L’ex-président français Nicolas Sarkozy à Paris en avril 2018. Éric Piermont/AFP
Pour la première fois sous la Ve République, un ancien président sera jugé pour corruption en France : la justice a définitivement validé le renvoi de Nicolas Sarkozy devant le tribunal correctionnel dans l’affaire dite des « écoutes ». La Cour de cassation a rejeté mardi les derniers recours formés par l’ancien chef de l’État, son avocat et ami Thierry Herzog et l’ex-haut magistrat Gilbert Azibert, qui tentaient d’éviter un procès. Le procès de Nicolas Sarkozy, sur lequel pèse par ailleurs la menace d’un procès pour « financement illégal » de sa campagne de 2012, devrait se tenir dans les prochains mois à Paris. Aucune date n’est encore fixée. M. Sarkozy est retraité politique depuis fin 2016.
Il est soupçonné d’avoir tenté d’obtenir début 2014, via son avocat Thierry Herzog, des informations secrètes auprès de Gilbert Azibert dans une procédure concernant la saisie de ses agendas dans l’affaire Bettencourt (une affaire de dons octroyés à l’ancien parti de droite UMP par la richissime héritière du groupe L’Oréal Liliane Bettencourt) – soldée pour lui par un non-lieu en 2013 – en échange d’un coup de pouce pour un poste prestigieux à Monaco. Au terme de leur instruction, émaillée de nombreux recours, les juges français avaient ordonné le 26 mars 2018 un procès pour « corruption » et « trafic d’influence » contre les trois hommes, conformément aux réquisitions du parquet national financier (PNF) en octobre 2017. MM. Herzog et Azibert seront aussi jugés pour « violation du secret professionnel ». Dans un réquisitoire sévère, le 5 octobre 2017, le PNF avait comparé les méthodes de Nicolas Sarkozy à celles d’« un délinquant chevronné » et a stigmatisé les nombreux recours intentés par ses avocats qui avaient « paralysé » l’instruction. L’affaire trouvait son origine dans les interceptions de conversations téléphoniques de l’ex-chef de l’État avec son avocat, diligentées dans le cadre d’une autre enquête, celle sur les accusations de financement libyen de sa campagne de 2007. Grâce à ces écoutes, les policiers avaient notamment découvert que Nicolas Sarkozy utilisait un portable secret ouvert au moyen d’une carte prépayée sous l’alias de « Paul Bismuth » pour communiquer avec un unique interlocuteur : son avocat. D’après les conversations enregistrées, Nicolas Sarkozy semblait s’engager à intervenir en faveur de Gilbert Azibert pour un poste de prestige à Monaco – qu’il n’a finalement jamais eu. Nicolas Sarkozy avait renoncé à cette démarche au dernier moment, toujours d’après ces écoutes. Pour les enquêteurs, ce revirement peut s’expliquer par le fait que Nicolas Sarkozy et Thierry Herzog venaient d’apprendre que leurs téléphones secrets avaient été placés sur écoute.
Source : AFP