Plusieurs sit-in de proches de détenus ont été organisés vendredi dans plusieurs régions du Liban, notamment dans le Sud, afin de réclamer une loi d'amnistie générale et la libération de prisonniers, alors que le coronavirus continue de se propager dans la prison de Roumieh. Cette mobilisation intervient alors qu'un texte d'amnistie générale doit être à nouveau discuté par les députés lors d'une séance plénière prévue mercredi et jeudi prochains.
Les proches de détenus réclament avec force une amnistie depuis l'annonce, il y a deux semaines, de premiers cas de Covid-19 à Roumieh, la plus grande prison du pays. Cet établissement pénitentiaire souffre de surpopulation carcérale et accueille trois fois plus de détenus que sa capacité normale. Mercredi, les Forces de sécurité intérieure avaient indiqué que 352 personnes ont été à ce jour testées positives au virus au sein de ce centre de détention.
A Beyrouth, les proches de détenus ont ainsi bloqué plusieurs routes, notamment la route de Rahhab à Bir Hassan et l'ancienne route de l'aéroport, au niveau du siège du Conseil supérieur chiite, dans la banlieue sud. "La vie et la santé de nos proches emprisonnés ne doivent pas être un jeu entre les mains des responsables", ont-ils scandé.
Sur la route reliant la Békaa à Beyrouth, des contestataires ont brièvement bloqué les voies, dans les deux sens de la circulation. Ils ont réclamé, en plus d'une loi d'amnistie générale, "une amélioration" des conditions de détention de leurs proches face à la propagation du Covid-19, selon des informations de l'Agence nationale d'Information (Ani, officielle). Après la réouverture de l'axe routier, les manifestants ont poursuivi leur sit-in devant l'entrée de la prison pour hommes de Zahlé.
Dans cette prison, les détenus ont tenu un sit-in pacifique, selon l'ANI, afin de réclamer la "clémence" des responsables face à la situation "désastreuse" des prisons et la "menace" du coronavirus. "Nous sommes abandonnés sans médicament, sans capacité de soins, sans jugements", ont-ils déploré. "Nos familles ne resteront pas silencieuses face à l'injustice, a lancé un porte-parole des prisonniers. Nous avons commis des fautes et des crimes, mais les fautes des responsables sont encore plus graves parce qu'ils nous tuent froidement". En soirée, ils ont refusé de regagner leurs cellules "tant que leurs revendications ne sont pas entendues", à savoir une loi d'amnistie et de meilleures mesures de prévention contre le Covid-19.
"Sans exception"
Dans le quartier de Abra, à Saïda, des proches de détenus islamistes, incarcérés pour leur implication dans les affrontements de 2013 avec l'armée, ont organisé un sit-in sous le titre de "l'escalade continue" de leur mouvement. Ils se sont réunis après la prière devant la mosquée de Aïcha mère des croyants avant de se rendre vers le rond-point Elia, où ils ont brièvement bloqué la route.
Un porte-parole des manifestants a réclamé une amnistie générale "sans exception", surtout en ce qui concerne les détenus islamistes, mettant en garde contre une escalade de la contestation si cette loi n'est pas adoptée. "Nous rejetterons toute réduction de peine et toute amnistie qui exclut les islamistes, les condamnés à perpétuité et à la peine de mort", a-t-il déclaré, exhortant également à inclure des détenus "de toutes les nationalités" dans la loi.
Dirigés par le cheikh salafiste Ahmad el-Assir, des islamistes avaient mené en 2013 une insurrection à Abra, au cours de laquelle 18 soldats et 11 miliciens avaient été tués. Le cheikh avait été condamné à mort en 2017.
Dans le camp de réfugiés palestiniens de Aïn el-Heloué, à Saïda également, des protestataires ont tenu un sit-in devant la mosquée al-Nour afin d'appeler à la libération et à des jugements accélérés de leurs proches en raison de "l'urgence des conditions sanitaires" dans les établissements carcéraux. Un manifestant a appelé l'ambassadeur palestinien au Liban, Achraf Dabbour, à intervenir dans ce dossier.
Routes coupées dans la banlieue sud
Une manifestation a également été organisée devant le Sérail de Tripoli, au Liban-Nord, afin de réclamer la libération des prisonniers et l'amnistie générale, selon l'ANI.
Parallèlement à ces sit-in, le route de la Cité sportive a été fermée par des manifestants, dans le sud de Beyrouth, a rapporté le Centre de contrôle du trafic (TMC), sans toutefois préciser si leur mobilisation était liée à l'amnistie générale.
La loi d’amnistie a fait ces derniers mois l’objet de nombreuses propositions des différents blocs, qui ont été amendées à plusieurs reprises, avant d’être chaque fois rejetées par l’Assemblée ou renvoyées en commission ou en sous-commission. Fin mai, le Parlement n’était pas parvenu à adopter ce texte qui déchire les différentes formations politiques au sujet des différents crimes qui peuvent bénéficier de cette amnistie, laquelle est réclamée depuis des années par les proches de détenus islamistes.
commentaires (4)
A general pardon should not include murderers and criminals. They’re a danger to public safety.
Mireille Kang
17 h 15, le 25 septembre 2020