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Moyen-Orient - Éclairage

Malgré la réhabilitation progressive d’Assad, la guerre se poursuit en Syrie

Hier, un attentat non revendiqué a eu lieu à Damas, suivi d’un bombardement par les forces gouvernementales d’un marché à Ariha, dans la province d’Idleb.

Malgré la réhabilitation progressive d’Assad, la guerre se poursuit en Syrie

Des Casques blancs transportant une victime après un bombardement par l’armée syrienne de zones résidentielles à Ariha, dans la province d’Idleb, tenue par les rebelles, le 20 octobre 2021. Photo Reuters

La journée d’hier en Syrie a rappelé que la guerre, en dépit du narratif employé par le régime et ses alliés, est loin d’être terminée. Le matin autour de 6h45, un attentat à la bombe a visé un bus militaire à Damas faisant, selon l’agence de presse officielle SANA, au moins 14 morts et trois blessés lors du passage du véhicule « près d’un pont stratégique ». Selon la même source, deux engins explosifs étaient attachés au bus. Un troisième, enfin, en est tombé après l’attentat et a été démantelé. Jamais en quatre ans la capitale syrienne n’avait connu une attaque aussi meurtrière. En mars 2017, le groupe jihadiste État islamique (EI) avait ciblé le Palais de justice, faisant au moins 30 morts. Si en Syrie l’EI a été défait en 2019, des cellules dormantes continuent de mener des attaques dans le désert qui s’étend du centre du pays à l’Est. D’après les informations de l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), toutes les victimes dans l’explosion d’hier sont des militaires. « C’est une attaque qui a requis une grande efficacité sécuritaire au vu du timing et de sa précision, puisqu’elle a eu lieu avant les embouteillages et au moment même du passage d’un bus militaire dans un lieu stratégique de la capitale », commente Ziad Majed, politologue spécialiste de la Syrie. « Cela pourrait venir de l’intérieur même du régime », avance pour sa part Navvar Şaban, chercheur au centre Omran, basé à Istanbul, et au centre Orsam, qui ne rejette pas toutefois l’hypothèse d’une attaque opérée par un groupe extrémiste jihadiste. « Mais honnêtement, ces groupes peuvent s’attribuer des actions auxquelles ils n’ont jamais participé. »

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Si l’attentat n’a pas été revendiqué, il semble avoir servi d’alibi aux forces gouvernementales pour bombarder peu de temps après, aux alentours de 8h, un marché de la ville d’Ariha, dans la province d’Idleb, dernier bastion échappant au contrôle du régime, dont la moitié est aux mains du groupe Hay’at Tahrir el-Cham (HTS), ex-branche syrienne d’el-Qaëda. Avec un lourd bilan humain : 13 personnes ont péri dont dix civils. Au même moment, six combattants des forces de la défense nationale, principale milice à la solde de Damas, ont été tués et sept autres ont été blessés lors d’une explosion dans un dépôt de munitions. Pour l’heure, les circonstances de cet incident ne sont pas claires et il s’agirait visiblement d’un accident. D’après le média iranien à destination du monde arabe al-Alam, l’épisode se serait produit lors d’une opération de maintenance routinière à l’intérieur du lieu.

Normalisation

Quelle que soit son origine, l’attentat qui a eu lieu hier à Damas remet en question le discours du régime et de ses alliés autour de la stabilisation du pays. Dans cette logique, l’intensification des bombardements du pouvoir contre Idleb pourrait s’expliquer par sa volonté de montrer les muscles et de souligner qu’il est en capacité de répondre rapidement lorsque ses fiefs sont pris pour cible, quand bien même aucun coupable n’a pour le moment été désigné. « Le régime peut évidemment utiliser comme justificatif l’attaque contre le bus militaire pour bombarder Ariha, en prétextant qu’il bombarde ceux qu’il considère responsables de l’attentat. Mais peu importe, résume Ziad Majed. Il y a une campagne qui a commencé depuis quelque temps, avec des bombardements qui s’intensifient depuis quelques semaines contre des dispensaires, des zones civiles et militaires autour de la ville et de plusieurs localités au sud d’Idleb, c’est-à-dire au sud de l’autoroute M4, qui relie Lattaquié à Alep », le littoral syrien à la grande ville du nord du pays. Un enjeu aussi politique que stratégique pour Damas. « Le régime vit actuellement l’extase de la victoire. Il traverse une nouvelle phase », souligne Navvar Şaban. Depuis plusieurs mois, l’opération de réhabilitation de Damas engrange de nombreux succès. Le Danemark avait ainsi révoqué les permis de séjour de centaines de réfugiés syriens au printemps, estimant que la situation dans la capitale syrienne et alentour était désormais « sûre ». En septembre, la Jordanie a rouvert sa frontière avec la Syrie. Quant à l’Égypte, elle multiplie les initiatives pour permettre la réintégration de Damas dans le concert des nations arabes. Aux yeux des opposants et des activistes, l’une des illustrations les plus grossières de la normalisation avec la communauté internationale a été la visite en Syrie dimanche dernier de Filippo Grandi, haut-commissaire des Nations unies pour les réfugiés (HCR). Ce dernier s’est notamment fendu d’un tweet dans lequel il affirme avoir « discuté avec le gouvernement syrien des moyens de renforcer la coordination des déplacements dans le cadre de nos interventions internes et de coopérer pour éliminer les obstacles au retour des réfugiés ».

« Dans ce contexte, au sein du régime lui-même, il y a différentes entités qui veulent avoir la main. Il y a de fortes chances qu’il y ait d’autres attaques similaires à celle qui a eu lieu à Damas et qui pourraient être le reflet des tensions entre différents courants, les prorusses, les pro-iraniens, etc. », avance M. Şaban. « Ce qui se passe à Idleb n’a rien à voir avec ce qui s’est passé à Damas. Le régime n’a pas besoin de justificatif pour bombarder Idleb », dit-il.

Pour mémoire

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Les bombardements dans la région se sont en effet intensifiés depuis le mois de juin, même s’ils n’avaient jamais complètement cessé depuis la signature d’un accord de cessez-le-feu négocié entre Moscou – allié de Damas – et Ankara, en appui à plusieurs groupes rebelles. Si ces négociations entre les deux protagonistes avaient permis de réfréner l’offensive du régime fin 2019 dans le but de récupérer la province, la population civile n’a en réalité jamais réellement été à l’abri. Le texte de l’accord prévoit ainsi des patrouilles russo-turques conjointes le long de l’autoroute M4. Si la Turquie a pu de ce fait augmenter sensiblement sa présence militaire, elle a préféré ménager son rival et partenaire russe plutôt que de répliquer aux attaques du régime. Fin septembre, le président russe Vladimir Poutine et son homologue turc Recep Tayyip Erdogan s’étaient rencontrés à Sotchi. « Il faut attendre les résultats des contacts entre Moscou et Ankara pour comprendre si cela va se transformer en campagne militaire ou s’il s’agit juste de messages rappelant qu’il n’y a pas d’accord clair concernant cette zone d’Idleb, au sud de l’autoroute M4 », affirme Ziad Majed.

La journée d’hier en Syrie a rappelé que la guerre, en dépit du narratif employé par le régime et ses alliés, est loin d’être terminée. Le matin autour de 6h45, un attentat à la bombe a visé un bus militaire à Damas faisant, selon l’agence de presse officielle SANA, au moins 14 morts et trois blessés lors du passage du véhicule « près d’un pont stratégique »....

commentaires (2)

Réhabiliter ce sauvage qui ne mérite que le tribunal et la corde pour donner suite aux centaines de milliers de morts, de déplacés, d'appauvris et de torturés qu'il a provoqué ? Dramatique et inhumain, quel monde ! Il ne peut que rejoindre et croupir avec nos dirigeants libanais ainsi que tous les dictateurs ou roitelets arabes, iraniens et autres politiques criminels en prison.

TrucMuche

15 h 44, le 21 octobre 2021

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Commentaires (2)

  • Réhabiliter ce sauvage qui ne mérite que le tribunal et la corde pour donner suite aux centaines de milliers de morts, de déplacés, d'appauvris et de torturés qu'il a provoqué ? Dramatique et inhumain, quel monde ! Il ne peut que rejoindre et croupir avec nos dirigeants libanais ainsi que tous les dictateurs ou roitelets arabes, iraniens et autres politiques criminels en prison.

    TrucMuche

    15 h 44, le 21 octobre 2021

  • L’iran a été obligée de restreindre la présence militaire de ses milices Hezbollah en syrie en faveur des russes.. Une concurrence apparaît discrètement entre russes et iraniens. La russie a le dessus historiquement et surtout militairement. La Syrie Assad est entre l’enclume et le marteau. La syrie reprend langue avec l’arabie. Assad va préférer , à terme, se ranger aux côtés des Russes ( et seoudiens) qui vont réhabiliter Assad sur le plan mondial. A terme ? Le liban qui, obligé d’avoir de bonnes relations de voisinage avec la Syrie… les pro et anti syriens vont s’unir contre l’occupation militaire et politique de l’iran au liban. En tout cas, ces incidents majeurs ne sont certainement pas organisés par Daech et cie…. Il faudra voir les autres options non avouées. A terme, la Syrie elle-même, va devoir se libérer de l’occupation de l’iran en Syrie…. Une présence russe restera de l’ordre militaire et économique cependant les perses, plus proches de la Syrie, leur occupation depassera ces domaines pour modifier la société syrienne et son régime dictatorial qui est encore laïc et ouvert ( non intégriste)

    LE FRANCOPHONE

    10 h 19, le 21 octobre 2021

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