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Culture - Exposition

David et Nicolas, les Daft Punk du design

Alors qu’ils présentent en ce moment « Supernova »*, leur premier solo show new-yorkais aux accents lunaires, les deux Libanais marquent d’une pierre blanche leur ascension sur la scène du design mondial tout en continuant à définir les contours de leur œuvre qui puise dans le passé pour mieux interroger le futur...

David Raffoul et Nicolas Moussallem dans l’espace de la galerie new-yorkaise Carpenters Workshop Gallery. Photo Matt Harrington/Carpenters Workshop Gallery

En mai 2013, après un long silence, les Daft Punk sortaient leur immense disque Random Access Memories, enflammant aussitôt les rayons musique du monde entier. Pendant ce temps à Beyrouth, David Raffoul et Nicolas Moussallem, qui faisaient leurs premiers pas de designers – fruit de leur rencontre décisive en 2006 –, recevaient les vibrations de cette musique futuriste et branchée. Les deux garçons dans le vent ont ainsi bu à la source de cet album, « on est obsédés par tout ce qu’il représente », disent-ils en chœur, ne soupçonnant pas un instant que celui-ci trouverait un jour un écho dans leur œuvre, comme c’est le cas aujourd’hui. C’est qu’en atterrissant au 19e étage du 693 Fifth Avenue, dans l’espace de la Carpenters Workshop Gallery qui accueille en ce moment le solo show du binôme libanais, on pourrait presque penser que les deux fées (casquées) des Daft Punk se sont penchées sur le berceau de David et Nicolas, tant l’installation et les meubles de leur Supernova semblent empreints de ce même onirisme étrange qui cristallise le passé en l’enveloppant dans un écrin résolument contemporain.


La vie et la mort d’une étoile

Hormis, donc, les sonorités à la fois psychédéliques et nostalgiques de Random Acces Memories qui ont longtemps résonné dans leurs tympans, David et Nicolas confient aussi qu’ils sont « fascinés par l’espace, d’un point de vue esthétique et physique ». Précisions : « L’ampleur de l’univers ainsi que la science-fiction ont toujours été de fortes sources d’inspiration de notre travail. » D’où la recette (explosive) de leur Supernova qui emprunte son titre au phénomène physique qui survient lorsqu’une étoile, en implosant, donne naissance à une déferlante de lumière, une nouvelle étoile en somme, théoriquement produite par les débris de l’explosion.

Et de nuancer : « Ici, nous utilisons ce phénomène naturel pour parler d’un sujet qui nous intéresse beaucoup : la transformation. La mort d’une étoile n’est en fait qu’une transformation, elle représente la nouvelle vie. » Une renaissance qui surgit comme un écho lointain à leur Beyrouth, cette ville mille fois morte puis mille fois resurgie de ses propres agonies, cette ville où, le tandem le regrette amèrement, « il n’y a plus, pour nous les jeunes, le luxe de l’espoir ». Supernova raconte donc la nostalgie de ce qui a été, tout en regardant vers ce qui reste à venir, à créer.

Et trace en filigrane les contours d’une esthétique rétro futuriste où se télescopent des influences du design des années 50 et 60, « toutes les racines de notre esthétique orientale, à la croisée des civilisations qui ont fleuri dans notre partie du monde et qu’on oublie malheureusement, à force de regarder l’Occident », et une géométrie fluide qu’on dirait provoquée par un atterrissage lunaire.


« Monocle » et « Constellation »

Ainsi, comme échouées, voire parachutées dans l’espace de la Carpenters Workshop dont l’éclairage feutré confère davantage à l’installation des accents intergalactiques, les dix pièces présentées – et sur lesquelles ont œuvré plus de 15 artisans issus de 21 ateliers de la région de Trévise, au nord de l’Italie – sont réparties en deux sous-séries : « Monocle », deux déclinaisons de consoles exposées chez Nilufar en 2016, et « Constellation », dont les tables, tapis et la bibliothèque murale interrogent la science par le biais du design. Par-delà ces empilements de volumes surdimensionnés (une innovation chez le binôme David/Nicolas), c’est aussi et surtout grâce au métissage de matériaux que les pièces « font penser à des robots ou des vaisseaux spatiaux », comme se plaisent à dire les designers.

Les éclats de laiton sur la surface des tables apparaissent comme un essaim d’étoiles, et la texture du travertin (cette roche calcaire) n’est pas sans rappeler celle de la lune. Le bois de palmier, le granadillo ou le chêne sont striés; sur le tapis Million Miles Away, soie et laine s’entrelacent, la légèreté du verre fait planer tables et consoles, et on se prend à rêver d’un

ailleurs, situé quelque part dans le trip mental de David et Nicolas.

Le binôme libanais, sélectionné pour le prix Edida (Elle Déco International Design Awards) dans la catégorie Designer de l’année, a tout de même réussi le pari de s’envoler, de s’élever tout en se remettant sans cesse en question et gardant éternellement ses

pieds sur terre.

*« Supernova », David/Nicolas, jusqu’au 14 avril 2019 à la Carpenter’s Workshop Gallery, 693, Fifth Avenue, New York.


Pour mémoire

David et Nicolas chez Loulou et Hoda!

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