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Nos Lecteurs ont la Parole

Fouad Chéhab, l’homme d’État au quotidien

Celui qui s’occupe de l’État, de la chose publique, de l’armée, de l’avenir de la nation doit être de la trempe des grands sages de l’Antiquité, des saints et des ascètes. Le témoignage que nous offre Michel Fadlou Nassif sur son expérience avec le président Fouad Chéhab, dans l’armée et avec nombre de hauts commis de l’État, est une leçon de moralité personnelle et publique à l’âge où le Liban vit la pire imposture satanique dans l’histoire du Liban et peut-être même de toute l’histoire.

(Michel Fadlou Nassif, Sirat hayat – Récit de vie), Beyrouth, 2020, 280 p.).

Plusieurs fois, j’avais sollicité du haut et modeste militaire à la retraite de rédiger ses Mémoires. Alors qu’on parle souvent (oui, on parle !) de transparence, de gouvernance et de l’État, Michel Nassif nous montre comment vivre ces principes au quotidien sans atermoiement ni équidistance, même dans les pires situations et conjonctures. Au cours d’une conférence arabe au sommet, Élias Sarkis fait la sourde oreille à l’appel de Hafez el-Assad qui va exiger encore et toujours plus (p. 96). J’avais autrefois enregistré et publié : « Cas pratiques et vivants de gestion de l’État au Liban » que m’avait rapportés Michel Nassif qualifié par Fouad Boutros « du plus fidèle des fidèles » (p. 92).

La distinction fort courante aujourd’hui en parlant des hommes politiques entre vie privée et vie politique ne m’a jamais convaincu. L’honnêteté n’a pas de frontières. C’est dans les Archives nationales de La Rochelle, au cours d’un séjour en France en 1960, que Michel Nassif relève l’observation suivante à propos de Fouad Chéhab quand il était en stage de formation en tant que jeune militaire : « Il n’a jamais été avenant » !

Avec les plus grands respect et dignité, Michel Nassif nous rapporte aujourd’hui, à l’âge de 90 ans, les malheurs et les joies de la vie familiale, ainsi que les grandeurs et bassesses d’agissements dans la vie publique libanaise. Il a connu de fort près, au cours de sa carrière militaire exemplaire puis dans l’action humanitaire, Fouad Chéhab et son épouse, Camille Chamoun, René Moawad, Élias Sarkis, Amine Gemayel, Salim Hoss, Rachid Karamé, Raymond Eddé, Jean Noujaim… et de grands acteurs religieux et sociaux, dont le patriarche Sfeir, Mgr Cortbaoui, sœur Louise-Marie Chidiac…

Michel Nassif nous choque pour éveiller des consciences comatiques, avec la relation de comportements de complaisance et de compromission, sans citer de noms, de la part de militaires, de politiciens et d’agents plus soucieux de leur intérêt privé que de la chose publique.

Chargé de préparer une rencontre entre le président nouvellement élu Élias Sarkis et Kamal Joumblatt, Michel Nassif entend dire par un haut dirigeant du Fateh : « Tu viens ici sans nous en informer ! » C’est alors que Kamal Joumblatt, dont « la quiétude (houdoû’) est bien connue », lui répond fermement : « C’est trop ! Nous sommes libanais, maîtres sur notre terre. Que chacun de nous connaisse ses limites. » Et Michel Nassif de souligner :

« Joumblatt n’a pas ajouté un seul mot et ne l’a pas convié à s’asseoir ! Le chef palestinien a quitté de mauvaise humeur. » (p. 85).

Le général Michel Nassif nous apprend surtout, à partir de l’expérience d’Élias Sarkis, chéhabiste authentique, qu’il est possible de « gérer la crise » (p. 87) sans subordination extérieure et « sans appauvrir la population » !

On apprécie fortement l’admiration du président martyr Rafic Hariri à l’égard du président Fouad Chéhab : « Surprenant et fort important, ce président, et à tous les niveaux, dit Rafic Hariri au cours d’une rencontre avec Mgr Youhanna Hajj et Michel Nassif. Nous n’abordons aucun problème de développement dans notre patrie sans que le président Chéhab ne l’ait abordé et essayé de le réaliser. » (p. 129).

On apprend surtout dans le témoignage de Michel Nassif que la gestion de l’État ne peut s’accommoder exclusivement de structures légalistes et de palabres constitutionnelles. Cette gestion puise sa source dans une spiritualité profonde, celle de Fouad Chéhab, que partage Michel Nassif dans toute sa vie autant familiale que publique.

Antoine MESSARRA

Chaire Unesco – USJ

Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « courrier » n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de L’Orient-Le Jour. Merci de limiter vos textes à un millier de mots ou environ 6 000 caractères, espace compris.

Celui qui s’occupe de l’État, de la chose publique, de l’armée, de l’avenir de la nation doit être de la trempe des grands sages de l’Antiquité, des saints et des ascètes. Le témoignage que nous offre Michel Fadlou Nassif sur son expérience avec le président Fouad Chéhab, dans l’armée et avec nombre de hauts commis de l’État, est une leçon de moralité personnelle et...

commentaires (1)

la question que je me pose lors de chaque crise : Comment se fait il que les politiques libanais soient ausssi stupides pour se laisser "guider" par l'etranger ? Comment ne realisent ils pas a l'origine que s'allier a l'etranger les trouveraient eux en 1er hypoteques,menes comme des esclaves par ce meme etranger? Comment acceptent ils cela contre qqs avantages politiques et/ou financiers?

Gaby SIOUFI

10 h 41, le 05 juillet 2021

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Commentaires (1)

  • la question que je me pose lors de chaque crise : Comment se fait il que les politiques libanais soient ausssi stupides pour se laisser "guider" par l'etranger ? Comment ne realisent ils pas a l'origine que s'allier a l'etranger les trouveraient eux en 1er hypoteques,menes comme des esclaves par ce meme etranger? Comment acceptent ils cela contre qqs avantages politiques et/ou financiers?

    Gaby SIOUFI

    10 h 41, le 05 juillet 2021

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