Le pessimisme semblait de mise vendredi dans l'opposition issue du soulèvement populaire du 17-Octobre, après l'annonce de la formation du nouveau cabinet de Nagib Mikati, après treize mois de vide gouvernemental.
Camille Mourani, activiste de l’opposition issue du 17-Octobre, à L'Orient-Le Jour : "Ce gouvernement a été formé exactement de la même manière que les précédents, suivant la logique du partage de gâteau. Je ne vois pas comment il pourrait résoudre la crise ou apporter quoi que ce soit de nouveau. Je comprends que certains y voient un signe positif, mais il ne faudrait pas être très optimiste, pour moi c’est un faux espoir".
Nada Sehnaoui, de Beirut Madinati, à L'OLJ : "Ce gouvernement est supposé mener des réformes, or comment pourrait-il le faire quand ce sont toujours les mêmes corrompus au pouvoir, qui sont à l’origine de la crise actuelle ? Ils ne pourront prendre que des mesures cosmétiques à mon avis. Et même s’il y a, dans cette nouvelle équipe, des noms respectables, il faut voir aux mains de qui se trouve la décision politique. Dans un tel gouvernement, ces personnes-là ne pourront rien réaliser".
Ziad el-Sayegh, directeur exécutif du Civic Influence Hub, à L'OLJ : "Quels sont les critères suivant lesquels ce gouvernement a été formé ? Le débat n’a jamais porté sur le programme du gouvernement mais sur la répartition des parts, et on est loin du cabinet de spécialistes indépendants qui était promis. La déclaration du Premier ministre Nagib Mikati à Baabda aujourd’hui n’augure rien de bon : pourquoi un Premier ministre se contente-t-il de décrire une situation que nous connaissons tous au lieu de nous annoncer ce qu’il compte faire ? A mon avis, la formation de ce gouvernement n’a pas respecté l’esprit de la Constitution, il existe une partie qui a gelé la naissance de cette équipe durant treize mois jusqu’à modifier l’équilibre des forces en sa faveur, et c’est le Hezbollah. Voilà pourquoi la décision ne sera pas aux mains de ce gouvernement, mais ailleurs".
Naji Abou Khalil, coordinateur politique du Bloc national, à L'OLJ : "Nous avons très peu d’espoir que les choses changent vu la manière dont ce gouvernement a été formé et le clientélisme qui continue de l’emporter sur l’intérêt national. Nous ne pouvons parier sur un gouvernement qui a attendu un feu vert régional et international pour voir le jour. Ce qui est scandaleux, c’est que l’effondrement s’est nettement aggravé durant la période de formation du gouvernement. Nous allons surveiller de près les actions du cabinet censées résoudre les problèmes de la vie quotidienne, mais notre principal combat à venir reste celui des élections législatives du 8 mai prochain, une échéance dont nous devons à tout prix empêcher le report, car c’est là que réside le réel changement".
Mohammad Bzeih, activiste politique du 17-Octobre, membre du Parti communiste libanais (PCL), à L'OLJ : "Non seulement ce gouvernement n’apporte rien de nouveau, mais il fait partie intégrante, à notre sens, d’un plan qui visait, depuis la démission du précédent, à accélérer l’effondrement économique du pays, afin de faire assumer à la population et aux petits déposants le poids des pertes économiques et financières, et d’en dispenser les banques et les cartels. Preuve en est, les premières déclarations de Nagib Mikati sur la levée des subventions considérée comme inévitable. Nous pensons que les pressions de toutes sortes sur la population libanaise vont augmenter".
Lucien Bourjeily, réalisateur et activiste, sur Twitter : "Un nouveau gouvernement de quote-parts a été formé aujourd'hui. Présidé par Nagib Mikati, le grand corrompu, et dont les membres sont soit également corrompus, affiliés à des corrompus ou travaillant dans l'intérêt de corrompus. Tous sans exception sont impliqués (dans la corruption, ndlr)."
Le général Khalil Hélou (à la retraite), président du conseil de « Convention Lebanon » : "Je suis convaincu que ce gouvernement est une nécessité, malgré toutes les réticences que je pourrais avoir à l’encontre de toute équipe formée dans les circonstances actuelles. Seul un gouvernement peut freiner la dégringolade, car toute aide étrangère en est tributaire. On est certes loin du cabinet de mission que les Français exigeaient, eux-mêmes n’ayant plus d’autre exigence que la formation de n’importe quel gouvernement, ce qui prouve l’entente avec l’Iran. Pour ce qui est de la politique générale de cette formation, je crois qu’elle ne sera pas très différente du passé. Mais quelle autre perspective aurions-nous pu espérer alors que le Hezbollah contrôle les deux-tiers du Parlement avec ses alliés, un monde arabe qui n’exerce aucune pression pour créer un contrepoids, un monde occidental qui a d’autres priorités et des groupes de la contestation qui n’ont pas pu s’imposer ?"
Treize mois après la démission du cabinet de Hassane Diab, et près de sept semaines après la désignation de Nagib Mikati en tant que Premier ministre, ce dernier a enfin mis sur pied, vendredi, son équipe longuement attendue alors que le pays ploie sous le poids de la plus grave crise de son histoire moderne. Le cabinet est composé de 24 ministres, répartis à parts égales entre chrétiens et musulmans et au sein duquel aucune partie ne détient le tiers de blocage. La formation d'un nouveau gouvernement était la condition sine qua non imposée par la communauté internationale, et notamment l'Union européenne (UE), pour débloquer les aides internationales et relancer les négociations avec le Fonds monétaire international (FMI). Les législatives, les municipales et la présidentielle fixées en 2022 sont attendues et perçues par les Libanais comme un premier tremplin vers le changement auquel ils aspirent.
commentaires (9)
Je me demande si.... Après le mandat de ce nouveau gouvernement le patriarche sera d'accord de se référer quand il s'agit des affaires chrétienno-maronites, directement à khmaneii et d'outrepasser le pape tout simplement...mmmm I wonder...
Wlek Sanferlou
23 h 56, le 10 septembre 2021