L'ultraconservateur Ebrahim Raïssi a été proclamé vainqueur samedi de la présidentielle iranienne ayant enregistré la plus faible participation depuis la proclamation de la République islamique en 1979.
M. Raïssi, chef de l'Autorité judiciaire âgé de 60 ans, s'est imposé largement au premier tour de vendredi face à trois candidats après une campagne électorale terne sur fond de mécontentement général face à la crise économique et sociale. Il a obtenu 61,95% des voix, selon les résultats officiels définitifs, qui donnent la participation à 48,8%.
Vers 20h00 (15h30 GMT), plusieurs milliers de personnes fêtaient sa victoire sur la place Imam-Hossein, dans le centre de Téhéran, au son d'un concert de pop religieuse, selon des correspondants de l'AFP sur place.
Hodjatoleslam (rang inférieur à ayatollah dans la hiérarchie du clergé chiite), M. Raïssi faisait figure d'archifavori, faute de concurrence réelle après la disqualification de ses principaux adversaires.
Le gagnant de la présidentielle, qui doit succéder au modéré Hassan Rohani en août, hérite d'un pays en proie à une grave crise économique, conséquence des sanctions imposées par Washington contre l'Iran après la décision de l'ancien président américain Donald Trump de dénoncer en 2018 l'accord international sur le nucléaire iranien conclu en 2015 à Vienne. Bien qu'issu d'un courant politique se caractérisant par l'antiaméricanisme et le rejet de l'Occident, M. Raïssi a rappelé pendant la campagne que la priorité - conformément à la ligne fixée par le guide suprême Ali Khamenei - était d'obtenir la levée de ces sanctions pour sortir le pays de l'ornière.
Son élection ne devrait donc pas avoir d'effet sur les négociations en cours pour sauver l'accord de Vienne en y réintégrant les Etats-Unis. La solution passe a priori par la levée des sanctions américaines demandées par l'Iran en échange du retour de Téhéran à l'application pleine et entière de l'accord, la République islamique ayant abandonné en riposte au blocus américain la plupart des garde-fous à ses activités nucléaires controversées qu'elle avait acceptés à Vienne. Pour le cabinet de conseil en risque politique américain Eurasia Group, l'élection de M. Raïssi devrait néanmoins "limiter les possibilités d'investissements importants en Iran [en cas de relance de l'accord de Vienne] et creuser encore davantage le fossé entre Téhéran et l'Occident".
Dans les urnes, M. Raïssi a devancé Mohsen Rezaï, ancien commandant en chef des Gardiens de la Révolution, l'armée idéologique iranienne, arrivé deuxième avec 11,79% des voix, devant l'ex-président de la Banque centrale Abdolnasser Hemmati (8,39%) et le député Amirhossein Ghazizadeh-Hachémi (3,45%).
Pour l'ayatollah Khamenei, le "grand vainqueur" des élections est "la nation iranienne [qui] s'est levée une fois de plus contre la propagande des médias mercenaires de l'ennemi".
Plusieurs responsables iraniens, dont M. Rohani, s'étaient inquiétés du risque qu'une faible participation ferait peser sur la "légitimité" de la République islamique. M. Khamenei lui-même avait multiplié les exhortations à faire échec à une campagne de mouvements d'opposition en exil appelant à boycotter le scrutin.
Dans un communiqué reproduit par les médias iraniens, M. Raïssi s'est présenté après sa victoire comme "le serviteur de toute la nation" et a promis de "créer un gouvernement appliqué, révolutionnaire et anticorruption", et d'"étendre la justice".
A l'étranger, le futur président a été félicité par le président russe Vladimir Poutine et son homologue syrien Bachar el-Assad, le président des Emirats arabes unis, cheikh Khalifa ben Zayed al-Nahyane, et par le mouvement islamiste palestinien Hamas, soutenu par Téhéran. Le président a des prérogatives limitées en Iran, où l'essentiel du pouvoir est aux mains du guide suprême.
Se présentant comme le champion de la lutte anticorruption et le défenseur des classes populaires au pouvoir d'achat miné par l'inflation, M. Raïssi est le seul des quatre candidats à avoir véritablement fait campagne.
M. Rohani, qui avait été réélu facilement face à M. Raïssi en 2017, finit son second mandat avec un niveau d'impopularité rarement atteint.
En décembre et janvier 2017-2018 et en novembre 2019, deux vagues de contestation ont été violemment réprimées. Pour l'opposition en exil et des défenseurs des droits humains, M. Raïssi est l'incarnation de la répression et son nom associé aux exécutions massives de détenus de gauche en 1988, à l'époque où il était procureur adjoint du tribunal révolutionnaire de Téhéran. Interrogé en 2018 et en 2020 sur cette page controversée de l'histoire récente, M. Raïssi a nié y avoir joué le moindre rôle, mais a rendu "hommage" à l'"ordre" donné selon lui par l'ayatollah Khomeiny, fondateur de la République islamique, de procéder à cette épuration.
Amnesty International a dénoncé son élection à la présidence, jugeant qu'il devrait faire l'objet d'une enquête pour "crimes contre l'humanité" et "répression brutale" des droits humains.
M. Raïssi figure sur la liste noire des responsables iraniens sanctionnés par Washington pour "complicité de graves violations des droits humains", accusations jugées nulles et non avenues par Téhéran.
Genial ! Ca va secouer , on l’espère un peu , le léthargique Biden !
15 h 22, le 19 juin 2021