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Moyen Orient et Monde - Entretien

« Mettre les sciences et la technologie au cœur de notre compréhension des risques de catastrophes »

Rencontré en marge de la Plate-forme mondiale de l’UNDRR à Genève, Chadi Abdallah, chercheur au centre de télédétection du CNRS libanais, explique comment toute compréhension du risque doit passer par la recherche.


Chadi Abdallah, chercheur et chef du centre de télédétection du Conseil national de la recherche scientifique au Liban (CNRS). Photo S. B.

Dans les couloirs du centre international de Genève où se déroule la Plate-forme mondiale pour la réduction des risques de catastrophes 2019, organisée du 15 au 17 mai à Genève par le bureau des Nations unies sur la réduction du risque (UNDRR), Chadi Abdallah, chercheur au centre de télédétection du Conseil national de la recherche scientifique au Liban (CNRS), défend résolument la place des sciences et de la technologie dans la prévention des risques.

« Les sciences sont essentielles dans la réduction des risques, et voilà pourquoi elles figurent en bonne place dans toutes les priorités du cadre de travail de Sendai (cadre international adopté en 2015 pour quinze ans), affirme-t-il à L’Orient-Le Jour. Nous ne pouvons parler de risques sans revenir aux sciences et aux preuves récoltées par la recherche, afin de pouvoir limiter les dangers que nous aurions ainsi définis. »

Le scientifique donne l’exemple des glissements de terrain, qui peuvent être extrêmement dévastateurs. « Je ne peux traiter ce problème et ses conséquences sans auparavant effectuer un plan directeur d’une zone donnée, affirme-t-il. Pour cela, j’utilise les technologies à ma disposition comme la télédétection (par satellite). Après cette première mesure interviennent les études scientifiques, qui permettront de déterminer, suivant le même exemple, les normes des bâtiments à construire dans cette zone, sur base des données relatives aux risques de glissement, allant jusqu’à l’interdiction de bâtir si c’est nécessaire. »


(Lire aussi : Comment l’intégration du risque de catastrophes peut sauver le développement durable)


Un dollar dans la prévention, sept de moins dans la reconstruction

Dans de tels cas, il faut que la décision politique suive… « C’est l’un des principaux problèmes auxquels nous faisons face, celle de l’alignement des politiques aux recherches scientifiques, souligne le chercheur. Il est difficile de convaincre les décideurs, et pour cela, le meilleur argument reste l’argument économique : il convient de montrer à quel point il sera coûteux de prévoir des indemnités en cas de catastrophe naturelle, et combien la prévention serait plus économique. Les dernières recherches ont montré qu’un dollar investi dans la prévention économise sept dollars à verser en cas de catastrophe. »

L’un des grands risques rencontrés au Liban et dans d’autres pays est celui des inondations, exacerbé par les changements dans les régimes de précipitations notamment. « Ma première mission est d’informer la population du danger, c’est le rôle du scientifique, souligne M. Abdallah. Cette mesure doit s’accompagner de plans directeurs réalisés sur base des risques potentiels, qui donneraient la priorité absolue aux vies humaines. Suivent les mesures pratiques qui visent à déterminer quels sont les terrains inondables et quelles sont les mesures recommandées dans leur cas. Comme exemple de coordination, le CNRS a les cartes qui permettent de déterminer les zones inondables, et les fournit aux différents ministères. »

Un groupe arabe de chercheurs

Sur un plan international, et sous l’égide de l’UNDRR, des Groupes de conseillers sur les sciences et technologies (STAG) ont été créés dans les différentes régions du monde, dont la région arabe. Ces groupes de scientifiques, spécialistes de disciplines liées à la gestion du risque, devront remplir le rôle de synthétiser les informations sur le risque et d’en informer les décideurs. « Le STAG arabe dont j’ai été désigné président a été créé au Liban. Il occupe une place de pionnier dans la région, et son siège est désormais au CNRS libanais », précise-t-il.

Il ajoute : « Le STAG pourra être consulté par les gouvernements arabes en cas de besoin, en vue de mesures à prendre pour réduire les risques de manière préventive. Nous avons défini une feuille de route assortie d’un engagement volontaire visant à déterminer les lacunes dans les pays arabes. Notre premier rapport devrait être publié en fin d’année pour déterminer la place des sciences et technologies dans ces pays, et nous devrions fournir des rapports annuels. Nous espérons aussi que Beyrouth accueillera d’ici à la fin de l’année un grand congrès sur la synchronisation entre sciences et technologie d’une part et gestion des risques d’autre part. »





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