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Nos Lecteurs ont la Parole

Les causes du cataclysme économique

Nous sommes à une jonction inédite de notre histoire. Tous les indicateurs économiques sont au rouge. Le pays ressemble à un navire qui se fissure d’un peu partout avant de couler irrévocablement vers les gouffres de l’abîme. Mais comment diable en sommes-nous arrivés à ce stade-là ? Remontons les pendules du temps pour comprendre les causes de ce cataclysme économique.

En décembre 1997, la Banque centrale décide d’indexer la monnaie nationale au dollar américain. La valeur de la monnaie locale est maintenue aux alentours de 1 500 livres libanaises pour un dollar. Cette politique de monnaie indexée persévère durant de nombreuses années grâce à des taux d’intérêt surélevés, auxquels s’ajoutent des aides et des prêts internationaux. De surcroît, la diaspora libanaise injecte annuellement aux alentours de 7 milliards de dollars dans le pays (à peu près 13 % du produit intérieur brut). L’économie est au beau fixe parce que la confiance est au rendez-vous.

Les choses commencent à basculer avec l’entrée tonitruante du Hezbollah par la grande porte de la scène politique libanaise. Adroitement, le parti pro-iranien établit une alliance avec Aoun pour s’assurer d’une couverture chrétienne précieuse dans ses projets hégémoniques. Les évènements prennent une tournure décisive en faveur du parti chiite pro-iranien lors de la dernière élection présidentielle. De mai 2014 à octobre 2016, les députés proches du 8 Mars (dont le Hezbollah est le fer de lance) refusent 45 fois de se rendre au Parlement pour élire un président. De par leurs agissements antidémocratiques, ils enfreignent à leur devoir constitutionnel. Pour la première fois de son histoire, le pays connaît un vide présidentiel de plus de deux ans. Naturellement, la confiance encaisse un sacré coup et, par conséquent, l’économie du pays en pâtit lourdement. Finalement, le Hezbollah triomphe et Aoun accède à la présidence suprême.

Avec une présidence sous l’ombrelle du Hezbollah, l’ambiance devient de plus en plus délétère au Liban. La corruption atteint son paroxysme. Les capitaux ainsi que les cerveaux prennent le chemin de l’exode. La population sombre dans la déprime. Il a suffi d’une petite étincelle (l’annonce d’une taxe sur le service WhatsApp en octobre 2019) pour que les choses s’enflamment comme une traînée de poudre. Une rage viscérale se dégage des entrailles de Beyrouth, de Tripoli, de Saïda et ailleurs. Elle symbolise une frustration longtemps réfrénée.

Anticipant une panique généralisée, les banques ferment hermétiquement leurs portes durant de nombreuses semaines. Lorsqu’elles se décident enfin à rouvrir timidement, les déposants se ruent éperdument vers les guichets pour récupérer leurs épargnes en espèces. Du jour au lendemain, les banques se retrouvent dans un état de faillite technique. Leur seul salut est d’imposer des restrictions draconiennes sur les retraits en dollars avec l’approbation tacite de la Banque centrale. Du jamais-vu au pays du Cèdre, jadis Suisse du Moyen-Orient.

Par un effet domino, une série d’évènements s’enchaînent en un court laps de temps : les réserves en dollars de la Banque centrale se réduisent comme peau de chagrin ; la monnaie nationale entame sa chute spectaculaire ; les épargnes des déposants s’évaporent comme de la fumée ; le pouvoir d’achat des gens dégringole à une vitesse vertigineuse et la pauvreté s’installe inopinément à la table du citoyen.

Et comme si le cataclysme économique ne suffisait pas, la double explosion apocalyptique au port de Beyrouth le 4 août 2020 anéantit tout ce qui se trouve sur son passage sans que l’on sache « le qui, le comment et le pourquoi » de cette tragédie. Cerise sur le gâteau, la pandémie de Covid-19 procure une protection aussi providentielle qu’inattendue à la classe politique. Au vu de cette débandade quasi généralisée, le citoyen est hagard, déboussolé. Il ressemble à un boxeur que l’on met K.-O. après un ultime combat.

Aujourd’hui, des imbroglios incompréhensifs et honteux entravent la formation d’un nouveau gouvernement. Les mêmes leitmotivs reviennent sur les lèvres : tiers de blocage, taille du gouvernement, processus de nomination des ministres, portefeuilles souverains, gouvernement pseudo indépendant, représentation communautaire et autres palabres aussi interminables qu’inextricables.

Face à cette impasse, le président et son frêle gendre encensé virevoltent et sautillent comme des pantins désarticulés. Ils se prennent pour des héros inébranlables. En réalité, ce sont des héros de pacotille : grotesques de par leurs comportements burlesques et comiques de par leurs résultats pathétiques. De quoi nous rappeler Don Quichotte et sa doublure Sancho à l’assaut des moulins à vent.


Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « courrier » n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de L’Orient-Le Jour. Merci de limiter vos textes à un millier de mots ou environ 6 000 caractères, espace compris.

Nous sommes à une jonction inédite de notre histoire. Tous les indicateurs économiques sont au rouge. Le pays ressemble à un navire qui se fissure d’un peu partout avant de couler irrévocablement vers les gouffres de l’abîme. Mais comment diable en sommes-nous arrivés à ce stade-là ? Remontons les pendules du temps pour comprendre les causes de ce cataclysme économique.En décembre...

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