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Politique - Explosions au port de Beyrouth

Suspension des immunités : Berry appuie les propositions du Futur, le CPL s'y oppose

Le barreau du Liban-nord lève l'immunité de l'ex-ministre Youssef Fenianos, qui est avocat.

Suspension des immunités : Berry appuie les propositions du Futur, le CPL s'y oppose

Le président du Parlement libanais, Nabih Berry. Photo d'archives Ali Fawaz

Le président du Parlement libanais, Nabih Berry, s'est prononcé jeudi en faveur d'une levée des immunités de tous les responsables politiques, notamment ceux inculpés par la justice dans le cadre de l'enquête sur la double explosion meurtrière au port de Beyrouth, le 4 août 2020. Le chef du Législatif a ainsi exprimé son soutien à une proposition d’amendement constitutionnel allant dans ce sens, prôné par le courant du Futur du leader sunnite Saad Hariri. A contrario, le groupe parlementaire du Liban fort, majoritairement composé de députés du Courant patriotique libre, s'est dit contre un amendement de la Constitution au sujet des immunités.

La délégation du Courant du Futur a entamé jeudi une tournée auprès des groupes parlementaires pour obtenir leur soutien. Elle s'est d'abord rendue à Aïn el-Tiné où elle a été reçue par Nabih Berry. L'occasion de présenter à ce dernier la proposition de loi en question. Le groupe haririen a aussi remis au président de la Chambre une proposition de loi prévoyant la suspension des privilèges de juridictions pour les juges, les fonctionnaires, les avocats, et les chefs des services de sécurité.

Devant les députés  du Futur, Nabih Berry a affirmé que le Parlement, et particulièrement son groupe parlementaire, étaient prêts à se prononcer pour la levée des immunités "sans exception, y compris celle de juges qui avaient mis la main sur le dossier du nitrate d’ammonium, jusqu'au moment de l'explosion". "Oui à la suspension de toutes les immunités conformément à la proposition du Futur", a affirmé M. Berry.

Trois instances

A l'issue de la réunion, Samir Jisr, député haririen de Tripoli, a expliqué que les propositions de loi rédigées par son parti visaient d'abord à mettre un terme à la polémique articulée autour du fait que la Constitution protégeait les députés et responsables", en les gardant à l'abri des poursuites judiciaires. "Si cette affaire suit son cours actuel, nous serons devant trois instances qui statueront dans l'affaire: la haute cour chargée de juger les présidents et les ministres, une instance spéciale pour juger les magistrats, et la Cour de justice", a souligné M. Jisr. "Nous estimons que les gens sont égaux, et que tous (les inculpés) devraient être jugés devant la Cour de Justice", a-t-il ajouté.

Le groupe parlementaire du Futur s'est ensuite entretenu avec les députés du Courant patriotique libre de Gebran Bassil. A l'issue de la rencontre, Ibrahim Kanaan, député aouniste du Metn, a affirmé que lors de la réunion, le groupe parlementaire du Liban fort (dont le CPL est la composante principale) a réitéré sa "position constante selon laquelle il faudrait aller rapidement et d'une manière directe, vers un vote de levée des immunités au Parlement". "Nous espérons qu'une séance parlementaire se tiendra et durant laquelle les immunités seront levées, afin que la justesse des demandes du juge Tarek Bitar soit confirmée", a-t-il dit. "Nous sommes contre la pétition (signée par plusieurs parlementaires pour que les responsables inculpés soient jugés devant la Haute cour chargée de juger les présidents et les ministres), parce que les immunités devraient être levées au moyen d'un vote au Parlement, sans amender la Constitution", a encore déclaré le député aouniste dans un entretien à la chaîne MTV, exprimant ainsi l'opposition du CPL aux propositions haririennes pour amender la Loi fondamentale.

Les députés du Futur ont également eu une réunion avec leurs collègues de la Rencontre démocratique, bloc principalement constitué de députés du Parti socialiste progressiste de Walid Joumblatt. Le secrétaire général du groupe, Hadi Aboulhosn, a rappelé après la réunion que les députés joumblattistes sont en faveur d'une commission d'enquête internationale et de la levée des immunités de tous les responsables concernés par cette affaire, "ce qui est en adéquation avec les propositions" du Futur. "Mais nous étudierons ce projet du point de vue légal et constitutionnel", a-t-il ajouté, disant craindre que des "obstacles liés aux conditions politiques et à la jurisprudence constitutionnelle" ne viennent entraver le suivi des propositions de Saad Hariri.

La démarche des députés du Futur intervient deux jours après une conférence de presse que M. Hariri avait tenue afin de présenter les grandes lignes de la proposition. Une éventuelle levée des immunités permettrait non seulement d’auditionner les responsables poursuivis par le juge Tarek Bitar, mais aussi d’étendre les interrogatoires pour atteindre éventuellement le président Michel Aoun, avec qui les rapports de Saad Hariri sont rompus, et qui avait reconnu quelques jours après l’explosion avoir été notifié du danger du nitrate d’ammonium à l’origine du cataclysme.

Le courant du Futur est accusé, aux côtés d'autres députés, de chercher à obstruer l’enquête menée par le juge Bitar, chargé de l'investigation sur le drame. Car plusieurs élus, notamment ceux du Futur, ont cosigné une pétition parlementaire pour que Ali Hassan Khalil, Ghazi Zeaïter et Nouhad Machnouk, trois anciens ministres et actuels députés inculpés dans le cadre de cette affaire, soient jugés devant la Haute Cour chargée de juger le président, les députés et les membres du gouvernement. Une manœuvre critiquée par la société civile qui met en doute l'impartialité de cette procédure. A l'issue d'une réunion conjointe du bureau de la Chambre et de la commission parlementaire de l'administration et de la Justice le 9 juillet, la Chambre avait réclamé davantage de détails sur l'enquête pour pouvoir statuer sur la levée d'immunité des députés, une demande refusée par le juge Bitar.

Le barreau du Nord lève l'immunité de Fenianos

Mercredi, le vice-président de la Chambre, Elie Ferzli, s'était lui aussi prononcé en faveur d'une levée de l'immunité de tous les responsables politiques, sécuritaires administratifs et des juges afin qu'ils puissent être jugés. Il avait  annoncé qu'il allait signer la proposition de loi du groupe du Futur.

De son côté, le Premier ministre sortant, Hassane Diab, a démenti jeudi les informations de presse selon lesquelles il aurait refusé de donner l'autorisation de poursuivre le directeur de la sécurité de l'Etat, le général de division Tony Saliba, dans l'affaire de l'explosion du port de Beyrouth. Il a affirmé qu'une telle autorisation n'était pas de son ressort mais relevait plutôt du Conseil supérieur de défense. Et au lendemain de la levée de l'immunité des avocats Ghazi Zeaïter et Ali Hassan Khalil par le barreau de Beyrouth, celui du Liban-nord a annonce jeudi la levée de l'immunité de l'ex-député Youssef Fenianos, lui aussi avocat.

Près d'un an après la double déflagration qui a fait plus de 200 morts, 6.500 blessés et ravagé la capitale, la population attend encore que justice soit faite. Mais l'enquête s'enlise, polluée par les interférences de la classe politique.

Le président du Parlement libanais, Nabih Berry, s'est prononcé jeudi en faveur d'une levée des immunités de tous les responsables politiques, notamment ceux inculpés par la justice dans le cadre de l'enquête sur la double explosion meurtrière au port de Beyrouth, le 4 août 2020. Le chef du Législatif a ainsi exprimé son soutien à une proposition d’amendement constitutionnel allant...

commentaires (2)

Honte à tous ceux qui méprisent le droit et qui lancent des jeux de poker menteur. Vous voulez aider l’enquête, alors d’abord levez l’immunité de ceux visés par le juge Bitar.

PPZZ58

21 h 19, le 29 juillet 2021

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Commentaires (2)

  • Honte à tous ceux qui méprisent le droit et qui lancent des jeux de poker menteur. Vous voulez aider l’enquête, alors d’abord levez l’immunité de ceux visés par le juge Bitar.

    PPZZ58

    21 h 19, le 29 juillet 2021

  • Heureusement qu’on n’a besoin de l’approbation ni de l’un ni de l’autre. Des lois existent pour traduire en justice n’importe quel politicien dans le cas d’un crime contre le peuple et ils ont plus d’un dans leurs dossiers et sur leur conscience. Il serait plus que temps aux magistrats et aux instituions concernées de se faire entendre pour faire taire tous ces parasites qui se sont accordés les violons pour nous la jouer, toi tu veux moi pas, alors qu’ils sont tous coupables, dans le but de noyer le poisson et d’empêcher l’application des lois déjà existantes. Le pays ne manque de justiciers courageux et qualifiés pour leur boucler le caquet en s’armant des lois et de la constitution du pay. Allez nous voulons les voir à l’œuvre.

    Sissi zayyat

    16 h 34, le 29 juillet 2021

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