Onze nouvelles photos rendues publiques par le Pentagone et visant à incriminer l’Iran après l’attaque contre des pétroliers en mer de Oman. US Navy/Handout via Reuters
Les États-Unis ont encore renforcé leur dispositif militaire au Moyen-Orient après l’annonce par l’Iran qu’il franchirait bientôt une limite prévue par l’accord sur son programme nucléaire. « Les récentes attaques iraniennes valident les renseignements fiables et crédibles que nous avons reçus sur le comportement hostile des forces iraniennes », a indiqué le chef du Pentagone Patrick Shanahan. « Les États-Unis ne cherchent pas à entrer en conflit avec l’Iran », a-t-il souligné.
« J’ai autorisé l’envoi de 1 000 militaires supplémentaires à des fins défensives pour répondre à des menaces aériennes, navales et terrestres au Moyen-Orient », a précisé M. Shanahan, assurant que les États-Unis « continueront de surveiller consciencieusement la situation » afin « d’ajuster le niveau des troupes » le cas échéant. De son côté, le secrétaire d’État américain, Mike Pompeo, a affirmé hier que les États-Unis doivent être en « capacité de répondre » à une éventuelle attaque de l’Iran contre des intérêts américains dans le Golfe. Le chef de la diplomatie a rencontré dans la ville de Tampa les responsables du commandement central du Pentagone. Ce déploiement doit « convaincre le gouvernement islamique de l’Iran que nous sommes déterminés et pour les dissuader de (commettre) de nouvelles agressions dans la région », a-t-il expliqué. « Nous devons être prêts à répondre à toute menace de l’Iran », a-t-il ajouté, tout en assurant que « le président Trump ne (voulait) pas la guerre » avec l’Iran.
L’annonce américaine est intervenue peu après la publication par son ministère de nouveaux documents accusant l’Iran d’avoir attaqué deux pétroliers en mer de Oman. Onze nouvelles photos rendues publiques par le Pentagone montrent notamment un objet métallique circulaire de près de huit centimètres de diamètre, attaché à la coque du pétrolier japonais Kokuka Courageous et présenté comme un des aimants ayant permis de poser la mine non explosée que Washington accuse les Iraniens d’avoir retirée après l’incident survenu le 13 juin. Une autre de ces photos, prises d’un hélicoptère Seahawk de l’US Navy, montre la cavité provoquée par une seconde mine apposée sur la coque du même pétrolier, que le Pentagone évalue à plus d’un mètre de diamètre. « L’Iran est responsable de cette attaque, comme le montrent les preuves vidéo et les ressources et les compétences requises pour retirer rapidement la mine aimantée non explosée », a indiqué le Pentagone dans un communiqué.
Londres a aussi incriminé Téhéran, mais l’Union européenne a refusé de s’aligner sur les conclusions de Washington.
L’Iran ne veut pas la guerre
« L’Iran ne veut faire la guerre à aucun pays », a assuré le président Hassan Rohani, après l’annonce de l’envoi de renforts militaires américains au Moyen-Orient. « Nous avons en face de nous un groupe de dirigeants avec une très faible expérience, a-t-il poursuivi. Malgré tous les efforts des Américains dans la région et leur volonté de couper tous nos liens avec le monde pour isoler l’Iran, ils ont échoué. »
La crainte d’une confrontation armée entre l’Iran et les États-Unis s’est accrue depuis les attaques, la semaine dernière, de deux pétroliers dans le golfe de Oman, près du détroit d’Ormuz.
Dans une interview accordée au Time Magazine, Donald Trump semble néanmoins minimiser l’hypothèse d’une réponse militaire aux attaques de pétroliers, dont il juge l’impact « mineur ». Interrogé sur sa réaction si l’Iran cherchait à obtenir la bombe atomique ou à bloquer le détroit d’Ormuz, il répond : « J’interviendrais certainement (militairement) pour l’arme nucléaire, pour le reste la question reste posée. »
Espions
Sur un autre plan, l’Iran a affirmé hier avoir démantelé un « nouveau réseau » d’espions agissant pour le compte des États-Unis. « Sur la base de nos propres renseignements et d’indices collectés au sein des services américains, nous avons récemment découvert les nouvelles recrues embauchées par les Américains et démantelé ce nouveau réseau », a annoncé l’agence officielle iranienne IRNA, en citant sans l’identifier le « chef du contre-espionnage au ministère des Renseignements ». Certains espions du réseau mis sur pied, selon IRNA, par l’Agence centrale des renseignements des États-Unis (CIA), ont déjà été arrêtés et remis à la justice. L’agence ne donne toutefois aucun chiffre et ne précise pas la nationalité des suspects.
Dans cette période de tension, l’Iran a annoncé lundi qu’il dépasserait la semaine prochaine le plafond d’uranium faiblement enrichi qu’il est autorisé à stocker aux termes de l’accord de 2015 sur son programme nucléaire. Téhéran a cependant souligné que les pays européens pouvaient encore sauver l’accord.
Le président français, Emmanuel Macron, a appelé Téhéran à être « patient et responsable », souhaitant éviter une « escalade » alors que Paris œuvre laborieusement pour maintenir vivant l’accord de Vienne.
Mise en garde de la Russie
La Russie a demandé de son côté aux États-Unis de renoncer à leurs « projets provocateurs » et à ne pas déployer d’autres soldats au Moyen-Orient. Le vice-ministre des Affaires étrangères russe, Sergueï Riabkov, a rappelé que son pays n’avait cessé de mettre en garde Washington et ses alliés régionaux contre la tentation d’« alimenter de façon irréfléchie et imprudente les tensions dans une région explosive ». « Nous assistons aujourd’hui aux tentatives américaines d’augmenter les pressions politiques, psychologiques, économiques et même militaires sur l’Iran, d’une manière vraiment provocatrice », a affirmé Sergueï Riabkov. « Ce comportement ne peut être considéré que comme un moyen délibéré de provoquer une guerre », a-t-il ajouté.
La Chine a également fait part de ses « vives inquiétudes » face à ce regain de tension et a appelé toutes les parties à la modération afin de ne pas « ouvrir la boîte de Pandore ». Pékin a notamment appelé Washington à « revenir sur ses méthodes de pression ».
Sources : agences