Rechercher
Rechercher

Politique - Rencontre

Safadi : Il est plus utile de se soucier du peuple que de la réputation du pays

L’ancien ministre Mohammad Safadi affirme ne pas vouloir baisser les bras. Après l’épisode de sa brève candidature à la présidence du Conseil en novembre dernier et la campagne menée contre lui l’accusant de corruption, il a pris un peu de recul mais n’a jamais songé à arrêter ses activités sociales et économiques. Il prépare plusieurs projets de développement pour le Nord et compte étendre ses activités à Beyrouth. Il a aussi des propositions pour traiter la crise actuelle, à commencer par la fermeture des foyers de corruption, qu’il compte soumettre bientôt.

Mais Mohammad Safadi ne souhaite pas s’étendre sur le passé récent, dont il déclare aujourd’hui, avec humour, que « c’était le plus bref épisode de l’histoire du Liban. De jeudi à samedi !». Il rappelle à cet égard qu’il s’était rendu jeudi 14 novembre dans l’après-midi chez le président du Conseil démissionnaire Saad Hariri qui lui a dit l’avoir choisi pour lui succéder au Sérail. Il avait donné son accord en posant trois conditions : obtenir l’appui des anciens présidents du Conseil, celui de Dar el-Fatwa et celui, clair, de Saad Hariri. Jeudi soir, il a commencé à recevoir des signes négatifs. Vendredi, il a mené des contacts et samedi à 18h, il s’est de nouveau rendu chez M. Hariri pour lui annoncer son retrait de la course. Il explique aujourd’hui qu’après réflexion, dans cette période particulièrement délicate, il fallait un homme politique ayant des contacts internes et externes. Par conséquent, il ne considérait pas pouvoir faire l’affaire, d’autant que les conditions qu’il avait posées n’avaient pas été réunies. Entre-temps, une campagne féroce médiatique et populaire a été menée contre lui, l’accusant de corruption. Pourtant, il déclare avec une certaine fierté qu’il est un des rares ministres « qui a apporté au Liban 225 millions de dollars au cours des 15 dernières années ».


Le dossier de Zaitounay Bay

Mis en cause dans le dossier précis de Zaitounay Bay, Mohammad Safadi s’estime injustement accusé. Selon lui, ceux qui l’ont mis en cause ne le connaissent pas et ne connaissent pas les dossiers. Concernant Zaitounay Bay, il s’agit de deux terrains dont les titres de propriété appartiennent clairement à Solidere, indépendamment du fait que cette société a le droit ou non de les posséder. Stow Waterfont, un holding dont il possède 17 % des actions, est donc entré dans un projet de partenariat avec Solidere (qui possède 50 % des parts du projet). Cela s’est passé en 2004. Or, il n’est devenu ministre pour la première fois qu’en 2005. Comment aurait-il donc pu profiter de son poste pour intégrer ce projet? s’interroge-t-il.

Concernant la concession du parking de Zaitounay Bay par le Conseil du développement et de la reconstruction (CDR), M. Safadi assure qu’en tant que ministre des TP (il était ministre des Travaux publics dans le gouvernement de Fouad Siniora, en 2005, NDLR), il n’avait d’autre choix que de signer le décret y relatif, celui-ci ayant déjà été approuvé en Conseil des ministres et signé par le chef de l’État. De toute façon, tout le monde sait que tout ce qui touche au CDR est rattaché à la présidence du Conseil et se fait en dehors du champ d’action des ministres concernés, ajoute-t-il. Et Mohammad Safadi de préciser qu’il a communiqué tous les documents concernant ces dossiers au procureur financier Ali Ibrahim. Aujourd’hui, il ne garde aucune amertume. Il n’en veut pas à Saad Hariri qu’il avait aidé durant les élections législatives de 2018 à Tripoli. « Je ne regrette pas de l’avoir fait, car pour moi, les sunnites avaient besoin d’un leader et si cheikh Saad avait échoué à Tripoli, cela aurait été un coup pour toute la communauté. » Toutefois, s’il y a des élections anticipées, il pourrait ne pas avoir la même position: « Tout dépendra des circonstances du moment », dit-il. Il ajoute: « De toute façon, j’agis toujours selon ma conscience et dans l’intérêt de mon pays. »

C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il s’est rendu hier chez le président de la Chambre, Nabih Berry, qui a annoncé qu’il voulait régler le problème de l’électricité. Il a quelques idées sur ce sujet, ayant été ministre de l’Énergie (2006). D’ailleurs, il estime qu’actuellement, cela ne sert à rien de parler de politique. « La crise économique et sociale est tellement grave qu’il faut concentrer tous les efforts sur ce sujet. » Selon lui, la priorité est de relancer le fonctionnement des centrales au gaz. Ce qu’il avait encouragé à faire à Tripoli une courte période durant, avant que l’Égypte ne cesse d’envoyer son gaz, via la Jordanie et la Syrie. Mais il a un plan précis sur le sujet qui permettrait, selon lui, de réduire de moitié (un milliard de dollars) le déficit de l’électricité.

Selon lui, le port de Beyrouth est un autre foyer de corruption qu’il faut traiter. Il propose à cet égard de supprimer les douanes, qui alimentent selon lui la corruption. Il s’agirait donc de libérer l’importation des marchandises, tout en fixant la TVA sur elles à 21 % au lieu de 11 %. De même, il pense qu’au lieu d’augmenter les impôts, il faudrait les réduire, pour décourager l’évasion fiscale, qui constitue un important foyer de corruption. Ainsi, il propose que l’impôt sur le revenu soit abaissé de 17 % à 10 %. M. Safadi insiste: « Il faut être imaginatif et innovateur, car la situation est grave et exige des efforts de notre part à tous. »

Au sujet des eurobonds, M. Safadi considère que le lobby favorable au paiement est essentiellement formé de ceux qui les ont achetés. Payer signifie donc financer les banques à 60 %. Alors que si l’État ne paie pas, il garde 1,2 milliard de dollars à l’intérieur du pays. Il serait donc préférable, selon lui, de tout arrêter et de rééchelonner, car le Liban a des priorités dont celle de laisser des liquidités dans le pays. À ceux qui craignent pour la réputation du pays, il répond qu’elle est déjà sérieusement endommagée. « Quand les banques ne donnent pas leur argent aux déposants, c’est déjà la faillite. »

« Il est plus utile de se soucier du peuple que de la réputation du pays », conclut-il. Mohammad Safadi n’exclut pas la possibilité de se rendre chez le Premier ministre pour lui soumettre ses idées. Il affirme que son principal souci reste les jeunes, auxquels il faut assurer des emplois, au Liban ou à l’étranger. Sa fondation donne des formations aux jeunes du Nord. Il compte aujourd’hui ouvrir une antenne à Beyrouth.


Lire aussi

Les dessous de la parenthèse Mohammad Safadi

L’ancien ministre Mohammad Safadi affirme ne pas vouloir baisser les bras. Après l’épisode de sa brève candidature à la présidence du Conseil en novembre dernier et la campagne menée contre lui l’accusant de corruption, il a pris un peu de recul mais n’a jamais songé à arrêter ses activités sociales et économiques. Il prépare plusieurs projets de développement pour le Nord et...

commentaires (4)

Safadi est un homme d'honneur .

Chucri Abboud

18 h 53, le 25 février 2020

Tous les commentaires

Commentaires (4)

  • Safadi est un homme d'honneur .

    Chucri Abboud

    18 h 53, le 25 février 2020

  • Toutes ces initiatives ont l'air très bien... mais il faisait quoi ce monsieur les derniers 10 ans?! C'est maintenant qu'il se reveille et decide d'être plus "royaliste que le roi"?! Ce "réveil" tardif (après le 17 Octobre) delegitimize toutes ces initiatives.

    Hanna Philipe

    13 h 00, le 25 février 2020

  • L,IGNORANCE ET L,INCOMPETENCE ET LES BOURDES SONT L,APANAGE DE TOUS NOS ABRUTIS CORROMPUS ET INCOMPETENTS.

    LA LIBRE EXPRESSION

    12 h 07, le 25 février 2020

  • « Il est plus utile de se soucier du peuple que de la réputation du pays »: les deux se tiennent... lorsque l'on se souciera réellement du bien-être du peuple et œuvrera dans ce sens, la bonne réputation du pays suivra automatiquement... Ce qui met la réputation du Liban en danger est justement le mépris de ses dirigeants pour son peuple...

    NAUFAL SORAYA

    07 h 52, le 25 février 2020

Retour en haut