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Moyen Orient et Monde - Algérie

Le camp Bouteflika se fissure, estiment les analystes

Le Front de libération nationale a apporté hier publiquement son soutien au « mouvement populaire », tout en prônant le dialogue proposé par le chef de l’État algérien pour sortir d’une crise qui dure depuis un mois.

Des protestataires arborant drapeaux et banderoles lors d’une manifestation appelant le président Abdelaziz Bouteflika à démissionner, à Alger, le 19 mars 2019. Ramzi Boudina/Reuters

Le camp du président Abdelaziz Bouteflika continuait hier de se fissurer face à la contestation sans précédent dont est la cible depuis un mois le chef de l’État algérien, qui apparaît de plus en plus isolé, estiment des analystes.

Depuis quelques semaines, les craquelures apparaissaient déjà au grand jour au sein de deux piliers du pouvoir : la centrale syndicale UGTA (Union générale des travailleurs algériens) et l’organisation patronale FCE (Forum des chefs d’entreprise).

Hier, c’est le propre parti du président Bouteflika, le Front de libération nationale (FLN), qui a apporté publiquement son soutien au « mouvement populaire », tout en prônant le dialogue proposé par le chef de l’État pour sortir d’une crise qui dure depuis un mois. « Les militants du FLN soutiennent pleinement le mouvement populaire » de contestation, par lequel « le peuple a demandé, à travers des marches gigantesques, le changement », a déclaré à la presse Mouad Bouchareb, patron du parti, à l’issue d’une réunion de responsables de sections, décrite comme houleuse par plusieurs médias. « Il faut se mettre autour d’une table de dialogue pour arriver à une Algérie nouvelle », a néanmoins précisé M. Bouchareb, soulignant que M. Bouteflika, président du parti, avait annoncé « clairement qu’il allait vers un changement du système ».


(Lire aussi : Etudiants et professionnels de Santé défilent contre Bouteflika à Alger)


Forces non constitutionnelles
Pour tenter de calmer la contestation, inédite, M. Bouteflika, à la tête de l’État depuis 20 ans, a récemment annoncé la mise sur pied, à une date pas encore fixée, d’une conférence nationale, « ouverte à tous » et chargée de réformer le pays et de proposer une nouvelle Constitution. En attendant, il a reporté la présidentielle prévue le 18 avril, prolongeant de fait son mandat au-delà de son expiration le 28 avril. Des mesures rejetées par les manifestants descendus en masse dans les rues depuis le 22 février et qui continuent de réclamer d’abord le départ du chef de l’État et celui du « système » au pouvoir.

Plusieurs cadres ou élus du FLN avaient déjà publiquement fait défection depuis le début du mouvement de contestation et l’autorité de M. Bouchareb est fortement contestée au sein de l’ancien parti unique, au pouvoir sans interruption depuis l’indépendance de l’Algérie en 1962.

Principal allié du FLN au sein de la majorité présidentielle, le Rassemblement national démocratique (RND) se lézarde également. Mardi soir, son porte-parole Seddik Chihab a publiquement affirmé que le parti s’était « trompé » en soutenant la candidature de M. Bouteflika à un 5e mandat, qui avait jeté les Algériens dans la rue. Plus grave, il a également accusé des « forces non constitutionnelles » de diriger le pays, disant ne pas savoir qui décide « réellement » à la présidence.
Un discours tenu habituellement par les plus féroces opposants à M. Bouteflika, 82 ans, affaibli par les séquelles d’un AVC qui, depuis 2013, l’ont empêché de s’adresser de vive voix aux Algériens et ont rendu rares ses apparitions publiques. Même si le RND, dirigé par l’ex-Premier ministre Ahmed Ouyahia, fidèle du chef de l’État récemment sacrifié à la colère populaire, a estimé que M. Chihab « avait perdu la maîtrise de ses nerfs » et assuré continuer de soutenir le plan présidentiel de sortie de crise, le mal est fait.


(Lire aussi : Bouteflika confirme qu'il restera président après l'expiration de son mandat)


Sauver les meubles
« Bouteflika est en train de perdre la main et chacun essaye de sauver les meubles », a expliqué Rachid Grim, enseignant en sciences politiques à l’Institut supérieur de gestion et de planification (ISGP) d’Alger. Il « n’a plus de base, le peuple l’a lâché. Tout le monde le lâche. »

Mohamed Hennad, ancien professeur de sciences politiques à l’université d’Alger, voit dans les récentes déclarations du FLN, après celles du porte-parole du RND, « un signe supplémentaire de l’effondrement du système et que le changement est proche ».

L’ensemble du camp présidentiel semble désormais prendre l’eau. À l’UGTA, unique interlocuteur syndical jugé « représentatif » par les autorités, qui revendique 3 millions d’adhérents, c’est l’hémorragie. Des dizaines de sections locales ou de syndicats affiliés ont dénoncé ces dernières semaines l’autorité du secrétaire général Abdelmadjid Sidi Saïd, thuriféraire du chef de l’État, et ses exhortations au 5e mandat du président. Mais aussi ses supposées compromissions avec le FCE de Ali Haddad, patron des patrons, proche du clan présidentiel et qui avait aussi apporté le soutien inconditionnel de son organisation, où les démissions se multiplient, à un nouveau quinquennat.


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