Rechercher
Rechercher

Moyen Orient et Monde - 3/3 LE GOLFE DU FUTUR

« Au sein des sociétés du Golfe, il y a un appétit croissant pour le changement »

L’exploitation de leurs immenses ressources en matière d’hydrocarbures a permis aux pays du Golfe de devenir en un temps record l’épicentre économique du Moyen-Orient. Leur prospérité et leur stabilité sont toutefois menacées par la baisse des revenus du pétrole. Pour s’adapter à cette nouvelle ère, ces pays se transforment en profondeur sur les plans économique, politique et sociétal. Dans leur logique, le présent n’est qu’une rampe de lancement vers un futur encore plus radieux. « L’Orient-Le Jour » a réalisé une série d’articles pour tenter de comprendre les grands enjeux de cette métamorphose. Troisième et dernier épisode aujourd’hui.

Des femmes devant une affiche du roi d’Arabie, Salmane ben Abdelaziz, le 12 février 2018 à Riyad. Faisal Al Nassar/Archives Reuters

Les transitions amorcées par les pays du Golfe pour promouvoir des voies alternatives au pétrole afin de pérenniser leur avenir secouent les sociétés de la région. Les projets de développement « Visions » incluent tous une diversification économique allant de pair avec des changements sociaux et sociétaux profonds. Une opération délicate pour les autocrates de la péninsule Arabique, qui doivent composer avec les cercles conservateurs qui constituent une base solide pour se maintenir au pouvoir. Interrogée par L’Orient-Le Jour, Kristin Diwan, chercheuse à l’Arab Gulf States Institute à Washington, revient sur les perceptions de ces changements par les sociétés du Golfe.


Comment ces réformes affectent-elles la relation entre l’État et les sociétés?

Tous les pays du Golfe – avec une urgence variable – sont en train de transformer le contrat social essentiel dans lequel il est attendu de l’État qu’il fournisse des avantages sociaux et de l’emploi dérivés de la richesse issue du pétrole, tout en important de la main-d’œuvre et en externalisant la défense nationale. Pour beaucoup de ressortissants du Golfe, c’est déjà de l’histoire ancienne. Leurs dirigeants exigent désormais davantage de leur part – éducation, contributions à l’économie, service militaire national – en injectant souvent du nationalisme pour encadrer ces nouvelles exigences et loyautés envers l’État. Cela n’affecte pas seulement les populations du Golfe, mais aussi les marchés du travail régionaux et les relations de pouvoir.


Comment ces changements et ces réformes sont-ils perçus par la population ?

La perception de ces changements varie selon l’âge, la situation économique et la proximité avec l’État. Il y a plus d’enthousiasme pour l’éducation chez les classes moyennes et supérieures globalement connectées, qui voient des opportunités de diversification économique et profitent des opportunités sociales et culturelles qui promettent davantage d’activités artistiques et de divertissement. Beaucoup de personnes issues de la nouvelle génération sont excitées par l’idée d’être engagées davantage dans le monde. Mais certains craignent ce qu’implique un plus grand besoin d’indépendance et de concurrence sur le marché du travail par rapport aux revenus que leur offrait auparavant l’État du simple fait de leur « droit de naissance ». Cela alimente une colère populiste dans certains pays.


Dans quelle mesure cette perception a-t-elle évolué au cours de ces dernières années ?

Il y a eu un appétit croissant pour le changement. En fait, les troubles politiques de 2011 ont été alimentés en partie par des jeunes qui ont compris que le modèle économique existant n’était pas durable et qui ont cherché un changement politique pour imposer une plus grande responsabilité (des dirigeants) et pour donner plus de pouvoir à la population. Aujourd’hui, l’austérité économique a été imposée sans émancipation politique, mais les dirigeants du Golfe n’ont pas été attentifs au mécontentement public. Les moyens de dissidence ont été renforcés, mais en même temps, il y a une sensibilité accrue à la réaction négative du public. Les mesures visant à réduire les prestations et à augmenter les impôts ont souvent été inversées.


(Dans la même série : 2 - Le Golfe, une région durablement stratégique ?)



Dans quelle mesure ces réformes pourraient-elles être accompagnées de changements dans la sphère religieuse ?

Les changements économiques ont souvent été accompagnés de changements sociaux. Les dirigeants cherchent à intégrer les femmes au marché du travail et à développer l’économie dans de nouveaux domaines, tels que le tourisme. Ceci est particulièrement vrai en Arabie saoudite, où les dirigeants ont changé les bases de la légitimité politique, desserré l’étreinte religieuse et mobilisé la population à travers le nationalisme. Pourtant, les plus petits et les plus riches États du Golfe, les Émirats arabes unis et le Qatar, ont déjà procédé à certains de ces mêmes changements – étendre l’éducation, renforcer le rôle public des femmes – sans toutefois devoir gérer le même degré de dépendance vis-à-vis d’un établissement religieux formel.


Cette transition pourrait-elle mettre en péril leur modèle autoritaire ?

Il existe certainement des dangers inhérents à cette transition économique. Mais il y a aussi des dangers à ne pas s’adapter. Les monarques du Golfe ont misé sur un certain degré de politique personnaliste et sur le bien-être du pays, ce qui ne sera pas réalisable avec la croissance démographique et les bouleversements fondamentaux dans les marchés mondiaux de l’énergie. À l’heure actuelle, nous assistons à une transition du modèle et de l’image autoritaires avec des monarques présentés comme des dirigeants nationalistes plutôt que comme des prestataires de services. Il reste à voir si ce nouveau cadre politique engage de manière adéquate les publics du Golfe, de manière à les enrichir et à contribuer à la stabilité politique.


Les transitions amorcées par les pays du Golfe pour promouvoir des voies alternatives au pétrole afin de pérenniser leur avenir secouent les sociétés de la région. Les projets de développement « Visions » incluent tous une diversification économique allant de pair avec des changements sociaux et sociétaux profonds. Une opération délicate pour les autocrates de la péninsule...

commentaires (3)

DE QUEL CHANGEMENT IL EN EST QUESTION ? DE L,OBSCURANTISME INNE A L,OBSCURANTISME PROGRAMÉ. CAD DE CHARYBDE EN SCYLLA. ET LORSQUE LES HYDROCARBURES S,EPUISERONT LES CHAMEAUX REMPLACERONT LES CADILLACS ET LES TENTES LES GRATTECIELS.

LA LIBRE EXPRESSION

19 h 35, le 07 septembre 2019

Tous les commentaires

Commentaires (3)

  • DE QUEL CHANGEMENT IL EN EST QUESTION ? DE L,OBSCURANTISME INNE A L,OBSCURANTISME PROGRAMÉ. CAD DE CHARYBDE EN SCYLLA. ET LORSQUE LES HYDROCARBURES S,EPUISERONT LES CHAMEAUX REMPLACERONT LES CADILLACS ET LES TENTES LES GRATTECIELS.

    LA LIBRE EXPRESSION

    19 h 35, le 07 septembre 2019

  • C'est jurassique park.

    FRIK-A-FRAK

    14 h 40, le 07 septembre 2019

  • le changement dans cette société fossilisée,se produira lorsque les poules auront des dents......

    HIJAZI ABDULRAHIM

    14 h 11, le 07 septembre 2019

Retour en haut