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Monde - Témoignages

À la veille de l’achèvement du retrait US, les espoirs d’exil s’envolent pour les Afghans

Malgré la crainte d’une nouvelle attaque terroriste, des centaines d’habitants étaient toujours massés hier près de l’aéroport international de Kaboul à quelques heures de la fin des évacuations.

À la veille de l’achèvement du retrait US, les espoirs d’exil s’envolent pour les Afghans

Des passagers font la queue pour embarquer à bord d’un C-17 Globemaster III de l’US Air Force à l’aéroport international Hamid Karzai de Kaboul, en Afghanistan, le 24 août 2021. Photo AFP / US Air Force

À la veille de l’achèvement du retrait définitif des troupes américaines d’Afghanistan et quatre jours après l’attentat sanglant ayant frappé les abords de l’aéroport international de Kaboul, une ambiance anxiogène régnait hier dans certaines rues de la capitale. « Dans les taxis, dans les conversations entre amis, tout le monde se pose les mêmes questions : que se passera-t-il demain ? Le jour d’après ? Dans le futur ? » rapporte Abdul*, un Afghan d’une trentaine d’années employé d’une ONG venant en aide aux communautés marginalisées dans le pays. Malgré la peur, toujours autant d’Afghans semblent affluer dans les rues et les commerces de la ville. « Les gens sortent en masse pour acheter de la nourriture et trouver de l’argent », explique Amin*, un étudiant à l’Université de Kaboul âgé de 21 ans, alors que les habitants sont à court d’argent liquide depuis plusieurs jours en raison de la fermeture des banques.

Après deux semaines de chaos à l’aéroport Hamid Karzai, à Kaboul, le double attentat-suicide revendiqué jeudi par la branche afghane du groupe État islamique (EI) – ayant fait 170 morts, dont 13 soldats américains, et plus de 150 blessés selon des médias locaux – a fait monter d’un cran la tension et alimenté les craintes de la population, dont une partie n’ose plus tenter sa chance pour les dernières évacuations. « Je suis trop terrifié pour retourner à l’aéroport », confie Rachid*, un ingénieur de 26 ans ayant travaillé avec les Américains. Après s’y être rendu quotidiennement pendant dix jours, le jeune homme avait décidé, mardi dernier, que l’entreprise était vaine alors que les soldats américains lui refusaient à chaque fois l’entrée au site. « Ma vie est plus importante que les États-Unis. Si les forces américaines avaient vraiment voulu nous aider à partir, nous aurions reçu un e-mail avec des instructions pour entrer en toute sécurité dans le lieu au lieu de se retrouver contraint d’attendre dans une file interminable de candidats au départ », s’emporte-t-il.

Nulle part où aller

Samedi soir, Washington a annoncé avoir tué, par une frappe de drone, une cible de l’EI en Afghanistan, alors que le président américain Joe Biden avait promis jeudi des représailles suite à l’attaque de l’aéroport. « Cette frappe n’était pas la dernière. Nous continuerons à traquer tout individu impliqué dans cet attentat odieux et les feront payer », a-t-il prévenu. Le locataire de la Maison-Blanche a également indiqué que « la situation sur les lieux » restait « extrêmement dangereuse » et « la menace d’une attaque terroriste contre l’aéroport (...) élevée », avertissant « qu’une attaque était très probable dans les 24 à 36 heures ». Hier après midi, des responsables américains indiquaient à Reuters que l’armée américaine avait bombardé une cible qui pourrait avoir été une voiture piégée destinée à un attentat-suicide contre l’aéroport.

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Une fuite des cerveaux de mauvais augure pour le pays

En dépit de la peur qu’un nouvel attentat se produise, des centaines de personnes étaient toujours massées au cours du week-end écoulé près de l’aéroport, contre des milliers avant l’explosion de jeudi. « Ce sont surtout des familles qui ont fui il y a plusieurs jours leur province et qui, faute d’argent, ne peuvent pas retourner chez elles », assure Amin. Cela faisait plus d’une semaine que le jeune homme et sa famille se rendaient chaque jour à l’aéroport lorsque l’attaque est survenue. Quand la détonation a eu lieu, l’étudiant n’était qu’à une centaine de mètres des lieux du drame parmi des milliers d’autres candidats au départ. « Immédiatement après avoir entendu le fracas de l’explosion, nous avons vu une foule de personnes fuir l’aéroport. Ma mère est restée sous le choc », raconte Amin. Il lui a fallu une demi-heure pour parvenir à trouver un taxi qui puisse emmener sa mère à l’hôpital.

Ce jour-là, une centaine de mètres plus loin, Abdul en était à sa quinzième heure d’attente devant l’aéroport. « Tandis que je fuyais les lieux, notre minibus a failli être touché par une balle alors que les talibans, l’EI et les soldats américains se tiraient les uns sur les autres. Les talibans tiraient également pour disperser les gens et ouvrir un accès aux ambulances », se souvient-il.

La crainte de représailles

Malgré la peur, de nombreux Afghans sont encore prêts à tout risquer pour parvenir à embarquer à bord d’un avion de l’armée de l’air américaine avant demain. « C’est peut-être dangereux, mais je ne veux pas rater cette chance », dit Amin, qui craint tout de même, comme tous ses amis, une nouvelle catastrophe. Il y a vingt jours, l’étudiant s’est rendu sur le site internet de l’ambassade américaine pour obtenir une demande d’évacuation en tant que réfugié. Bien que sa requête ait été acceptée, il n’est jamais parvenu à pénétrer dans l’enceinte de l’aéroport, actuellement sécurisé par près de 4 000 soldats américains. « Avant d’accéder à l’aéroport, il faut traverser à pied quatre ou cinq avenues. Avec tout le monde qu’il y avait la semaine dernière, nous avons marché durant près de cinq heures », raconte-t-il. Il y a encore un mois, ce trajet ne lui prenait que dix minutes.

En dépit des promesses des forces américaines, de nombreux Afghans ayant coopéré avec les États-Unis et possédant un visa d’immigration spéciale (SIV) pour eux et leurs proches, ne parviennent pas non plus à embarquer à bord d’un avion. C’est le cas de Rachid, qui avait travaillé comme agent de sécurité au sein d’une base américaine ayant fermé ses portes en 2014. Selon la règle mise en place par les Américains, tous les Afghans ayant travaillé avec eux pendant plus de deux ans doivent être évacués. Mais le jeune homme s’est vu systématiquement refuser l’accès à l’aéroport au détriment de détenteurs de passeports américain et européen, ou d’une carte d’employé de l’ambassade américaine. « Un soldat américain a refusé de répondre à mes questions et m’a même ordonné de foutre le camp », raconte-t-il.

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Chute de Kaboul : le poids de la défaite

L’ingénieur, qui, la semaine dernière, a carrément dormi aux abords de l’aéroport, est encore choqué par les scènes de détresse dont il a été témoin. « J’ai vu un père qui, depuis quatre jours, cherchait sa fille. Elle a disparu dans la foule. Il ne savait pas si elle était morte ou si elle était parvenue à passer de l’autre côté du mur », raconte-t-il. Pour tenir pendant ces longues heures d’attente, Rachid ne s’est nourri que de gâteaux emballés, de biscuits et d’eau, alors qu’il avait amené avec lui six barres de céréales pour le tenir debout pendant plusieurs heures. N’ayant d’autre choix que de rester dans la file d’attente, il lui était également impossible de fermer l’œil la nuit. Mais le danger que représentent, pour lui, les talibans l’emporte sur tout. « Bien que les talibans disent qu’ils ne veulent pas tuer les alliés des Américains, ce n’est plus qu’une question de temps », estime Rachid.

De son côté, Amin craint également de faire l’objet de représailles de la part du groupe radical en raison de son appartenance à l’ethnie hazara, majoritairement chiite et historiquement marginalisée. L’étudiant a en tête la persécution des membres de cette minorité lorsque les talibans – sunnites et pachtouns pour la plupart – détenaient le pouvoir entre 1996 et 2001. Et le fait qu’un haut responsable des talibans ait déclaré, il y a dix jours, que le projet du mouvement était de monter un « gouvernement inclusif », laissant penser que différentes ethnies pourraient être incluses, ne le rassure pas pour autant. Dans un rapport publié le 20 août, Amnesty International indiquait que depuis la récente offensive des insurgés, neuf hazaras auraient été massacrés par les talibans dans la province de Ghazni entre les 4 et le 6 juillet. « J’aimerais aller aux États-Unis où mon oncle a une entreprise. Mais si je ne peux pas partir d’ici à demain, j’irai au Pakistan », lance Amin, résigné, alors qu’un point de passage tombé aux mains des talibans à la frontière pakistanaise a été laissé ouvert par ces derniers.

Rachid hésite aussi à fuir au Pakistan ou dans un autre pays voisin. « La route ne coûte pas si cher, mais entrer dans un pays sans visa est un énorme défi », raconte-t-il. Le jeune homme envisage surtout de se rendre en Iran pour ensuite gagner la Turquie puis l’Europe. Mais là encore, le défi est de taille. « Même si je vais illégalement en Europe, cela me coûtera environ cinq à dix mille dollars pour payer les passeurs », lâche-t-il, désespéré.

À la veille de l’achèvement du retrait définitif des troupes américaines d’Afghanistan et quatre jours après l’attentat sanglant ayant frappé les abords de l’aéroport international de Kaboul, une ambiance anxiogène régnait hier dans certaines rues de la capitale. « Dans les taxis, dans les conversations entre amis, tout le monde se pose les mêmes questions : que se...

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LE PLUS GRAND CRIME DES CLOWNS QUI SE SONT SUCCEDES AU POUVOIR DANS UNE AMERIQUE EN DECADENCE. BIDEN N,EST PAS SEUL RESPONSABLE.

LA LIBRE EXPRESSION

01 h 08, le 30 août 2021

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Commentaires (1)

  • LE PLUS GRAND CRIME DES CLOWNS QUI SE SONT SUCCEDES AU POUVOIR DANS UNE AMERIQUE EN DECADENCE. BIDEN N,EST PAS SEUL RESPONSABLE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    01 h 08, le 30 août 2021

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