
En néphrologie pédiatrique, les spécialistes ne disposent souvent pas d’alternatives et si celles-ci existent, les molécules n’ont pas le même résultat. Photo d’illustration Bigstock
Le poids de la crise économique et financière est fortement ressenti dans le secteur médical, de nombreux spécialistes peinant à traiter leurs patients, surtout ceux souffrant de maladies chroniques. En cause : une pénurie d’équipements et de certains médicaments sur le marché libanais. « Les parents d’un de mes jeunes patients ont vendu leur voiture pour assurer le traitement à leur fils qui a reçu une transplantation, raconte ainsi Pauline Abou Jaoudé, néphro-pédiatre. Une de mes patientes a eu besoin d’une voie centrale (cathéter à insertion périphérique qu’on insère dans la veine d’un membre supérieur pour permettre au patient de recevoir des médicaments intraveineux, NDLR). Nous avons fait le tour du Liban, nous n’en avons pas trouvé. Même pour adulte. Nous avons fini par lui mettre une chambre implantable (un boîtier médical implanté sous la peau et relié à une grosse veine par un tuyau, NDLR). » Mais pour ce faire, la spécialiste et des amis se sont cotisés « pour pouvoir assurer au fournisseur l’argent en liquide ».
En néphrologie, comme dans plusieurs autres disciplines, le manque de matériel entrave les prestations médicales.
« Le problème de transferts de fonds a commencé avant l’intifada du 17 octobre, mais s’est aggravé durant le soulèvement populaire, surtout après la fermeture des banques », souligne à L’Orient-Le Jour Roy Abdelhay, importateur d’équipements médicaux. « Avec la pandémie, la situation a empiré, ajoute-t-il. Aujourd’hui, elle est catastrophique. » Il explique que les importateurs d’équipements médicaux ont des difficultés à ouvrir des lignes de crédit à un taux de change de 1 515 livres libanaises et à profiter de la circulaire de la Banque du Liban (BDL) qui subventionne le secteur à 85 %. « Le transfert de l’argent se fait de manière quasi aléatoire, parce qu’il n’y a pas de règles claires qui définissent les produits à subventionner, ajoute M. Abdelhay. De nombreux équipements commencent à manquer sur le marché libanais, comme les filtres de dialyse, les vis de prothèse, etc., mais surtout les pièces détachées qui sont essentielles pour la réparation des machines et qui ne sont pas couvertes par la circulaire de la BDL. »
Partager une même boîte de médicaments
« En néphrologie pédiatrique, nous avons également des difficultés à traiter nos patients, reprend le Dr Abou Jaoudé. Souvent, nous n’avons pas d’alternatives et si celles-ci existent, les molécules n’ont pas le même résultat. Et ce sont des médicaments qui ne sont pas nécessairement chers. Pour pouvoir pallier ce problème, nous sommes en train de prendre les restes d’une boîte de médicaments de chez un patient ayant fini son traitement pour le donner à un autre. Nous essayons aussi de trouver les médicaments de l’étranger. Mais cela n’est pas toujours évident. »
Karim Jebara, président du syndicat des importateurs de médicaments, explique à L’OLJ qu’après le vent de panique qui a soufflé sur le pays au début du mois de juillet, la frénésie s’est actuellement calmée. Celle-ci était due à un communiqué publié par la Société libanaise de cardiologie faisant état d’une pénurie d’un diurétique, ce qui a poussé les patients à le stocker chez eux. « Le syndicat est alors intervenu pour contrôler le marché, poursuit M. Jebara. Les médicaments étaient ainsi livrés en des quantités qui s’alignent sur les ventes historiques d’une même molécule au cours des mois précédents, pour éviter une pénurie au niveau de nos stocks. »
Il affirme qu’actuellement les stocks sont limités, parce que les procédures d’importation sont difficiles. « La BDL a soutenu le secteur pharmaceutique du Liban, ce qui a permis d’assurer les médicaments à la population à des prix bas ou raisonnables, fait-il remarquer. Toutefois, nous demandons que le médicament soit subventionné à 100 %, et non à 85 % comme c’est le cas aujourd’hui, parce que nous avons du mal à assurer les 15 % restants en dollars sur le marché noir. Nous demandons aussi que les transferts relatifs aux produits pharmaceutiques soient traités en priorité, ce qui permet de transférer les fonds rapidement et d’éviter tout retard dans l’importation. »
On vas se réfugier dans les camps de déplacés syriens au moins là les nations unies font un quelconque effort pour aider les gens...
19 h 37, le 30 juillet 2020