Comme le martelaient ses représentants depuis la fin de la semaine dernière dans les médias, le secteur des transports routiers devait organiser aujourd’hui une « journée de colère », dont le président du syndicat des transporteurs routiers, Bassam Tleiss, avait détaillé le programme complet hier à l’issue d’une réunion de délégués de la profession et en présence du président de la Confédération générale des travailleurs libanais (CGTL), Béchara Asmar. C’est finalement un report jusqu’au 1er décembre prochain de cette grève générale qui a été décidé hier soir suite à une réunion de ces mêmes représentants avec le Premier ministre Nagib Mikati, le ministre des Finances Youssef Khalil, le ministre des Travaux publics et des Transports Ali Hamiyé et le ministre de l’Intérieur Bassam Maoulaoui.
Contacté par L’Orient-Le Jour, Béchara Asmar a ainsi indiqué que le ministre des Finances avait obtenu des syndicalistes un laps de temps supplémentaire « pour étudier la possibilité de mettre en place un plan de soutien aux transporteurs publics qui pourrait être financé par la Banque mondiale (BM) ». Une nouvelle promesse donc pour une profession qui n’en est pas à sa première suspension in extremis de grève suite à une réunion avec les autorités. Malgré un avant-goût déjà donné lundi matin lorsque des travailleurs du secteur avaient fermé d’eux-mêmes de nombreux axes routiers dans Beyrouth et certaines régions du pays et les appels d’hier matin de Bassam Tleiss et de Béchara Asmar à tous les syndicats concernés de prendre part à cette grève, ces derniers ont ainsi donné un peu plus d’un mois au nouveau gouvernement pour faire ses preuves.
Les revendications concernent principalement les conditions de travail et de vie des employés face à leur détérioration rapide au cours des derniers mois dans un Liban en crise depuis deux ans. En sus d’une dépréciation abyssale de la monnaie nationale face au dollar (s’échangeant hier autour de 20 500 livres le dollar), la hausse effrénée des prix des carburants ces dernières semaines a porté un coup dur à la profession et au pouvoir d’achat des Libanais en général. Cette augmentation est due à la levée progressive puis totale des mécanismes de subventions les concernant instaurés par la Banque du Liban (BDL) depuis octobre 2019, sans l’adoption d’un plan d’aide sociale qui profiterait aux familles à revenu modeste et aux personnes lésées par la flambée des prix. Révisés de manière hebdomadaire, les nouveaux prix des carburants doivent normalement être publiés aujourd’hui par le ministère de l’Énergie et de l’Eau. Ceux-ci ont dépassé la barre des 300 000 livres libanaises pour 20 litres d’essence.
Par ailleurs, l’Association des fonctionnaires a prévenu hier d’une possible « grève ouverte dès novembre » en raison également de la dégradation des conditions de travail dans l’administration publique, renforçant par là une grève déjà en cours « qui n’inclut pas le mercredi jusqu’à la fin de ce mois ». Dans son communiqué, la présidente de l’association, Nawal Nasr, a appelé les autorités à répondre aux droits des salariés en versant, entre autres, salaires et indemnités.
C'est extraordinaire, cette colère qu'ils prévoient de garder au frais pendant plus d'un mois pour la ressortir au jour J, aussi vivace qu'au premier jour. S'ils pouvaient faire preuve d'autant de flegme au volant, nos routes seraient moins insupportables
15 h 35, le 27 octobre 2021