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Agenda

Les impostures sursaturées

Nombre d’impostures, propagées surtout ces dernières années, enrobées de cogitations pseudo-constitutionnelles et transformées en idéologies de mobilisation, doivent désormais être démasquées.

1 - La responsabilité du « système » : des jacobins et des idéologues de tous bords, peu accoutumés au diagnostic et à la thérapie de la gouvernance constitutionnelle, pointent un doigt accusateur vers le pacte national, la Constitution libanaise de 1926 et ses amendements, l’accord d’entente nationale de Taëf, comme si le livre de chevet de tous nos gouvernants est la Constitution libanaise et les recueils de législation, et comme si nos gouvernants ne procèdent à aucune action sans référence normative à la Constitution. On aurait dit que le Liban est au summum de l’État de droit et de la démocratie !

Des jacobins laïcisants et idéologues, peu collés à la réalité, donnent ainsi leur bénédiction à toutes les pratiques du clientélisme. Des hommes politiques le disaient clairement : « Tant que le système est confessionnel, nous voulons notre part ! » Or, la discrimination positive, ou quota, n’est pas hors la loi. Elle est régie par des normes de compétence et d’intérêt général. La Constitution libanaise n’est pas « confessionnelle ». L’article 12 est fort explicite quant à l’égalité, le mérite, la compétence et l’intérêt général.

La finalité de la discrimination positive, d’après tous les travaux scientifiques comparatifs, se propose de circonscrire l’exploitation politique des clivages dans un but de domination et d’exclusion et la manipulation des allégeances primaires. Le régime constitutionnel libanais, dans les textes et l’esprit, dans une perspective comparative internationale de gestion du pluralisme religieux et culturel, est le produit génial de pères fondateurs. Quant à l’application, elle est la pire qui puisse être !

Le régime constitutionnel libanais a été confessionnalisé à l’extrême dans la praxis. Déjà, quand on brandit la volonté ou l’épouvantail de la « suppression du confessionnalisme » ou du « confessionnalisme politique », on présuppose qu’entre « confessionnalisme » et non-confessionnalisme, il n’y a aucune pratique intermédiaire, moins nocive, et pas de remédiation intermédiaire, alors que c’est la Constitution elle-même et le pacte national de 1943, comme celui de Taëf, qui présupposent une chaîne, un processus et des aménagements intermédiaires. La Constitution libanaise, dans le texte et l’esprit, notamment dans les art. 12 et 95, implique l’égalité, le mérite, la compétence et l’intérêt général.

2 - Le chef de l’État : selon l’article 49 de la Constitution, le chef de l’État « veille au respect de la Constitution ». Le texte ajouté en vertu de l’amendement de 1990 n’est pas de l’éloquence verbale, mais le fruit d’une longue histoire. Le chef de l’État au Liban est un Louis XIV constitutionnel. Ce qui implique un profil. Les dérobades et impostures sont désormais sursaturées.

3 - Les lacunes constitutionnelles et juridiques : rien ne sert de proposer des amendements quand on vit une situation de non-droit, où le droit n’est pas appliqué et où on utilise la symbolique de la loi pour donner l’illusion du changement.

Des légalistes et docteurs de la loi ont trouvé de nouvelles formes de dérobade, de manipulation et d’imposture : les « failles » (thagharâte) dans l’accord d’entente nationale de Taëf et dans la Constitution libanaise! Analyse apparemment juridique qui convainc une clientèle dupée, des intellos déconnectés des réalités, aussi des journalistes à l’affût de toute nouveauté superficielle.

On oublie que tout texte de loi, même le plus parfait, ne peut tout dire. Surtout en matière constitutionnelle, il y a des « lacunes » dans toutes les Constitutions de tous les pays et qui relèvent de l’état de la culture dominante en société ou du souci de favoriser une souplesse qui s’explique par la nature de toute action gouvernementale (J. Jeanneney, Les lacunes constitutionnelles, Paris, LGDJ, 2014).

On oublie surtout que la bonne foi et l’abus de droit sont des fondements du droit et des catégories juridiques, à la base même de toute réflexion et toute jurisprudence, non pas légaliste, mais juridique.

Si, pour un contrat de location d’un appartement, vous rédigez un contrat fort clair et pertinent de trois pages bien bouclées et, cependant, des conflits surviennent avec le locataire, cela ne signifie pas que la rédaction d’un contrat de location de trente pages empêchera le locataire de mauvaise foi de se dérober à ses obligations.

Au contraire, avec les trente pages, vous lui fournissez des atouts supplémentaires, non pour pratiquer ce qui est juste, mais pour se justifier.

L’imposture de docteurs de la loi présuppose, là encore, que tous les politicards au Liban portent en permanence avec eux les recueils libanais de législation et de jurisprudence et les recueils Dalloz, et que, pour toute action, leur référence : rien que la légalité !

Une analyse légaliste sert ainsi de couverture au narcissisme maladif et à l’imposture. La mise en œuvre de la suprématie de la Constitution par les gouvernants au sommet a besoin de responsabilité.

4 - Les intrusions extérieures : toute force politique et milicienne qui bafoue le document de Baabda du 11/6/2012 à propos de la distanciation n’est pas habilitée à alerter les Libanais contre les subordinations extérieures.

Nombre d’impostures, propagées surtout ces dernières années, enrobées de cogitations pseudo-constitutionnelles et transformées en idéologies de mobilisation, doivent désormais être démasquées.1 - La responsabilité du « système » : des jacobins et des idéologues de tous bords, peu accoutumés au diagnostic et à la thérapie de la gouvernance constitutionnelle,...