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Liban - Liberté d’expression

Les responsables de « Nidaa el-Watan » maintenus en liberté sous caution

L’affaire de l’article « Nouveaux ambassadeurs à Baabda : bienvenue dans la République de Khamenei » a été déférée devant le parquet d’appel de Beyrouth.

Des hommes politiques et des journalistes ont observé un sit-in en faveur de la liberté d’expression, devant le Palais de justice.

Après avoir interrogé hier Béchara Charbel et Georges Berberi, respectivement rédacteur en chef et directeur responsable du quotidien Nidaa el-Watan, fondé par l’homme d’affaires Michel Mecattaf, l’avocat général près la Cour de cassation, Imad Kabalan, a décidé de les maintenir en liberté sous caution d’élection de domicile et a déféré leur dossier auprès du procureur général près la cour d’appel de Beyrouth, Ziad Abou Haïdar.

Les deux journalistes auraient été convoqués à la demande du ministère de la Justice après avoir publié dans l’édition de jeudi dernier une manchette intitulée : « Nouveaux ambassadeurs à Baabda : bienvenue dans la République de Khamenei », en référence au guide suprême iranien. L’article faisait allusion au dernier discours que le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, avait prononcé pour la commémoration de la Achoura (9 septembre), dans lequel il avait réaffirmé son allégeance au guide Khamenei. D’aucuns ont perçu une critique implicite du chef de l’État, Michel Aoun, en raison de ses relations avec le Hezbollah.Contactée par L’Orient-Le Jour, une source judiciaire proche de M. Kabalan affirme que, généralement, un magistrat en charge d’interroger des journalistes refuse d’ordonner leur détention. Elle souligne que c’est à Ziad Abou Haïdar, auprès de qui l’affaire a été transmise, de décider du tribunal compétent, l’orientation étant vraisemblablement que ce juge charge le tribunal des imprimés de statuer sur l’affaire.

Une autre source proche du dossier estime d’ailleurs que l’avocat général près la Cour de cassation ne saurait être en aucune façon convaincu de la culpabilité des journalistes. Interrogé par L’OLJ, l’ancien député Boutros Harb, avocat de MM. Charbel et Berberi, affirme avoir pourtant compris de M. Kabalan que celui-ci aurait lui-même induit l’action judiciaire, lorsqu’il lui a posé, au cours de la séance, la question de savoir qui se cache derrière cette initiative.

À l’issue de l’audience, M. Harb a exprimé sa « confiance absolue dans la décision qu’aura à prendre la justice », souhaitant que le dossier soit rapidement « clos ». Évoquant la teneur de la séance, M. Harb a souligné que ses clients et lui-même ont affirmé que l’article litigieux « exprime l’opinion d’une grande partie des Libanais qui rejettent les positions du secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, notamment le fait d’outrepasser l’État et de confisquer sa décision en effectuant des opérations militaires à partir du territoire libanais, ainsi que le fait de proclamer son allégeance au guide suprême iranien ». M. Harb a noté que les positions du parti chiite nuisent à l’État et à ses institutions, en particulier le poste et les prérogatives du président de la République, alors que l’intention des journalistes de Nidaa el-Watan est de soutenir le chef de l’État et ses prérogatives constitutionnelles.

« Où en est la démocratie ? »

En réponse à une question de L’OLJ, M. Harb a fait part de ses appréhensions quant au danger de voir l’État « ne plus tolérer les critiques et l’opposition ». « Où en est la démocratie ? » s’est-il interrogé. Et de poursuivre : « Sommes-nous arrivés à un point où le pouvoir ne parvient plus à admettre qu’il existe des gens qui pensent différemment et ne se soumettent pas à sa politique ? »

L’ancien député a toutefois réitéré sa « pleine confiance » dans la justice, souhaitant que « le parquet d’appel ne commette pas l’erreur d’engager des poursuites ». « Mais, le cas échéant, j’espère que le tribunal des imprimés acquittera les journalistes, d’autant qu’ils n’ont commis aucun délit », a-t-il indiqué.

Avant la tenue de l’interrogatoire, et dans une tentative de trouver une solution à la question des poursuites contre MM. Charbel et Berberi, le président de l’ordre des rédacteurs, Joseph Kossaifi, s’était rendu auprès du procureur général près la Cour de cassation, Ghassan Oueidate, qui a prêté serment mardi, pour, outre le féliciter, lui exprimer son souhait de voir le dossier transféré au tribunal des imprimés. Cette juridiction est, selon lui, « la seule compétente pour statuer de l’affaire ».

Pour sa part, à la sortie de l’audience, le rédacteur en chef de Nidaa el-Watan a paru plus que jamais attaché à la liberté d’expression. « Nous n’avons rien à justifier, puisque le droit de nous exprimer est autorisé par la Constitution. Nous venons aujourd’hui (hier) pour affirmer le droit d’exercer la liberté d’expression », a-t-il insisté. Soulignant que le quotidien « n’a pas porté atteinte à la présidence de la République », Béchara Charbel a toutefois réclamé « une présidence de la République et un gouvernement qui remplissent leur rôle sans partenaire, et un État qui prenne lui-même les décisions de guerre ou de paix ».

Solidarité

La plainte dont ont fait l’objet les journalistes a suscité un mouvement de contestation à l’encontre de ce que beaucoup considèrent également comme des atteintes à la liberté d’expression et un harcèlement policier et judiciaire des médias. Un sit-in de solidarité a été ainsi organisé devant le Palais de justice de Beyrouth, parallèlement à l’audience. Étaient présents l’ancien ministre Ghazi Aridi, les anciens députés Farès Souhaid et Élias Atallah, le président de l’ordre de la presse, Aouni el-Kaaki, le fondateur de Nidaa el-Watan, Michel Mecattaf, ainsi que des cadres de partis et des activistes.

M. Aridi a transmis à cette occasion la position du chef du Parti socialiste progressiste, Walid Joumblatt, qui « se tient aux côtés la liberté d’expression ». « Nous refusons que soient ciblés Nidaa el-Watan et les journalistes travaillant dans n’importe quel média », a-t-il martelé.

Pour sa part, M. Mecattaf a estimé que « si l’on ne pratique pas la liberté d’opinion, on contribuerait à la destruction du pays ». Et de préciser : « Notre présence ici représente la confiance que nous avons en l’État de droit et des institutions. »

Le parti Kataëb a également manifesté sa solidarité à l’égard des journalistes interrogés. « Nous invitons les responsables à se rendre compte du danger qui menace les institutions médiatiques et à établir au plus vite un plan pour les secourir plutôt que de s’adonner à la politique du musellement des voix et de l’aliénation des libertés », peut-on lire dans un communiqué publié hier en début de soirée par le département de communication au sein du parti.

Après avoir interrogé hier Béchara Charbel et Georges Berberi, respectivement rédacteur en chef et directeur responsable du quotidien Nidaa el-Watan, fondé par l’homme d’affaires Michel Mecattaf, l’avocat général près la Cour de cassation, Imad Kabalan, a décidé de les maintenir en liberté sous caution d’élection de domicile et a déféré leur dossier auprès du procureur...

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