Le président libanais, Michel Aoun, a affirmé samedi que des compensations seraient versées rapidement et équitablement aux sinistrés dans les différents quartiers de Beyrouth soufflés par la double explosion du 4 août, appelant les habitants de ces quartiers à "défendre leurs terrains et leurs maisons afin de protéger l'identité" de la capitale.
Lors d'une réunion avec des députés du bloc du Liban fort (majoritairement composé de membres du Courant patriotique libre, que le président Aoun a fondé), le chef de l'Etat a affirmé suivre "sans relâche" les opérations de déblaiement suite aux explosions dans le port, "afin de garantir qu'elles se déroulent en toute transparence et incluent toutes les régions sinistrées". Selon des propos rapportés par la présidence, il a souligné que cela permettra "de définir précisément l'étendue des dégâts afin de compenser les sinistrés et de lancer le chantier de restauration". Le chef de l'Etat a dans ce cadre appelé les personnes dont les habitations ont été touchées par la déflagration à "défendre leurs terrains et leurs maisons afin de conserver l'identité de la ville de Beyrouth". "Les compensations seront versées de manière rapide, efficaces et équitables", a-t-il ajouté.
De son côté, le député Nicolas Sehnoui a réclamé, à l'issue de la réunion à Baabda, "une enquête transparente et courageuse". "Nous demandons les sanctions les plus sévères contre les coupables, qui qu'ils soient, la reconstruction rapide de Beyrouth et des compensations pour les sinistrés", a-t-il ajouté.
Risques d'effondrement
Plus tôt dans la journée, le mohafez de Beyrouth, Marwan Abboud, avait établi une liste de cinq bâtiments, un dans le quartier de Medawar, quatre dans celui de Saïfi, qui posaient des risques d'effondrement, notamment au niveau de la toiture, appelant la police municipale de Beyrouth à les faire évacuer temporairement.
Des campagnes avaient été lancées après les explosions pour appeler les Beyrouthins à ne pas vendre leurs habitations dans les quartiers dévastés à des promoteurs immobiliers et investisseurs. Dans ce contexte, le coordinateur spécial de l'ONU au Liban, Jan Kubis, avait vendredi exhorté la communauté internationale à fournir rapidement des aides pour la réhabilitation des quartiers endommagés par les explosions et des infrastructures électriques afin que "l'histoire, le patrimoine et le caractère du vieux Beyrouth ne soient pas perdus pour toujours". "Le choix est simple. Soit une telle aide internationale immédiate arrive, soit les vautours de l'immobilier tueront une portion majeure du cœur de Beyrouth et du Liban", a-t-il twitté.
"Nuit et jour"
Des centaines de bâtiments, dont certains remarquables pour le patrimoine architectural beyrouthin, ont été détruits lors de la déflagration, qui a également fait plus de 180 victimes et des milliers de blessés. La double explosion a été causée, selon les explications des autorités libanaises, suite à un incendie qui s'est déclaré dans un hangar du port où étaient stockées, sans précaution et depuis 2014, 2.750 tonnes de nitrate d'ammonium. De nombreux responsables ont reconnu avoir été au courant de la présence de ces produits chimiques, et de ce fait la rue demande la démission de toute la classe politique, Parlement et président de la République inclus.
Par ailleurs, la Défense civile a affirmé dans la matinée que ses secouristes poursuivront leurs opérations de recherche sur le site des explosions "jusqu'à ce que tous les disparus aient été retrouvés". Plus de deux semaines après la catastrophe, une vingtaine de personnes sont toujours portées disparues, selon les autorités libanaises. "Au dix-neuvième jour après l'explosion, les secouristes de la Défense civile poursuivent leurs opération de recherche, de sauvetage et de déblaiement sur le terrain, nuit et jour", a écrit ce service public sur sa page Facebook. La défense civile a précisé que sa mission se poursuivra "jusqu'à ce que l'on puisse retrouver tous les disparus". La veille, c'est l'armée libanaise qui avait annoncé que les recherches se poursuivaient dans la zone portuaire.
Sur le plan diplomatique, l'ambassadeur du Koweït à Beyrouth, Abdel Aal Kinaï, a affirmé que son pays allait "reconstruire les silos de blés au port", détruits par les déflagrations.
"Ogre de la mort"
Sur le plan politique, Le député de Baabda et ancien ministre Pierre Bou Assi, membre des Forces libanaises de Samir Geagea, a mené une virulente charge contre le président de la République, Michel Aoun, le traitant d'"ogre de la mort" et l'appelant à démissionner après la double explosion.
"Lorsque j'ai parlé d'un ogre de la mort, je me référai au président de la République, Michel Aoun", a affirmé sans ambages M. Bou Assi, lors d'une émission politique sur la chaîne MTV. "Depuis son entrée dans l'arène politique, nous n'avons vu que la mort, même si, de sa part, nous avons entendu les plus beaux slogans", a affirmé Pierre Bou Assi.
"Tu veux la stabilité ? Il n'y a jamais eu autant de tensions. Tu veux l'ouverture (vers les puissances étrangères, ndlr) ? Il n'y a plus un seul Etat dans le monde qui daigne s'adresser au pouvoir. Tu veux la souveraineté ? Aujourd'hui les trois quarts du pays sont contrôlés par le Hezbollah. Tu veux du développement ? Le dollars s'échange contre 10.000 livres libanaises. Que veux-tu ? Nomme-moi une seule chose que tu as promis et qui a été faite", a lancé l'ancien ministre en s'adressant au chef de l'Etat.
"Je ne pense pas que le comportement du président Aoun vis-à-vis de ce qui s'est passé soit à la hauteur du poste maronite (la présidence de la République, ndlr). C'est pourquoi, et loin d'être une attaque contre sa personne, mais par souci pour le poste en question, je l'appelle à démissionner. J'appelle le président à démissionner après la destruction de Beyrouth et ce qui s'est passé au port, et il doit être jugé", a ajouté le député.
commentaires (12)
Il prend vraiment les libanais pour des imbéciles. Mais qui va croire un seul instant ces paroles en l’air ?
Lecteur excédé par la censure
20 h 44, le 23 août 2020