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Lifestyle - Beyrouth Insight

Joe Maalouf, un Tintin à la conquête de la vérité

Cet animateur télévisé au passé controversé se veut chevalier vaillant de la justice sociale et de la liberté d’expression, à travers son poste d’ambassadeur libanais auprès de l’Union pour la protection de l’enfance, mais aussi et surtout au sein du programme « La Ekhir Nafass » où il ouvre des dossiers qui dérangent.

Joe Maalouf, incontournable et controversé. Photo Kifah Ballani

L’Orient-Le Jour a longuement hésité avant d’ouvrir ses pages à Joe Maalouf et de lui y accorder une rencontre. Ne serait-ce qu’à cause de son inexcusable faux pas de mai 2012, dans le cadre de son ex-émission Anta Horr sur la chaîne MTV, pour lequel la communauté LGBTQ libanaise lui donne encore du fil à retordre et que lui-même ne se pardonne toujours pas. Sauf que voilà, empilant à son compteur des années de défense chevronnée des droits des plus démunis, notamment la cause des enfants qui lui tient particulièrement à cœur, le self-made-man est devenu sans conteste une figure incontournable du petit écran, même s’il ne fait pas l’unanimité, caracolant au faîte de l’audimat et titillant dans le même temps la justice dès lors qu’il expose au grand jour des dossiers sensibles que d’autres préfèrent se passer comme une patate chaude… Une page s’est tournée et cet entretien s’est imposé.

Cette rage

La rencontre a lieu dans les locaux de la MTV, au lendemain du programme télévisé La Ekhir Nafass qui crée systématiquement le buzz les lundis soir, depuis le début de la révolution. Joe Maalouf reçoit dans son bureau, piochant dans un café noir qui l’aide à se remettre d’une nuit insomniaque passée « à parcourir les réseaux sociaux, un par un les tweets et les posts, car les retours me sont importants ». Il a la pupille écarquillée et l’épi électrisé, lui qui se dit habitué à attirer la foudre, « les insultes, les menaces. Mais je n’en parle pas trop parce que j’ai horreur de la victimisation. C’est le prix à payer quand on choisit de faire ce métier ». Nulle tentative de victimisation non plus au moment de déverrouiller les pourtant lourds tiroirs du passé, et dérouler l’obscure bobine de l’enfance. De fait, refusant le pathos larmoyant, sabrant les regrets, Maalouf revient tout de même sur le divorce de ses parents, le décès de son père, sa garde et celle de son frère Gilbert qui sont données à la famille paternelle, « un environnement des plus toxiques », puis ses deux années passées dans un orphelinat, avec ce sentiment de « grandir sans repères ; cette confusion totale, ne pas avoir de recours aux étapes cruciales de mon adolescence, a donné naissance à une colère profonde en moi, envers tout et tout le monde. J’étais amer, et j’en ai longtemps voulu au monde entier ». Si cet ambassadeur libanais auprès de l’Union pour la protection de l’enfance choisit de lever le voile sur cette rude étape de sa vie, cette douceur de l’enfance à laquelle il n’a jamais eu le loisir de goûter, c’est simplement pour expliquer les raisons qui l’ont mené à crier haro sur l’injustice et défendre avec rage les droits des mineurs, insistant que « c’est parce que j’ai vécu des circonstances pareilles que je suis en mesure de pouvoir me mettre à la place de ceux que je tente de protéger aujourd’hui ». D’ailleurs, avant même de faire ses armes à l’USEK en génie informatique et télécoms, et histoire de combattre cette mélancolie qui le pourchassait sans répit, Joe Maalouf avait fabriqué un jour une radio avec les moyens du bord. À travers cette station de fortune, il émettait dans son quartier, un programme en quelque sorte similaire à ceux qu’il cornaquera par la suite, sauf qu’il y égrenait ses propres complaintes, à défaut d’être entendu par quiconque. Cet exercice, somme toute rudimentaire, lui ouvrira toutefois les portes de la chaîne Jaras Scoop dont il devient le directeur général et où il lance son programme Ana Horr à la faveur duquel il planche sur une foultitude de cas sociaux.

Des vérités qui dérangent

Tant et si bien que l’audimat libanais découvrira sa bouille de « Tintin à la conquête de la vérité » quelques mois plus tard à la MTV, dans le cadre de l’émission Enta Horr qui reprenait les mêmes principes. Débuts mitigés, erreurs de parcours dont il dit : « J’avoue que j’en ai fait plein. Je ne cherche pas à me justifier, mais je ne savais pas faire autrement. J’ai dû beaucoup travailler sur moi afin de dépasser cet autre moi », notamment le cas du cinéma de Tripoli et ses films porno qu’il dévoile au petit écran et qui provoquera une déferlante contre la communauté LGBTQ. Puis une tentative de rectifier le tir, un an plus tard, en dénonçant le maire de Dekouané qui avait arrêté, de la manière la plus aberrante, des homosexuels dans un bar du quartier. Bref, tout cela avait conduit la MTV à congédier Joe Maalouf, lequel était devenu aux yeux de l’opinion publique une personnalité pour le moins clivante, sorte de père Fouettard à lacérer, de gendarme à menotter. Pas prêt à lâcher sa bataille contre l’injustice, quitte à se voir traîner devant les tribunaux, « à avoir un casier judiciaire plein à craquer seulement pour avoir dit des vérités qui dérangent », l’animateur reprend les rênes de Hki Jelis puis Hawa el-Horriyeh à la LBC, avant de regagner son siège à la MTV, au moment où explose la révolution d’octobre. Initialement réinvité à piloter le programme Bel Wikélé, qui verra le jour en début d’année 2020, Maalouf commence par improviser La Ekhir Nafass qui, comme son titre l’exprime si bien, consiste à mettre en lumière et disséquer jusqu’au dernier souffle des dossiers sociaux flambants que la justice aurait choisi de dissimuler sous les tapis du déni. Abordant tour à tour des cas de corruption, celui de Marwan Habib, accusé de harcèlement sexuel, de Rana Beïano (une victime de violences conjugales, NDLR) ou du tonitruant dossier de Mission de Vie, Joe Maalouf, peur de rien, secoue une société dont il souhaite que les langues se délient, alors que s’effrite le mur de la peur, sous le poids de la révolution. Au nom d’une justice sociale, de la liberté d’expression, mais aussi peut-être au nom de son enfance qu’il commence enfin à réparer…

L’Orient-Le Jour a longuement hésité avant d’ouvrir ses pages à Joe Maalouf et de lui y accorder une rencontre. Ne serait-ce qu’à cause de son inexcusable faux pas de mai 2012, dans le cadre de son ex-émission Anta Horr sur la chaîne MTV, pour lequel la communauté LGBTQ libanaise lui donne encore du fil à retordre et que lui-même ne se pardonne toujours pas. Sauf que voilà,...

commentaires (1)

BRAVO ET FÉLICITATION, UN HOMME COURAGEUX. BONNE CONTINUATION POUR LE BIEN DES GENS HONNÊTES. MERCI JOE

Gebran Eid

00 h 12, le 23 décembre 2019

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Commentaires (1)

  • BRAVO ET FÉLICITATION, UN HOMME COURAGEUX. BONNE CONTINUATION POUR LE BIEN DES GENS HONNÊTES. MERCI JOE

    Gebran Eid

    00 h 12, le 23 décembre 2019

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