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Monde - Religion

Le conflit change la donne au profit de l’Église ukrainienne indépendante

Le conflit change la donne au profit de l’Église ukrainienne indépendante

Le métropolite Onufrij, primat de l’Église orthodoxe d’Ukraine (patriarcat de Moscou), le 14 octobre 2018 à Kiev. Volodymyr Shuvayev/AFP

L’offensive militaire russe en Ukraine « rebat les cartes » au sein de l’orthodoxie dans ce pays au profit de l’Église indépendante d’Ukraine, tandis que l’Église orthodoxe relevant de Moscou perd de son influence, observent plusieurs spécialistes.

Quelle est la situation dans ce pays ?

Les orthodoxes en Ukraine sont divisés. Une partie est fidèle au patriarcat de Moscou. « C’est l’Église la plus nombreuse en termes de communautés (11 000 à plus de 12 000 paroisses selon les sources), mais pas en nombre de fidèles : 4 à 5 millions », affirme Antoine Arjakovsky, historien de confession orthodoxe, directeur de recherche au Collège des Bernardins à Paris. Elle a pour chef le métropolite Onufrij, qui dépend du patriarche Kirill de Moscou.

Une autre partie se revendique de l’Église orthodoxe indépendante (« autocéphale ») d’Ukraine, reconnue comme telle en 2018 par le patriarche Bartholomée de Constantinople, le plus prestigieux dignitaire des Églises orthodoxes. Cette décision historique avait mis fin à plus de 300 ans de tutelle religieuse russe et provoqué la colère du patriarcat de Moscou, qui avait dénoncé un « schisme ». Cette Église comprend « environ 15 millions de fidèles », selon M. Arjakovsky, qui cite les statistiques de l’institut d’études ukrainien Razoumkov.

Le patriarche Kirill, chef de la puissante Église orthodoxe russe depuis 2009, a justifié, dans un sermon très politique le 27 février, l’intervention en Ukraine, y voyant une guerre contre les « forces du mal » qui « combattent l’unité » historique entre les deux pays. Dimanche, il a mis en avant les valeurs traditionnelles russes et pourfendu un Occident « décadent ».

Quels sont les signes de prise de distance par rapport au patriarcat de Moscou ?

Ces derniers jours, Kirill a vu se lever contre lui une partie de son clergé en Ukraine. Le métropolite Onufrij a fait une déclaration demandant aux Ukrainiens, quels qu’ils soient, de résister à l’invasion russe. Plusieurs prêtres ukrainiens dépendant du patriarcat de Moscou ont exigé de rompre tout lien avec l’Église russe, certains appelant à convoquer un concile national pour en décider.Dans certains diocèses, comme ceux de Soumy (Nord-Est) ou de Lviv (Ouest), le nom de Kirill n’est plus mentionné pendant les liturgies, « une énorme rupture d’adhésion », observe Jean-François Colosimo, historien spécialiste du monde orthodoxe. Selon Antoine Nivière, professeur à l’Université de Lorraine, « un bon quart des évêques » auraient pris leurs distances avec Moscou.

Quelles conséquences ?

« Une séparation (avec la tutelle de Moscou) est en marche, dans les cœurs et les cerveaux, juge M. Colosimo. Maintenant, il faut que cela prenne une forme statutaire, ce qui est plus compliqué (...) Les circonstances de la guerre ne se prêtent pas à la convocation d’un synode. »

« Il y a toutes les chances pour que se produise un mouvement de réunification de ces deux Églises orthodoxes, relève Antoine Arjakovsky. Il y a des discussions en ce sens sur les réseaux sociaux. » « Une bonne partie des évêques (sous tutelle russe) pourrait rejoindre cette Église autocéphale » et « la majorité des fidèles condamnant sévèrement la position du patriarche Kirill chercheront à se rapprocher de l’Église autocéphale », selon lui, même si « cela ne va pas se faire du jour au lendemain ».

Pour Antoine Nivière, la guerre en Ukraine « rebat les cartes » de l’orthodoxie. Lui aussi évoque, avec prudence, une possible « réconciliation » des deux branches. « C’est faisable, mais dans un pays indépendant, pas dans un pays privé de sa souveraineté », met-il en garde.

Et hors d’Ukraine ?

Des répercussions sont déjà à noter en Europe occidentale. Dans un communiqué le 3 mars, le métropolite Jean de Doubna, à la tête d’une soixantaine de paroisses de tradition russe en Europe occidentale, a exprimé son soutien à « l’ensemble du peuple ukrainien et des Églises orthodoxes ukrainiennes », appelant son supérieur, le patriarche de Moscou Kirill, à « intervenir » pour faire cesser le conflit. « Sur le plan de l’orthodoxie mondiale, on est dans un moment de très fortes tensions », souligne M. Nivière. « La fracture qui existe depuis 2019 ne va pas se résorber », dit-il. Il en veut pour preuve, entre autres, le fait que le patriarche de Moscou a entrepris « depuis un mois d’étendre sa juridiction sur l’Afrique. Une mesure de rétorsion contre le patriarche d’Alexandrie, qui a reconnu l’église autocéphale d’Ukraine ».

Karine PERRET/AFP

L’offensive militaire russe en Ukraine « rebat les cartes » au sein de l’orthodoxie dans ce pays au profit de l’Église indépendante d’Ukraine, tandis que l’Église orthodoxe relevant de Moscou perd de son influence, observent plusieurs spécialistes.Quelle est la situation dans ce pays ? Les orthodoxes en Ukraine sont divisés. Une partie est fidèle au patriarcat de...

commentaires (1)

Waw même le patriarche , il va mettre toute l’orthodoxie contre lui

Eleni Caridopoulou

20 h 34, le 09 mars 2022

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Commentaires (1)

  • Waw même le patriarche , il va mettre toute l’orthodoxie contre lui

    Eleni Caridopoulou

    20 h 34, le 09 mars 2022

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