Afghanistan : les talibans moquent la liste pléthorique de délégués de Kaboul, la rencontre de Doha en péril

La rencontre entre représentants afghans et talibans prévue cette semaine à Doha semble prendre l'eau avant même d'avoir débuté, les insurgés moquant mercredi la volonté gouvernementale d'y envoyer pas moins de 250 délégués.

"Les créateurs de la liste de Kaboul doivent réaliser que cette conférence va se dérouler dans un pays étranger éloigné, ce n'est pas une invitation à un mariage ou à une fête dans un hôtel de Kaboul", a déclaré leur porte-parole Zabihullah Mujahid dans un communiqué. Une telle initiative n'est pas "normale" et les talibans "n'ont pas l'intention" de rencontrer autant de gens, a-t-il ajouté.

Les services du président afghan Ashraf Ghani ont publié mardi une liste de 250 délégués, dont des représentants du gouvernement, appelés à rencontrer les talibans à Doha, dans ce qui pourrait devenir le dialogue de plus haut niveau depuis des années entre les ennemis jurés.

Les insurgés, qui voient M. Ghani comme un laquais de Washington, continuent d'affirmer dans ce document qu'ils ne négocieront pas avec Kaboul, dont les envoyés ne seront impliqués "qu'à titre personnel".

Certaines personnalités annoncées par la présidence afghane ont également indiqué qu'elles n'iraient pas à Doha. L'homme fort du Nord, Atta Mohammad Noor, figure-clé de l'opposition, a ainsi décliné l'invitation, qualifiant la liste présidentielle d'"acte intentionnel de sabotage des efforts de paix".

Pour un représentant taliban au Pakistan, interrogé par l'AFP, le nombre de délégués montre que "les Américains et leurs marionnettes du gouvernement afghan ne sont pas sérieux quant à une résolution pacifique" du conflit.

Les Etats-Unis mènent de leur côté depuis l'été dernier des négociations bilatérales avec les rebelles au Qatar. Le dialogue inter-afghan de ce week-end, auquel ils ne devraient pas participer, s'inscrit dans le cadre de cet effort diplomatique.

Une liste de délégués aussi longue "n'est pas réaliste", a déclaré à l'AFP Rahimullah Yusufzai, expert reconnu des talibans. "J'ai vu dans la liste des gens qui n'ont aucune influence. Il faut choisir. 250, ce n'est pas gérable", a-t-il observé, expliquant ce nombre par l'élection présidentielle de septembre prochain. Kaboul ne veut selon lui "mécontenter personne".
Rahimullah Yusufzai s'attend à ce que la conférence soit reportée, même si trouver une date sera malaisé avant le ramadan, qui démarre en mai.

Parallèlement à ces discussions, les talibans ont annoncé la semaine dernière le début de leur offensive de printemps. Des attaques meurtrières ont été rapportées dans plusieurs provinces d'Afghanistan.