De grands yeux noirs, un sourire rayonnant, une voix profonde, Cynthia Karam, CeeCee pour les intimes et les followers, a mille visages. Et autant de personnages et de possibilités qui se bousculent dans sa tête et chaque fibre de son corps. Car, lorsque l’actrice est habitée par un rôle, ou est-ce le contraire, même pour quelques courtes minutes sur les réseaux sociaux, chacun de ses gestes, sa voix, son langage corporel tout entier se transforme. Dans la peau des autres, elle devient presque instantanément, et sans prévenir, une sorcière, une fée, une vieille dame, une danseuse de tango, un enfant, un jeune livreur, une bourgeoise, une révolutionnaire, une peste. Et en véritable caméléon, elle nous entraîne dans une palette d’émotions qu’elle partage presque spontanément et entièrement. Sans concessions, sans retenue.
@cynthyakaram La différonce onter lé jardan piblic et privé ! El 3ommé wel khossa! Cours de froncè a troblis 7abibetné! #funny #arab #coursfrancais #fyp ♬ original sound - Cynthya Karam
Car, dans la vie, il y a un peu de tout ça chez CeeCee, 54 700 followers aujourd’hui au compteur de ses réseaux sociaux. Une hyperactivité, une hypersensibilité, une hypergénérosité dans un corps hypermince. Des bras longs qui s’expriment en même temps qu’elle cherche ses mots et qu’elle les trouve, parfois, au détour d’une chanson qu’elle se met alors à fredonner. « Chanter, c’est toute ma vie. Quand je chante, j’ai l’impression de raconter ma vie avec les mots des autres, de me raconter aussi des histoires. Je retrouve une sérénité que je n’ai à aucun autre moment. Je suis heureuse… »
Peur de rien
Quand elle ne chante pas, Cynthia Karam aime surtout les personnages extrêmes. Ceux qui la bousculent, la poussent hors de ses limites, la précipitent en dehors du raisonnable et du politiquement correct. Son rôle rêvé, si ce n’est celui de Nicole Kidman dans Moulin Rouge ? Celui de Stephen Hawking dans The Theory of Everything. « J’ai toujours été casse-cou. Enfant, j’étais un vrai garçon manqué. Je me prenais pour Superman, j’ai essayé de voler à 5 ans avec un drap blanc sur les épaules… J’aurais pu être morte depuis longtemps », confie-t-elle dans un de ses grands éclats de rire. « J’ai cessé d’être folle au décès de mon père », reprend-elle, le visage brusquement retenu. « Plus jeune, je voulais être médecin, j’étais très forte en matières scientifiques, mais je suis tombée amoureuse de mon professeur de français, et, pour le suivre, j’ai choisi les matières littéraires ! »
@cynthyakaram Nebbi nkallem l’francis :vous revenissez avec les Ravions ici?? Y beaucoup di ni zanfants mortaient! Vous les alémaux! Vous les vaches du kiri! #fyp ♬ original sound - Cynthya Karam
Après le théâtre, les émissions télévisées à la Future TV (Ahla aalam, Chou baddo ysir, La youmal ), la Star Academy où, en préparant un tableau musical, elle tombe d’un échafaudage de 7 mètres de haut et se brise des côtes, à aujourd’hui 41 ans, la femme qu’elle est devenue affirme, le regard déterminé et ailleurs, « ne plus avoir peur de rien ». « La double explosion du 4 août a été un traumatisme énorme dont je ne me suis toujours pas remise », dit-elle. Alors, pour se distraire, pour donner des morceaux d’elle, sortir de cette peau et s’en réinventer d’autres, elle multiplie les expériences professionnelles. Chanter au sein de la troupe Les Bouffons à Noël pour les enfants, retrouver son compère Bruno Tabbal pour le clip musical Miss You Most à la même occasion ou habiter le personnage de Vera, affreuse sorcière dans The Visit – al-Ziyara, le feuilleton d’horreur (huit épisodes pour cette première saison) qui a battu les records d’audience sur Shahid, auprès, entre autres acteurs, de Dina el-Charbiny et Takla Chamoun. Tout lui plaît tant que c’est difficile. Marcher, respirer, parler, se taire « éternuer comme mon personnage »… Dans Bakkir, du réalisateur Samir Habchi, dont la sortie est prévue le mois prochain, elle devient Noura, avec l’accent parfait de la Békaa, la démarche et la gestuelle, si loin d’elle, d’une femme de la terre, avant de porter le voile de sœur Célestine pour le film de Lara Saba Tous les chemins mènent à Rome dont la sortie est prévue en 2022. Des tournages contraignants qui ont tous été faits dans des conditions difficiles en raison du Covid-19.
Rire de tout
Mais le meilleur remède à cette mélancolie sous-jacente qu’elle cache bien, c’est le rire, les éclats de rire qu’elle provoque, essentiellement sur les réseaux sociaux. TikTok a révélé cet autre aspect de son talent durant le confinement. « Je m’ennuyais, j’ai improvisé un sketch et ça a marché… » Depuis, régulièrement, elle se met, là encore, dans la peau d’un(e) autre, se grime le visage, se déguise, arbore des lunettes énormes, se dessine une barbichette, prend des drôles d’accents et, surtout, nous fait rire… Inlassablement. C’est là, semble-t-il, dans cette forme d’autodérision aussi, qu’elle puise sa force, son équilibre et ses bonheurs. « Je n’ai pas de problème à être laide, violente, psychopathe, détestable, à condition que ce soit un rôle qui m’intéresse et me fasse vibrer. » « You can ask me anything (vous pouvez me demander n’importe quoi) », dit-elle enfin. On sait qu’elle le fera. Bien…
Bio express
Chanteuse, elle a été une des huit participants de Star Academy à prendre part à la tournée qui a eu lieu dans les pays arabes. Au théâtre comme à la télévision, elle a travaillé avec de nombreux metteurs en scène, parmi lesquels Ebrahim Hatemikia, Najdat Anzour, Gabriel Yammine, Georges Khabbaz, Carlos Chahine, Layth Hajo, Jihad Andary, Aïda Sabra, Fouad Sakr et Marilyne Naaman, Rodney Haddad, Samir Habchi, Lara Saba et d’autres. Ces deux dernières années, elle a multiplié les projets, dont les suivants :
Les bouffons :
Home for Christmas (pièce de théâtre pour enfants) ;
Once Upon a December (concert de Noël pour enfants).
Feuilletons :
Amnesia (thriller. Réalisation : Rodney Haddad / Shahid Vip) 2020 ;
The Visit (horreur. Réalisation Adolfo Martinez / Shahid Vip) 2021 ;
Bakkir (social. Réalisation : Samir Habchi). Sortie prévue en février 2022.
Cinéma :
Tous les chemins mènent à Rome (Lara Saba). Sortie en 2022.
Théâtre :
Georges Khabbaz (2010- 2020) :
Matloub
el-Awal bis-saf
Mech mikhtilfine
Natrino
Illa iza
Illa iza tghayar chi
Yaoumiyat masrahji.
Carlos Chahine :
La cerisaie (2015) ;
Chansons :
Aankabout el-nounou
Albi byehmoul
Beirut City
Miss You Most at Christmas Time (cover).
Vidéoclip :
Road Trip, de 6 épisodes-titres, avec le ténor Béchara Moufarrej (2020).
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