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Liban - Armement

L’éventuelle suspension d’une aide militaire US au Liban, un message politique ?

Londres annonce pour sa part la poursuite de son soutien à l’armée libanaise.

Don américain à l’armée libanaise, en 2017, de huit chars de type Bradley et de dix autres véhicules. Photo ANI

L’administration Trump a-t-elle suspendu une aide militaire de 105 millions de dollars destinée au Liban ? L’information, rapportée jeudi soir par l’agence Reuters, n’avait toujours pas été confirmée hier. Deux jours après la démission du Premier ministre, Saad Hariri, sous la pression de la rue, Reuters, citant deux officiels américains s’exprimant sous le couvert de l’anonymat, a rapporté que le bureau du budget de la Maison-Blanche et le Conseil de sécurité nationale ont décidé de suspendre cette aide, sans expliquer les motifs d’une telle décision. Le département d’État, qui en aurait informé le Congrès, n’a pas non plus donné d’explication, indiquent les mêmes sources. Selon Reuters, cette aide comprenait notamment des missiles pour la sécurité des frontières et des lunettes à vision nocturne.

L’un des deux officiels interrogés par l’agence de presse a toutefois estimé qu’il est important de « renforcer l’armée libanaise », « l’une des plus compétentes institutions du pays ». Selon cet officiel, la suspension de l’aide américaine « pourrait paver la voie à la Russie ». Pour sa part, un haut responsable de la Maison-Blanche, interrogé par la chaîne américaine al-Hurra, a affirmé que les États-Unis n’avaient encore pris aucune décision en ce sens, sans toutefois démentir l’information de Reuters.

Depuis 2006, le gouvernement américain a fourni au Liban plus de 1,7 milliard de dollars d’assistance en matière de sécurité. Le budget alloué par l’État libanais à la troupe s’élève à quelque deux milliards de dollars par an. Il sert principalement à couvrir les traitements des militaires et les dépenses de fonctionnement. Seul un tiers du budget est utilisé pour l’entretien des équipements, dans un état vétuste. « Ce sont les aides octroyées par les États-Unis qui ont permis à l’armée libanaise, au cours des dix dernières années, de renouveler certains équipements », confie un ancien militaire à L’OLJ.

Au lendemain de l’information faisant état d’une éventuelle suspension de l’aide américaine, la Grande-Bretagne a, pour sa part, annoncé une aide allant jusqu’à 25 millions de dollars à l’armée libanaise pour les trois prochaines années. Cette somme servira à financer des projets de formation et l’achat de certains équipements destinés à la protection de la frontière. Selon plusieurs analystes, le timing de l’annonce faite par Londres « est destiné à rassurer l’institution militaire ». « La Grande-Bretagne n’a pas l’habitude de communiquer aussi ouvertement sur les aides militaires », commente un ancien officier.


L’armée n’a pas été prévenue

Interrogée sur l’information de Reuters, une source proche de Yarzé indique à L’OLJ que le commandement de l’armée « n’a pas encore été notifié d’une telle décision », soulignant qu’il fallait attendre les prochains jours pour avoir confirmation. « Normalement, le chef de l’armée aurait dû être mis au courant, ce qui n’est pas le cas », précise la source. « Si cette information était confirmée, elle devrait être mise sur le compte de la politique globale récemment adoptée par l’administration Trump, consistant à réduire le budget militaire extérieur des États-Unis non seulement au Liban, mais aussi partout ailleurs », ajoute-t-elle.

C’est dans ce cadre qu’il faudrait comprendre selon elle la décision du président américain de retirer ses troupes de Syrie. « Il s’agit d’une politique qui, de toute évidence, n’est pas mue par le souci de sauver des vies parmi les militaires, mais par des considérations purement économiques et budgétaires. »

C’est un avis similaire que confie une source proche des milieux diplomatiques occidentaux qui se dit convaincue que la décision présumée de la suspension de l’aide militaire américaine, qui « n’a toujours pas été officiellement confirmée », pourrait être expliquée par la politique de restriction budgétaire adoptée par les États-Unis en matière d’aides extérieures. « La question qu’il faut se poser est celle de savoir pourquoi cette information a fuité en ce moment précis, alors que le Liban traverse une période de turbulences », indique la source.


Message politique

Selon Khalil Hélou, un ancien officier à la retraite, les fuites « sont voulues ». Elles seraient destinées à envoyer un message musclé aux responsables libanais pour les mettre en garde contre la tentation de mettre en place un gouvernement monochrome issu du camp du 8 Mars, après la démission mardi, sous la pression du vaste mouvement de mobilisation populaire qui traverse le Liban depuis le 17 octobre, du Premier ministre Saad Hariri.

« Si le mouvement de révolte refuse la forme du cabinet que la classe dirigeante proposera à un moment donné, l’éventualité de former un gouvernement de technocrates proches du 8 Mars n’est pas à écarter. Ce sont les informations qui circulent en ce moment dans les milieux des protestataires. » Selon l’ancien officier, ce n’est pas la première fois que l’administration américaine brandit ce type de menace.

Interrogé, Toufic Baaklini, un homme d’affaires libano-américain bien introduit dans les cercles de l’administration américaine, affirme pour sa part que l’information sur une suspension de l’aide américaine « est infondée ». « Ce n’est qu’une rumeur », assure-t-il, tout en reconnaissant que des pressions israéliennes ont effectivement eu lieu dans ce sens, mais n’ont pas abouti. « L’Occident, y compris les États-Unis, a vu à quel point les protestataires, toutes communautés confondues, ont acclamé l’armée et ont salué son rôle lors des protestations », conclut-il.


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