Le ministre libanais de l'Intérieur et ancien général de l’armée libanaise aujourd’hui à la retraite, Mohammad Fahmi, a affirmé dans une interview télévisée avoir tué en 1981 deux miliciens "relevant d'un parti très puissant", durant la guerre civile. Et il a ajouté avoir été protégé par Michel Aoun, alors haut-gradé au sein de l'armée.
"En 1981, j'ai eu un problème avec un parti extrêmement fort. Je m'en excuse auprès des familles, des téléspectateurs et de tout le monde... J'ai tué deux personnes. Il y a eu ensuite des affrontements avec ce parti-là. Comme il s'agissait d'un parti très fort, on m'a envoyé au bureau de Michel Aoun. Il m'a alors dit : 'Écoute, Mohammad, tant que je continuerai à respirer, personne ne s'en prendra à toi", a déclaré M. Fahmi dans un entretien accordé vendredi soir à la chaîne du Hezbollah, al-Manar, ajoutant qu'il entretenait, depuis cet incident, "une relation spirituelle" avec l'actuel chef de l'Etat.
Selon son curriculum vitae, l'actuel ministre a dirigé "plusieurs unités de combat" entre 1978 et 1990, avant d'entrer aux services de renseignement de la troupe jusqu'en 2006, dont il dirigera le département central de sécurité. C'est alors qu'il est devenu proche du commandant en chef de l’armée de l’époque, le général Émile Lahoud (1989-1998), et du général Jamil Sayyed lorsque ce dernier était le numéro deux des services de renseignements militaires. Il dirigera ensuite le Centre libanais de déminage jusqu'en 2012, puis le commandement des troupes armées du Liban-Nord jusqu'en 2016.
Lors de cette même interview, le ministre libanais de l'Intérieur a proposé de "déférer devant la justice ceux qui ferment des routes", après plusieurs jours de colère dans le pays, qui traverse sa plus grave crise économique, financière et monétaire depuis 30 ans. "Les blocages de routes entrent, comme les atteintes aux biens publics et privés, dans la catégorie des actes de subversion car ils s'en prennent directement au citoyen", a-t-il déclaré , appelant le Premier ministre Hassane Diab à convoquer une séance du Conseil supérieur de défense "pour prendre la décision de déférer devant la justice ceux qui ferment des routes, si l'on ne veut pas utiliser la force".
Il a par ailleurs affirmé qu'un "service sécuritaire étranger" était derrière les actes de vandalisme à Beyrouth et Tripoli, qui ont émaillé au début du mois des manifestations anti-pouvoir. "Il y a des informations sûres et avérées indiquant une ingérence et un soutien financier d'un service étranger sécuritaire pour semer le chaos au Liban. C'est ce service qui se trouve derrière les violences du 11 juin dernier et ce qui a suivi", a-t-il déclaré. "Il y a des pays amis, frères et étrangers qui s'enorgueillissent d'aider le Liban alors qu'en vérité, ils l'étouffent", a-t-il encore dit sans plus de détails.
Je conseille aux jeunes qui n'ont pas vécu la période de la guerre, ainsi qu'aux moins jeunes qui auraient oublié, de lire le livre de Georges Frayha "Avec Bachir": cela permet de comprendre exactement ce qui se passait en 1981, et de mettre les confessions de M. Fahmi en perspective...
10 h 57, le 29 juin 2020