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Nos Lecteurs ont la Parole

Il nous faut des maîtres d’école

Jouir et bien vivre, répétons-le, et ne rien croire, tout exploiter, compromettre à la fois deux choses saintes, l’indépendance et le vivre-ensemble, mêler à cette grande escroquerie politique qu’on appelle pouvoir les droits des communautés et les prérogatives des deux présidences.

Le point de départ de l’indépendance est l’éducation, c’est le ministère de l’Instruction publique. Il est en danger. On dirait qu’il n’existe pas, qu’il est supprimé. En fait, c’est un ministère par excellence, c’est la lumière. Prendre les enfants et en faire des citoyens, des citoyens intelligents, honnêtes, utiles, heureux. Le progrès intellectuel d’abord, le progrès moral, d’abord, le progrès matériel, ensuite. Les deux premiers progrès amènent d’eux-mêmes et irrésistiblement le dernier. En vérité, une politique de l’éducation n’a jamais existé, une réforme de l’enseignement, que ce soit l’enseignement public ou privé, n’a jamais existé, malgré les efforts de certains ministres qui ont jeté l’éponge après maintes reprises.

On étouffe partout l’enseignement. Même un livre de l’histoire du Liban n’a jamais paru. Il y a un paria dans notre Liban d’aujourd’hui, c’est le maître d’école.

Et pourtant, avez-vous jamais réfléchi à ce que c’est qu’un maître d’école, à cette magistrature où se réfugiaient les tyrans d’autrefois comme les criminels dans un temple, lieu d’exil ? Avez-vous jamais songé à ce que c’est que l’homme qui enseigne les enfants du monde ? Vous entrez chez un charron, il fabrique des roues, vous dites, c’est un homme utile. Vous entrez chez un tisserand, il fabrique de la toile, vous dites : c’est un homme précieux ; vous entrez chez un forgeron, il fabrique des pioches, des marteaux, vous dites : c’est un homme nécessaire ;

ces hommes, ces bons travailleurs, vous les saluez. Vous entrez chez un maître d’école, vous saluez plus bas ; savez-vous ce qu’il fait ? Il fabrique des esprits. Appelez-le comme vous voulez, professeur, enseignant, académicien, etc. On estimera qu’il nous faut des maîtres d’école pour gouverner notre pays.

Il y a toujours dans une population une classe qui ignore, qui souffre, qui convoite, qui lutte, placée entre l’instinct bestial qui pousse à prendre et la loi morale qui invite à travailler. Dans la condition douloureuse et accablée où elle est encore, cette classe, pour se maintenir dans la droiture et dans le bien, a besoin de toutes les pures et saintes clartés qui se dégagent de la Sainte Écriture qui montre sans cesse les hautes et mystérieuses lois de la destinée humaine, l’abnégation, le dévouement, le sacrifice, le travail qui mène au bien-être matériel, la probité qui mène au bien-être intérieur ; même avec ce perpétuel enseignement, à la fois divin et humain, cette classe si digne de sympathie et de fraternité succombe souvent. La souffrance et la tentation sont plus fortes que la vertu. Et pour ne pas arriver là, il devient de plus en plus urgent de mettre les maîtres d’école aux commandes.

Entravez un fleuve, vous avez l’inondation ; barrez l’avenir, vous avez les révolutions. Obstinez-vous à conserver au milieu de vous, comme s’il était vivant, le passé qui est mort, vous produisez je ne sais quel choléra moral ; la corruption s’est répandue, se répand et continuera à se répandre, elle est dans l’air, on la respire ; des classes entières de la société, les fonctionnaires, par exemple, tombent en pourriture. Fatalement, cette politique aveugle ceux qui la pratiquent. Ces hommes qui se qualifient hommes d’état en sont à ne pas comprendre qu’ils ont fait eux-mêmes, de leurs mains et à grand peine et à la sueur de leur front, ces événements terribles dont ils se lamentent et que ces catastrophes qui croulent sur eux ont été construites par eux. De quoi le régime se félicite-t-il ? De ce que l’indépendance du Liban ait été définitivement aliénée à tel point que nous devrions subordonner notre politique étrangère à la décision des mollahs de Téhéran ? Et pendant qu’il est temps de limiter les dégâts, tout le monde a intérêt à choisir des maîtres d’école pour mettre le Liban sur les rails. Et voilà ce régime malfaiteur. Et l’on ne t’applaudirait pas, ô vérité, quand, aux yeux du monde, en présence du peuple, à la face de Dieu, en attendant l’honneur, le serment, la foi, la religion, la sainteté de la vie humaine, le droit, la générosité de toutes les âmes, les mères, les femmes, les sœurs, la civilisation, la liberté, la république, le Liban, l’avenir, devant son Parlement, son Conseil d’État, toi qui représentes le peuple, car le peuple, c’est la réalité, toi qui représentes l’intelligence, car l’intelligence, c’est la lumière, toi qui représentes l’humanité, car l’humanité, c’est la raison ; au nom du peuple enchaîné, au nom de l’intelligence proscrite, au nom de l’humanité violée, devant ce tas d’esclavages qui ne peut ou qui n’ose dire un mot, toi vérité, mets de l’ordre dans l’ordre avec l’aide des maîtres d’école.

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Jouir et bien vivre, répétons-le, et ne rien croire, tout exploiter, compromettre à la fois deux choses saintes, l’indépendance et le vivre-ensemble, mêler à cette grande escroquerie politique qu’on appelle pouvoir les droits des communautés et les prérogatives des deux présidences.
Le point de départ de l’indépendance est l’éducation, c’est le ministère de l’Instruction...

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