Rechercher
Rechercher

Moyen-Orient - ÉCLAIRAGE

Haut-Karabakh : Erdogan pourrait encore trouver Poutine sur sa route

Alors qu’Ankara adopte un ton va-t-en-guerre, Moscou cherche à se positionner comme arbitre entre Erevan et Bakou.

Haut-Karabakh : Erdogan pourrait encore trouver Poutine sur sa route

Un soldat arménien, hier, lors des affrontements dans le Haut-Karabakh. Ministère arménien de la Défense/Handout via Reuters

La Turquie semble être actuellement gagnée par un interventionnisme frénétique dans son environnement régional. Après la Syrie, la Libye, les tensions avec la Grèce et la France en Méditerranée orientale, Ankara s’investit pleinement dans le conflit au Haut-Karabakh. Et à l’instar de ce qui se passe déjà en Syrie ou en Libye, il retrouve Moscou sur sa route, dans le camp opposé, laissant craindre une nouvelle fois une crise entre ces deux acteurs aux intérêts très divergents mais qui persistent à vouloir se présenter comme des partenaires, voir des alliés.

Alors que les combats font rage depuis dimanche dernier entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, la Turquie adopte un ton va-t-en-guerre en soutien à son allié azéri et avance ses pions dans cette enclave au cœur du Caucase.

« Le temps est venu pour que cette crise qui a commencé avec l’occupation du Haut-Karabakh prenne fin », a déclaré lundi le président turc Recep Tayyip Erdogan dans un discours.

Ankara semble en faire un enjeu d’ordre national, alors que le slogan « une nation deux pays » est constamment mis en avant pour qualifier les liens entre la Turquie et l’Azerbaïdjan. Pis, déjà très occupée sur les autres théâtres régionaux, la Turquie donne le sentiment de vouloir faire bouger toutes les cartes en même temps.

Dès lundi, des officiels arméniens ont affirmé dans un communiqué que des experts militaires turcs combattent aux côtés des forces azéries et utilisent des armes turques, dont des drones et des avions de combat. Selon un article publié mardi sur le site du magazine américain Forbes, les images relayées par le ministère arménien de la Défense montreraient la présence de drones turcs Bayraktar TB2, qui ont été utilisés cette année par la Turquie en Libye et en Syrie. Il n’est toutefois pas clair si ces drones sont opérés par les forces azéries – soit grâce à une acquisition discrète réalisée pendant l’été, soit suite à un transfert effectué ce mois-ci – ou par l’armée turque directement, souligne l’article.

Lire aussi

Des mercenaires syriens seraient enrôlés par Ankara pour combattre l’Arménie

Le porte-parole du ministère arménien de la Défense a rapporté hier qu’un de leurs avions SU-25 avait été abattu par un F-16 turc en provenance du territoire azerbaïdjanais. L’information a été démentie par Ankara.

Des mercenaires syriens auraient également déjà été envoyés par la Turquie pour prêter main-forte à l’armée azérie – une méthode fortement similaire à la stratégie employée en Libye où Ankara soutient le camp du Premier ministre libyen Fayez el-Sarraj face à celui du maréchal Khalifa Haftar, appuyé par la Russie. Bakou a également nié en bloc ces accusations.

Lignes rouges

Ankara et Bakou entretiennent des relations diplomatiques étroites depuis l’indépendance de l’Azerbaïdjan en 1991. Leurs liens revêtent différents aspects – linguistique, culturel, militaire ou encore économique – et dans lesquels s’inscrit la sensible question du Haut-Karabakh. Zone tampon stratégique située au cœur du Caucase, cette région autonome a été rattachée à l’Azerbaïdjan en 1921 sous l’ère soviétique mais est composée d’une population à majorité arménienne. Revendiquée par l’Arménie, l’enclave est prise entre deux feux et fait l’objet de conflits ethniques explosifs depuis la fin des années 1980. « Il y a un sentiment selon lequel le statu quo qui dure depuis 30 ans est favorable à l’Arménie. De ce fait, Ankara et Bakou veulent pousser Erevan à négocier et faire des concessions sur le terrain en mettant suffisamment de pression », souligne Bayram Balci, directeur de l’Institut français d’études anatoliennes à Istanbul.

La présence russe dans l’équation pourrait toutefois contrarier les plans de la Turquie.

Erevan est le principal allié de Moscou dans le Caucase, où il dispose d’une base militaire à Guioumri. Les deux pays peuvent tabler en outre sur des liens profonds qui prennent racine dès le XIXe siècle, et qui s’articulent aujourd’hui autour d’intérêts économiques, militaires et religieux alors que les Églises orthodoxes russe et arménienne sont très proches.

Mais si l’ours russe a réaffirmé son soutien à l’Arménie, sa rhétorique est encore en retenue, Moscou appelant notamment la Turquie à ne pas intervenir et à un cessez-le-feu. « Toute sorte de déclarations sur un soutien ou une activité militaire quelconques ne font sans doute que mettre de l’huile sur le feu », a averti hier le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.

La Russie souhaite endosser le rôle d’arbitre alors qu’elle livre des armes tant à Erevan qu’à Bakou et reste un acteur incontournable dans la région.

Lire aussi

Les combats s’intensifient dans le Haut-Karabakh entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan

« Il y a beaucoup de choses qui se passent en coulisses, notamment une rencontre à Moscou avec les ambassadeurs d’Arménie et de Russie et le Conseil de sécurité à l’ONU (hier soir à huis clos) », remarque une source diplomatique proche du dossier.

Si les lignes rouges de Moscou à l’égard de la politique offensive d’Ankara restent encore floues, l’embrasement fulgurant de la région pourrait accélérer sa prise de position sur la question. En trois jours d’affrontements, le bilan s’élève déjà à 99 morts, dont quinze civils : dix en Azerbaïdjan et cinq côté arménien. Ce bilan devrait continuer de monter alors que les tensions ne cessent de s’intensifier des deux côtés et que les deux parties ont exclu hier toute négociation. Une crise qui pourrait donc s’écrire sur la durée, poussant la Russie à s’impliquer davantage et divisant la région entre les deux grands rivaux turc et russe.

« Il est possible que les Turcs et les Russes mettent tous les dossiers sur lesquels ils sont en bisbille sur la table au moment des tractations », explique Bayram Balci. « Il est probable que les Turcs exigent alors des concessions de la part des Russes en Syrie et Libye en échange de l’assouplissement de leurs positions dans le Haut-Karabakh », estime-t-il.

La Turquie semble être actuellement gagnée par un interventionnisme frénétique dans son environnement régional. Après la Syrie, la Libye, les tensions avec la Grèce et la France en Méditerranée orientale, Ankara s’investit pleinement dans le conflit au Haut-Karabakh. Et à l’instar de ce qui se passe déjà en Syrie ou en Libye, il retrouve Moscou sur sa route, dans le camp opposé,...

commentaires (2)

Il ny a plus de "grandes" nations, il ny a que de "petites" nations calculatrices et rapaces.

Christine KHALIL

09 h 39, le 30 septembre 2020

Tous les commentaires

Commentaires (2)

  • Il ny a plus de "grandes" nations, il ny a que de "petites" nations calculatrices et rapaces.

    Christine KHALIL

    09 h 39, le 30 septembre 2020

  • LES GENOCIDAIRES TURCS VEULENT ACHEVER LEURS CRIMES CONTRE LE PEUPLE ARMENIEN VICTIME DE LEURS GENOCIDES REPETES. OU SONT LES NATIONS UNIES ET LES GRANDES PUISSANCES ?

    JE SUIS PARTOUT CENSURE POUR AVOIR BLAMER GEAGEA

    09 h 00, le 30 septembre 2020

Retour en haut