Le rapatriement des Libanais à partir des États-Unis ne semble pas être une sinécure. Les bureaux de l’ambassade du Liban et des consulats subissent une avalanche de demandes et d’appels d’expatriés dans la tourmente désireux de rentrer au pays, mais leurs demandes se heurtent à la limite de sièges alloués au rapatriement. « Un peu plus de 5 % » des milliers de personnes déjà enregistrées partiront, affirme l’ambassadeur du Liban à Washington, Gabriel Issa, dans une mise au point publiée sur la page Facebook de l’ambassade. La sélection se fait donc au compte-gouttes avec 30 places imparties sur chaque vol prévu via Paris et Londres à destination de Beyrouth. « La priorité absolue est accordée aux cas humanitaires. C’est le ministère des Affaires étrangères qui tranche, en définitive, en donnant son approbation sur les noms proposés », indique une source officielle à L’Orient-Le Jour.
Dans son message, l’ambassadeur Issa, qui se veut « transparent et clair », répond à bon nombre de questions sur le mécanisme mis en place pour les vols à partir des États-Unis, puisqu’il n’y a pas de vols directs de la Middle East Airlines depuis l’Amérique. « Nous avons été informés que l’on nous avait attribué un nombre très limité de sièges sur certains vols à travers des pays tiers, y compris pour les personnes âgées ayant un problème de santé, les étudiants et toutes les catégories prioritaires. Les expatriés devraient donc organiser leurs vols des États-Unis vers ces pays, et la MEA assurera leur transport vers le Liban », indique-t-il.
L’ambassadeur explique que le nombre de sièges attribués aux expatriés libanais aux États-Unis est « un peu plus de 5 % des milliers de personnes déjà enregistrées. Le nombre de sièges sur les vols étant très limité, l’ambassade et les consulats du Liban ont été officiellement invités à sélectionner les cas les plus graves parmi tous les candidats et à les soumettre au ministère des Affaires étrangères ainsi qu’à la MEA. Malheureusement, les très rares sièges qui nous ont été attribués nous viennent de diverses sources, officielles et non officielles, et dans de nombreux cas, des noms prédéterminés ont été demandés comme prioritaires », souligne l’ambassadeur Issa sur Facebook. Face au tollé général provoqué, la balle se trouve désormais dans le camp du ministère des Affaires étrangères qui « tranche », plaide-t-il.
Processus imparfait et influences
L’ambassadeur affirme qu’il préfère être « honnête plutôt que populaire » et reconnaît que certains « pouvoirs influencent les sélections finales ». « Il est de notre devoir de vous informer qu’en tant qu’ambassades et missions diplomatiques, nous ne sommes pas en mesure d’approuver unilatéralement les sélections. Nous continuerons de transmettre vos demandes, vos préoccupations et vos griefs au gouvernement, mais nous ne pouvons faire la sélection de manière unilatérale », ajoute-t-il. Et de préciser : « Pour être honnête, la plupart des demandeurs ont fait pression pour obtenir un traitement préférentiel par le biais de divers fonctionnaires, exacerbant davantage le problème, tandis que notre politique, depuis le début, a été d’évaluer objectivement les cas les plus graves et leur degré de gravité », ajoute l’ambassadeur qui exprime l’espoir que « le gouvernement réévaluera la situation et mettra plus de vols disponibles » à l’intention des citoyens libanais.
MEA : critères d’urgence
Aux États-Unis, « les employés de la MEA s’activent sans relâche et mettent les bouchées doubles pour accommoder les nombreuses demandes de retour au pays », indique de son côté à L’Orient-Le Jour Adib Kassis, directeur de la compagnie aérienne à New York. « Les départs des États-Unis sont opérés par Air France, Delta Airlines, ou British Airways, sur la base d’un accord que nous avons avec ces compagnies aériennes, assure-t-il. Trois départs sont prévus à destination de Beyrouth via Paris et trois autres via Londres. Le 2 mai, via Paris, et les 4 et 6 mai via Londres. »
« Nous avons alloué trente places à partir des États-Unis », ajoute-t-il, expliquant que le total des sièges s’élève à 180 au lieu de 300 en temps normal et que le tarif du billet s’élève à 2 000 dollars en classe économique et 4 000 en classe affaires. « Le voyage sera assuré par une équipe médicale à bord ainsi que l’équipage », ajoute M. Kassis. « Arrivés à Beyrouth, les voyageurs seront soumis au test de dépistage habituel du Covid-19 dont le résultat leur permettra soit de rentrer chez eux après avoir passé la nuitée à l’hôtel, soit d’être placés en quarantaine à l’hôpital », précise-t-il.
« La sélection se fait donc selon l’urgence des cas humanitaires. Certains financements sont assurés par des levées de fonds auprès de la diaspora ou auprès d’institutions religieuses. La sélection à partir de l’Europe se fait selon d’autres critères qui n’ont rien à voir avec les listes préétablies. C’est pour cette raison que les ambassades et les consulats sont sous forte pression. Les tarifs prohibitifs rebutent toutefois. Après tout, c’est le droit de tout citoyen de pouvoir rentrer au pays ! » affirme à L’Orient-Le Jour une source proche du dossier qui a requis l’anonymat.
LA WASTA MEME DANS LES URGENCES. LE CLIENTELISME POLITIQUE MEME DANS LES EXTREMES.
09 h 42, le 30 avril 2020