Deux chimpanzés
Tout excités
De se faire remarquer
Décidèrent de plein gré
De s’afficher
Pour clabauder
Des débilités,
Omnibulés qu’ils étaient
Par leur mouffette adulée.
Le zèbre qui les regardait
Se dandiner
Sur le cocotier,
D’impatience trépignait,
Pressé de leur flanquer
Une raclée carabinée
Qu’ils ne seraient pas prêts
D’oublier.
La vipère qui le guettait,
Glissa sur le sagoutier
Pour les alerter
De ce qui les attendait.
Le premier ricana
Et l’autre piailla,
Indifférents
À ce que le zèbre pensait
Et protégés qu’ils étaient
Par leur putois préféré
Qui leur avait promis
Monts et vallées
S’ils pouvaient persuader
La piétaille diminuée
Que la jungle se portait très bien,
Même si coupée du monde entier
Et sans électricité.
« Les lanternes sont là pour vous éclairer »,
Assura le premier,
« Et les brioches pour vous gaver »,
Renchérit son associé.
N’en pouvant plus de les écouter,
Le zèbre dont les rayures augmentaient
Au fur et à mesure de ces absurdités,
Fonça droit sur le cocotier,
Ce qui amusa les chimpanzés
Nullement impressionnés.
Complètement sonné
Par son coup raté,
Il s’en alla pleuroter
Auprès du corbeau perché
Sur un châtaignier.
Ce dernier,
Y voyant une opportunité
De le sermonner,
Lui demanda de se calmer.
« Apprends donc à morfler !
Au lieu de t’agiter,
Et le monde vouloir changer.
Sache t’adapter,
Pour le meilleur en tirer.
Tu n’en seras que plus satisfait. »
Le crapaud, qui errait
À proximité,
S’engagea
Dans la conversation
Sans y être invité.
« Le corbeau a raison.
Si je devais coasser
À chaque coup bas
Par l’hyène asséné,
Je finirais par me noyer
Dans cet étang pollué.
Je dois encore tempérer,
Car pour aspirer
Aux plus hautes responsabilités,
Plier l’échine est le prix à payer,
Quitte à y laisser ma virginité. »
« Je dirais même plus
Intervint le renard rusé,
Sorti de sa trouée.
Je suis bien placé
Pour l’affirmer.
Seuls mes désirs sont
Exaucés.
Personne n’ose broncher
Sans la permission me demander.
Sache, ô crapaud,
Que ta valse effrénée
Est vouée
À se prolonger
En attendant… »
« Godot ! »
L’interrompit le rat,
Hilare de son jeu de mots
Et toujours empressé
De monter au créneau.
L’indécrottable rongeur,
Qui de concurrent ne pouvait tolérer,
Ajouta avec son habituel toupet :
« Pour rendre la justice,
Je suis le mieux placé,
Comme maintes fois prouvé
De par le passé. »
Totalement sidéré
Par toutes ces simagrées,
Le zèbre jugea plus sensé
D’aller paître dans le pré.
« De vauriens je suis entouré.
Je comprends à présent
La réserve du coq français,
Qui, ne sachant plus
À quel saint se vouer,
A jugé plus prudent,
De nous laisser tomber. »
À nous tous qui en avons bavé,
Faisons table rase du passé,
Car penser encore édifier,
Avec tous ces morpions,
Une nouvelle nation
N’est que fausse illusion.
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commentaires (1)
WOW ! SUPERBE NARRATION POETIQUE. SYNTHESE UNIQUE ENONCEE : IMPOSSIBLE DE BIEN FAIRE TANT QUE CETTE RACAILLE-KELLON-RESTENT PLANTES MALGRE NOUS-ET MALGRE TOUT.
Gaby SIOUFI
10 h 27, le 06 janvier 2021