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Nos Lecteurs ont la Parole

L’âne du village (espèce en voie de progression)

Il était une fois, au Liban, un petit village dont l’un des fils avait émigré au Brésil. Après quelques années, il fit une fortune appréciable mais il gardait toujours la nostalgie de son pays.

Il revint, un été, visiter son village natal et fut accueilli comme un roi : les rumeurs de sa richesse avaient devancé son arrivée.

Fier de sa fortune, il fit appel à un ingénieur et le chargea d’exécuter les travaux nécessaires pour rendre jaloux tout le voisinage de la modernisation de sa terre bien-aimée.

Un comité de « sages » fut nommé pour superviser les travaux en son absence, « sages » qui s’avérèrent par la suite être des loups voraces ; sauf Hanna, un maçon de son métier, qui était illettré et qui vivait dans le droit chemin.

Les travaux commencèrent et les factures gonflées défilaient sous le nez de l’honorable maçon qui y apposait son empreinte digitale sans rien comprendre à l’excès des sommes dépensées.

Pour aveugler encore plus cet honnête ouvrier, il se voyait confier de nombreuses besognes qui lui permettaient d’améliorer ses conditions matérielles, d’autant que des bonus pleuvaient sur lui et faisaient la joie de sa famille.

Les travaux avançaient et l’argent arrivait régulièrement du Brésil et les « sages » devenaient de moins en moins sages en salant de plus en plus les factures. Dans leurs rencontres privées, ils taxaient Hanna d’« âne » parce qu’il se contentait de l’argent gagné à la sueur de son front et qu’il les laissait faire, ne sachant ni lire ni écrire.

Dans ce petit cercle villageois les langues se sont vite déliées et le scandale n’échappait plus à personne. Mais la loi du silence était de rigueur car tout influent recevait sa part du gâteau.

Là où passait le pauvre Hanna l’on entendait des moqueries chuchotées à voix basse : « L’âne arrive, l’âne est parti… »

Cette histoire n’est que le reflet de ce qui se passe depuis belle lurette, à grande échelle, dans mon pays.

Dans les années 1950-1960, les honnêtes gens étaient récompensés pour leur bonne conduite. De nos jours, quand un responsable refuse de participer aux vols organisés, il est non seulement taxé d’« âne », mais il est ou viré de son poste ou renvoyé chez lui tout court.

Vous vous demandez encore pourquoi nous sommes écrasés par 100 milliards de dollars de dette publique ?

Soyons modestes et avouons que pour pouvoir sortir de ce puits de malheur où nos responsables nous ont jetés, il nous faut cesser d’être des « ânes » comme nous l’avons été depuis 30 ans. Nos Draculas ont pu sucer notre sang parce que nous avons toujours été des « ânes » en les laissant assécher notre vache laitière jusqu’à la dernière goutte de son lait.

Les « sages » à qui nous avions confié notre destinée ne sont nullement des sages, ils sont des crapules, des pervers narcissiques, des voyous, des voleurs du lait des nourrissons et du blé des sans-logis.

D’après les instances internationales, nous sommes le pays le plus corrompu au monde. Quatre cents milliards de dollars ont été volés depuis les années 1990. Depuis douze ans, 40 à 60 milliards de dollars ont été spoliés dans la « grotte de Ali Baba » de l’électricité. Allons-nous rester des « ânes » ? Certainement que non. Levons les barricades de la vérité, de la liberté et de l’honneur. Citons nominativement nos voleurs. Sortons de nos caves les faucilles, les pioches, les marteaux, nos vieux fusils et marchons ensemble en vagues humaines successives sur ceux qui nous ont jetés dans la misère et la pauvreté.

Le dernier scandale du fuel (miné) très riche en soufre que nos usines d’électricité consomment depuis une vingtaine d’années est suffisant pour mettre à ciel ouvert l’odeur nauséabonde des égouts des pots-de-vin et des saletés servies aux courtisans de la « grotte de Ali Baba » de l’électricité. Un cartel bien organisé formé des fromagistes d’un certain nazi qui envoyait au four crématoire tous ceux qui osaient s’opposer à ses machinations machiavéliques. Ce cartel spoliait des centaines de milliers de dollars par an et les distribuait, en catimini, aux quarante voleurs de la grotte pour acheter leur silence.

À la place de cet animal serviable et docile, l’« âne » que nous étions, soyons des chevaux arabes racés et piétinons dans nos courses tous les pétainistes de notre argent, de nos biens et de nos droits.

« Allons enfants de la patrie

Le jour de gloire est arrivé

Ôtons-nous de la tyrannie

Des fromagistes libanais. »

La vérité nous attend au bout d’un couloir sombre et très sombre car :

- Au bout de la nuit il y a l’aurore

- Au bout de l’hiver il y a le printemps

- Au bout du désespoir il y a l’espérance

- Au bout de la mort il y a la résurrection.

Amen.

Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « courrier » n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de L’Orient-Le Jour. Merci de limiter vos textes à un millier de mots ou environ 6 000 caractères, espace compris.

Il était une fois, au Liban, un petit village dont l’un des fils avait émigré au Brésil. Après quelques années, il fit une fortune appréciable mais il gardait toujours la nostalgie de son pays.Il revint, un été, visiter son village natal et fut accueilli comme un roi : les rumeurs de sa richesse avaient devancé son arrivée.Fier de sa fortune, il fit appel à un ingénieur et le...

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