Une délégation du bloc du Liban fort (dont le Courant patriotique libre est la principale composante) s’est rendue mardi à Harissa pour une rencontre avec le nonce apostolique, Mgr Joseph Spiteri. En principe, elle devait regrouper quatre personnes, mais à la demande de la nonciature, par respect des mesures de distanciation, elle n’était formée que de deux membres, le député César Abi Khalil et l’ancien ministre Mansour Bteiche. Les deux hommes ont remis au nonce apostolique un message de remerciements au pape François qui, dans son discours du 8 février face aux ambassadeurs accrédités au Vatican, avait insisté sur la nécessité d’aider le Liban et d’y préserver le rôle des chrétiens, cette communauté y jouant un rôle prépondérant.
La démarche du bloc du Liban fort s’inscrit dans la ligne des propos de l’ancien ministre Gebran Bassil, président du CPL, qui avait laissé entendre dans son discours de dimanche qu’il y aurait une volonté de marginaliser les chrétiens, comme c’était le cas de 1990 à 2005, pour changer en quelque sorte la nature et le rôle du pays.
Selon le député César Abi Khalil, le bloc a vu dans le discours du pape François un écho à ses propres inquiétudes et un appel à une prise de conscience internationale du rôle prépondérant des chrétiens et du modèle de vivre-ensemble que représente le Liban, dans un monde de plus en plus divisé. Le bloc a donc estimé de son devoir de remercier le pape pour son souci permanent du Liban et en particulier pour ce message clair en faveur du modèle libanais. Ainsi, la délégation a remis un message en ce sens au nonce et elle a proposé d’intensifier les contacts et la coordination avec le Vatican dans le but d’aider le Liban dans cette période difficile et d’y préserver la présence des chrétiens, ceux-ci restant le ciment de l’unité nationale, selon ses membres. Dans ce contexte, le bloc du Liban fort, et à plus forte raison le CPL, estiment de leur devoir de répondre positivement à l’appel lancé par le pape. D’ailleurs, la délégation a expliqué au nonce apostolique la détermination du bloc et du CPL à tendre la main à toutes les parties internes pour mener une action concrète dans le but de préserver le Liban pluriel.
Bien entendu, les questions financières et économiques ont été évoquées ainsi que ce que le CPL appelle « l’absence de bonne gouvernance » depuis près de 30 ans. Les possibilités de solution ont aussi été abordées.
Mais, plus important encore, la délégation a évoqué avec le nonce, selon César Abi Khalil, les menaces qui pèsent actuellement sur le Liban et sur son tissu populaire et social. Gebran Bassil avait aussi abordé ce thème dans son discours, sans être toutefois très explicite sur le sujet. Mais selon les milieux proches du CPL, il y aurait actuellement des menaces sérieuses de changements politiques et démographiques dans l’ensemble de la région. Plusieurs dossiers bougent en même temps et beaucoup d’inconnues existent, font-ils remarquer. Ainsi, les élections en Israël, en Syrie et en Iran pourraient être déterminantes pour les développements dans la région. Si la nouvelle administration américaine, comme elle le dit elle-même, souhaite mettre de l’ordre dans le lourd héritage que lui a laissé l’administration de Donald Trump, notamment au Moyen-Orient, cela signifie que celle-ci pourrait être à la veille d’accords ou d’ententes déterminants pour la suite des événements. Toutefois, si le Liban n’est pas prêt, il ne pourra avoir aucune prise sur les nouvelles perspectives de règlements et il devra se contenter d’en subir les conséquences, redoutent ces sources.Sans vouloir minimiser la dimension purement interne des problèmes actuels du Liban, la simultanéité des crises pourrait être le signe d’une volonté internationale de laisser ce pays en suspens, suffisamment affaibli et déchiré pour accepter tous les règlements qui lui seront proposés et, en tout cas, pour ne pas pouvoir s’y opposer, faute d’unité interne et d’État central cohérent. Dans ce contexte, la volonté déclarée du président américain Joe Biden de reprendre le processus de négociations israélo-palestiniennes est évoquée. Elle devrait poser le problème de la présence des réfugiés palestiniens au Liban. Celui-ci a d’ailleurs été toujours présent en filigrane, depuis les années 70. Chaque fois que le pays traverse une crise grave, il revient sur le tapis comme une possibilité de solution, au moins au volet économique. Depuis 2011, avec le déclenchement de la guerre en Syrie, il faut ajouter au dossier des réfugiés palestiniens celui des déplacés syriens, présents en grand nombre dans le pays. En dépit des tentatives successives du Liban, ces déplacés n’ont toujours pas obtenu l’autorisation internationale de rentrer chez eux faute de règlement politique en Syrie. En dix ans de présence au Liban, certains de ces déplacés se sont plus ou moins adaptés à la vie sur place et pourraient donc y rester, avec l’encouragement de certaines parties internationales ou régionales, soucieuses de créer un équilibre confessionnel, face au poids grandissant de la communauté chiite à l’intérieur du Liban. Ces parties pourraient donc n’avoir aucun inconvénient à ce que les chrétiens quittent le Liban, que leur départ soit dû à la crise économique, au sentiment qu’il n’y a pas d’avenir ou au fait de sentir que leur rôle n’est plus indispensable...
Dans son discours de dimanche, Bassil a parlé d’une crise existentielle pour les chrétiens. Ceux-ci n’ont pas réagi et beaucoup n’ont pas été convaincus. Pour eux, il a amplifié le problème pour justifier sa position et resserrer les rangs chrétiens autour de lui, alors que ces thèmes leur paraissent dépassés. Simple manœuvre politique donc ou menace réelle ? Le débat mérite d’être ouvert.
Une délégation du bloc du Liban fort (dont le Courant patriotique libre est la principale composante) s’est rendue mardi à Harissa pour une rencontre avec le nonce apostolique, Mgr Joseph Spiteri. En principe, elle devait regrouper quatre personnes, mais à la demande de la nonciature, par respect des mesures de distanciation, elle n’était formée que de deux membres, le député César...
commentaires (8)
La crise existentielle est pour les Chré…tins et ceux qui ont vendu leur idéal (si jamais ils en avaient un) pour être des sous fifres de l’axe du mal.
Liban Libre
18 h 49, le 25 février 2021