties sur des emplacements stratégiques le long de la frontière. Elles abritent une ONG présumée environnementale appelée « Green Without Borders ». Autant de postes-clés qui, selon une source proche des services sécuritaires, servent de couverture civile au parti chiite pour bloquer toute enquête sur les lieux. D’ailleurs, la Finul est régulièrement empêchée, parfois par la force, d’accomplir sa tâche. Le dernier incident en date – quand des hommes en tenue civile ont menacé, le 12 juin, les Casques bleus et tenté de prendre leur armes près de la localité de Arab el-Louaizé – a suscité un communiqué musclé de la part de la Finul qui a appelé l’armée libanaise – considérée comme une force tampon – « à garantir la sûreté, la sécurité et la liberté de mouvement de la force onusienne ». La force onusienne a également été empêchée, en avril 2021, d’installer un système de surveillance plus efficace dans la région. Dès qu’elle fut ébruitée, cette mesure, décidée dans les plus hautes sphères de l’ONU, a provoqué une levée de boucliers de la part des habitants du Sud, soutenus ou même encouragés par le Hezbollah qui refuse catégoriquement que les règles du jeu soient modifiées sur un territoire qu’il considère comme étant sa chasse gardée.

Depuis quelques semaines la tension monte crescendo au Liban-Sud où le Hezbollah a intensifié ses activités à la frontière avec Israël. Outre le redéploiement progressif de ses combattants revenus de Syrie, le parti chiite s’est attelé à l’installation d’une dizaine de conteneurs à la lisière du mur édifié par Israël, sans que la Force intérimaires des Nations unies ne puisse...

commentaires (11)

Le président du Liban, Hassan Nasrallah, est un homme fort qui défend le Liban. Ce n'est pas comme le vice-président Aoun !

Jacques Dupé

17 h 24, le 01 juillet 2022

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Commentaires (11)

  • Le président du Liban, Hassan Nasrallah, est un homme fort qui défend le Liban. Ce n'est pas comme le vice-président Aoun !

    Jacques Dupé

    17 h 24, le 01 juillet 2022

  • HN gesticule sur ordre des Mollahs qui se trouvent coincés dans leurs négociations avec les américains et pas du tout pour défendre les intérêts du Liban qui l’importent autant que sa mousse à raser. Il veut montrer qu’il est capable de mettre la pagaille dans la région et l’embraserait si les conditions de ses maîtres ne sont pas écoutées et respectées. Espérons que les libanais se réveilleront avant qu’il ne soit trop tard, surtout que les irresponsables politiques restent sourds et muets aux agissements des vendus au lieu de se plaindre et de faire valoir le droit du Liban à rester neutre par rapport aux conflits qui ne le concernent point alors qu’une faction vendue veut l’impliquer de force pour le détruire à la gloire d’un pays qui lui est complètement étranger et par sa culture et par ses doctrines d’un autre âge. Que fait Aoun? Pourquoi on ne l’entend pas accuser le HB de manigancer contre ce pauvre pays qui ne demande qu’à vivre en paix et qui paie, depuis des décennies le prix fort pour assurer la stabilité de la région? Que fait il donc pour ne pas se plaindre auprès des Nations Unies et des autres instances internationales pour l’usurpation du pays par une organisation de terreur qui trouble la tranquillité et la vie du peuple libanais pour sauver la face d’un pays étranger? Ah j’oublie, il est leur allié de toujours puisqu’il leur doit sa fonction et son titre pompeux.

    Sissi zayyat

    13 h 08, le 30 juin 2022

  • Nous ne verrons pas une seule goutte de pétrole tant que le Hezbollah existera tel quel. Il est clair que le monde ne pourra pas exploiter pleinement les richesses énergétiques de la région sous un risque de guerre permanent. Or après la guerre Russo-Ukrainienne cela devient pressant. Soit le Liban signe et clos le sujet, soit le Hezbollah sera littéralement détruit, et avec le Liban, pour permettre a la région de se développer. Il peut mettre autant de conteneur qu'il veut, il est miné par les espions travaillant au profit de ses ennemis sans compter que le peuple Libanais dans sa majorité écrasante veut sa peau. La France, l'Angleterre et les USA ont transféré des troupes dans la région. Des accords militaires importants ont été contracté entre les états autour de nous, la Russie a été neutralisé et notre pays est exsangue et incapable de soutenir une guerre même d'un jour. Si le Hezbollah provoque une guerre, se sera cette fois sa fin et la fin de la présence Chiite au Liban. Espérons qu'il remettra ses armes a l’armée pour nous éviter ce qui risque d'arriver et préserver notre spécificité de Liban message. Le pays a suffisamment payé la politique des idéologies pan-islamique ou trans-nationales de tout un chacun.

    Pierre Christo Hadjigeorgiou

    09 h 27, le 30 juin 2022

  • Et dans tout ca? Ou est la Republique Libanaise? ..... Ah oui j 'ai oublie, elle n'existe pas, ya que le Hezb qui envahit la place....

    IMB a SPO

    23 h 04, le 29 juin 2022

  • Que Hassan Nasrallah occupe toute sa chasse gardee dans le sud, qu'il ait le courage de la declarer unilateralement comme nouvel etat independant et qu'il foute la paix au Liban une fois pour toutes. Ceux qui veulent le suivre et s'etablir dans le sud, bien leur en fasse. Les vrais Libanais en seront ravis. Vive le LIban !

    Remy Martin

    22 h 20, le 29 juin 2022

  • Une reedition de 2006 … quand on nous avait promis que l’été serait calme et puis….le 12 juillet est arrivé

    Bery tus

    21 h 28, le 29 juin 2022

  • Notre histoire politique est traversée par des accords qui n’ont pas été respectés, d’où la méfiance qui règne lors des pourparlers indirects, sans oublier l’état de belligérance entre les deux parties. Et si le champ de Qana n’aurait assez de ressources exploitables, quand on se limite à ce seul champ, c’est que toutes ces négociations partiront en eau de boudin. Aboutir à un accord en bonne forme est une chose, et le respect des garanties (américaines) en est une autre, quand on pense aux ambitions de nos voisins qui ont déjà signé des accords d’exportation avec l’Europe.

    Nabil

    20 h 21, le 29 juin 2022

  • A-t-il eu vent des intentions, ou de la réponse de nos voisins du sud avant qu’elles ne soient rendues publiques, après la dernière visite de Hochstein ? Je n’en sais rien, mais j’ai cru comprendre que l’entrée en scène d’un éminent cadre de ce parti, avec la bonne réputation d’être familier des dossiers internationaux allait désamorcer rapidement la crise. Ecoutez, le feuilleton du traçage de la frontière maritime, avec ce dernier rebondissement, l’installation de conteneurs à des fins obscures, ne relèvent pas seulement de la démonstration de force ou de la provocation. On s’y perd dans ce feuilleton, (malgré l’article très intéressant de l’expert M. Ghazal, mais où l’on se heurte parfois à des révélations discutables), parce qu’il y a trop d’intervenants qui prennent le risque de nous faire rater le coche de l’exploration du gaz dans nos eaux territoriaux. La partie libanaise "s’accroche à l’optimisme américain", comme si elle est sur une pente glissante, bien qu’on soit sûr de son bon droit. C’est le prix de notre mauvaise préparation de ce dossier au départ, sans parler des moyens de s’imposer, et c’est là que le Hezb s’investit sur un "territoire qu’il considère comme étant sa chasse gardée".

    Nabil

    19 h 20, le 29 juin 2022

  • oulala, la resistance met des conteneurs....l'arme redoutable contre le F-35 furtif...ca promet un ete tres chaud!

    Elementaire

    18 h 32, le 29 juin 2022

  • Les mafieux trouvent toujours à justifier ... même la destruction du Liban

    Zeidan

    18 h 00, le 29 juin 2022

  • Le Hezbollah maitre du jeu !

    Jacques Dupé

    17 h 52, le 29 juin 2022

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