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Nos Lecteurs ont la Parole - Dominique EDDÉ

Hold-up ?

Il y a des jours où l’histoire s’écrit toute seule, d’un trait ; sans un mot de trop, sans un temps mort, comme dans une bonne pièce de théâtre. Ce moment m’est arrivé le 19 décembre alors que je me rendais porte Saint-Martin à Paris pour y voir précisément une… pièce de théâtre : Tartuffe mis en scène par Stein, magnifiquement joué par Arditi et Weber. J’y allais en compagnie d’une amie, l’architecte Hala Wardé, qui m’apprenait en chemin qu’un article du New York Times annonçait le matin même la nomination par le BeMA de l’architecte Amale Andraos au rang de responsable du projet de construction du Musée d’Art Moderne à Beyrouth. Ce projet qui avait fait l’objet d’un concours, mobilisant un jury international de haut niveau, avait été remporté haut la main par Hala Wardé en août 2016. Deux ans plus tard, Maher Mikati, membre du BeMA, lui signifiait la rupture du lien qui les engageait auprès d’elle. L’artiste Etel Adnan faisait part de son indignation dans les colonnes de L’Orient-Le-Jour le 9 octobre 2018. « Pourquoi un jury a t-il été sélectionné s’il fallait bafouer ses décisions ? » demandait-elle notamment. Un autre article du journal, signé May Makarem le 26 novembre dernier, reposait la question restée en plan : pourquoi la lauréate était-elle écartée ? Aucune réponse n’était apportée. Rien. Silence général. Je ne sais si le projet d’un Musée d’Art Moderne a un sens à Beyrouth, à l’heure qu’il est. Pour quelles collections, quel contenu ? Je ne sais pas non plus quels sont les enjeux, les protagonistes, les tenants, les aboutissants. Je l’ignore pour la bonne raison que les responsables ne veulent rien nous en dire. Ce dont je suis sûre en revanche c’est qu’en l’état de ce que nous savons, cette nomination après dégommage ressemble en tout à un hold-up. À ceux qui en sont les auteurs de nous informer du contraire s’ils en ont les moyens. S’ils s’enferment dans leur silence, on aura compris qu’il s’agit bien d’un hold-up et qu’ils nous traitent, nous le public, comme Tartuffe traitait Orgon. Ce ne sera pas une première au Liban. Loin de là. Mais dans la mesure où nous ne commencerons à revendiquer nos droits qu’en balayant devant nos portes, je balaye ici devant la mienne et je vous demande ceci, Mesdames et Messieurs les responsables du bâtiment : le Musée d’Art Moderne de Beyrouth a-t-il clairement choisi de consacrer Tartuffe et de de se moquer de Molière ? RSVP.


Il y a des jours où l’histoire s’écrit toute seule, d’un trait ; sans un mot de trop, sans un temps mort, comme dans une bonne pièce de théâtre. Ce moment m’est arrivé le 19 décembre alors que je me rendais porte Saint-Martin à Paris pour y voir précisément une… pièce de théâtre : Tartuffe mis en scène par Stein, magnifiquement joué par Arditi et Weber. J’y allais...

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Comment imaginer, après que Hala Wardé a remporté le concours d’architecture du BeMA, que puisse encore l’accompagner l’idée de concurrents ? Comment la négociation avec les commanditaires du projet pourrait-elle être de bonne foi si, sous la table des négociations, on apprend qu’ils avaient toujours dissimulé une arme et pointé son canon vers l’architecte ? On ne peut pas conclure des négociations en faisant sauter la table des négociations et en tuant l’architecte. Si les concurrents de HW ont été éliminés au moment de la déclamation des résultats du concours d’architecture par le jury international, ils ne peuvent pas continuer à rôder, dans le temps, autour des négociations. Les négociations entre HW et le BeMA ne pourraient, a posteriori, être reconnues équitables et de bonne foi que si Hala Wardé avait été a priori consciente de la possibilité que son interlocuteur puisse faire jouer la concurrence APRÈS le concours, laquelle serait alors économique ou politique et non plus esthétique. Si la réalité se construit grâce à la vision de l’architecte et à la prouesse qui consiste à se projeter dans l’avenir et à en ramener le seul projet et si la construction se poursuit effectivement dans le processus de négociation, alors je vous laisse juges de la « réalité » et du « progrès » de l’autre projet. Si on le « choisit » maintenant, c’est dans le vide absolu où il n’y a plus aucun fond et aucun critère de jugement. D’où le danger absolu

Ayache Elie

11 h 21, le 31 décembre 2018

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Commentaires (5)

  • Comment imaginer, après que Hala Wardé a remporté le concours d’architecture du BeMA, que puisse encore l’accompagner l’idée de concurrents ? Comment la négociation avec les commanditaires du projet pourrait-elle être de bonne foi si, sous la table des négociations, on apprend qu’ils avaient toujours dissimulé une arme et pointé son canon vers l’architecte ? On ne peut pas conclure des négociations en faisant sauter la table des négociations et en tuant l’architecte. Si les concurrents de HW ont été éliminés au moment de la déclamation des résultats du concours d’architecture par le jury international, ils ne peuvent pas continuer à rôder, dans le temps, autour des négociations. Les négociations entre HW et le BeMA ne pourraient, a posteriori, être reconnues équitables et de bonne foi que si Hala Wardé avait été a priori consciente de la possibilité que son interlocuteur puisse faire jouer la concurrence APRÈS le concours, laquelle serait alors économique ou politique et non plus esthétique. Si la réalité se construit grâce à la vision de l’architecte et à la prouesse qui consiste à se projeter dans l’avenir et à en ramener le seul projet et si la construction se poursuit effectivement dans le processus de négociation, alors je vous laisse juges de la « réalité » et du « progrès » de l’autre projet. Si on le « choisit » maintenant, c’est dans le vide absolu où il n’y a plus aucun fond et aucun critère de jugement. D’où le danger absolu

    Ayache Elie

    11 h 21, le 31 décembre 2018

  • Le musée est censé être le lieu du savoir et de la culture, au lieu de quoi on nous plonge dans l’ignorance. Une réponse de la part du BeMA s’impose.

    Dina HAIDAR

    20 h 39, le 26 décembre 2018

  • Je ne saurais juger du fond de cette affaire mais sur la forme il y a un vrai problème! Le jury du BeMA nous doit des explications. Merci, Philippe Helou

    Philippe Helou 1276

    22 h 46, le 24 décembre 2018

  • Il suffit de consulter les propres critères de choix du jury du BeMA en 2016 pour comprendre à quel point la décision de dessaisir Hala Wardé de sa victoire méritée est aussi injuste qu’inquiétante. L’explication mettait alors en valeur la façon dont le projet associait art et société à travers une succession de paysages, et expliquait plus loin comment la connexion entre les jardins, l’amphithéâtre et les espaces d’exposition promettait une fusion entre l’art et la vie de la communauté. Il faut savoir par ailleurs que le projet laissait la part belle à une exploitation commerciale vitale du terrain en question. Cet ensemble de promesses belles et équilibrées avait créé des attentes importantes et nous projetait déjà dans un magnifique quartier de musées au cœur même de Beyrouth. Les libanais ne méritent-ils plus tout ceci aujourd’hui? Ils méritent tout au moins, en effet, une explication claire et publique.

    Maroun Edde

    18 h 02, le 24 décembre 2018

  • RENDEZ-NOUS NOTRE JARDIN ! Nous nous réjouissions de voir Beyrouth se doter d'un magnifique jardin, au-dessus du projet du BeMA. Quelles initiatives obscures guident les pouvoirs décisionnaires pour non seulement écarter ce projet lauréat, mais également nous priver d'un bien public. Une fois de plus, le patrimoine de Beyrouth perd un petit bijou. C'est l'incompréhension. Le projet retenu est une extravagance d'architecte, une de plus, dans un paysage urbain chaotique. Nous, citoyens de Beyrouth, faisons une fois de plus les frais de décisions arbitraires.

    El Khoury Ilham

    13 h 58, le 24 décembre 2018

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