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Liban - Société

La carte de santé, une couverture médicale pour tous

La proposition de loi doit encore être votée au Parlement. En attendant, le ministère de la Santé a commencé à appliquer, en amont, certaines dispositions pour lesquelles existe un budget.

Une couverture médicale pour tous? C’est ce que promet la proposition de loi sur la carte de santé, présentée à la Chambre il y a quelques années, à l’initiative de l’ancien député Atef Majdalani, dans le cadre du programme médico-social du courant du Futur, dont il fait partie. Certains articles de la mouture initiale du texte de loi ont toutefois été modifiés « pour accélérer le processus de mise en place de la carte de santé », explique à L’Orient-Le Jour le ministre sortant de la Santé, Ghassan Hasbani.

Le texte initial prévoyait en fait de rattacher la carte de santé à « un comité et une caisse indépendants ». Des cotisations seront perçues pour alimenter cette caisse. « Pratiquement, c’est comme si on créait un nouveau tiers payant public, souligne M. Hasbani. Ce qui va à l’encontre du projet que nous espérons réaliser sur le long terme, à savoir celui d’unifier l’ensemble des tiers payants publics. Nous avons alors modifié le texte de manière à mieux organiser l’infrastructure dont nous disposons déjà. » Aussi l’idée de créer une caisse indépendante a-t-elle été annulée. De plus, le projet de carte de santé a été placé sous la tutelle du ministère de la Santé, ce qui permet d’éviter les cotisations.

Quels sont réellement les avantages de cette carte ? « Elle permet à tous les citoyens libanais, notamment à ceux qui ne bénéficient d’aucune couverture médicale, l’accès aux soins médicaux », souligne M. Hasbani. Plusieurs services répartis sur deux bouquets sont proposés à cet effet.

Le premier consiste à « ouvrir un dossier médical biométrique à tous les citoyens libanais, même ceux qui ont une assurance ou qui sont couverts par un tiers payant public dans l’un des centres de soins de santé primaire relevant du ministère et établis sur l’ensemble du territoire », précise-t-il. Ce sont des examens annuels routiniers et « obligatoires à tout citoyen libanais, quelle que soit la partie auprès de laquelle il est assuré ». « Cette mesure permet au médecin traitant d’accéder à ce dossier biométrique – avec le consentement du patient – et de le mettre à jour lorsque cela est nécessaire, précise M. Hasbani. Cette mesure est également susceptible de réduire la facture de tous les assureurs, puisqu’elle permet d’éviter une répétition inutile d’examens médicaux, mais aussi de dépister et de traiter précocement de nombreuses maladies chroniques, comme le diabète, l’hypercholestérolémie, les triglycérides, l’hypertension artérielle, des maladies cardio-vasculaires… Cela a pour effet de mieux contrôler la maladie, et par conséquent d’éviter les complications qui peuvent en découler. »

Le second bouquet est plus global et bénéficie exclusivement aux patients pris en charge par le ministère de la Santé et dont le nombre est estimé à 1,8 million de Libanais. En plus des examens routiniers obligatoires, ce bouquet inclut également une couverture hospitalière à raison de 90 % ou 100 %, selon les cas sociaux (handicapés, les plus démunis…), les frais des examens médicaux en externe dans les hôpitaux gouvernementaux à raison de 70 %, les médicaments des maladies chroniques et incurables. En ce qui concerne les médicaments pris de façon ponctuelle, ils sont couverts indirectement par le ministère à travers des associations, comme la YWCA (Young Women Christian Association), qui distribuent ces médicaments dans les dispensaires. « Ces médicaments sont assurés par le ministère », précise M. Hasbani.


(Lire aussi : Aoun appelle Hasbani à mettre en application la carte de santé une fois la loi adoptée)


Compléter la CNSS
Contrairement à certains malentendus qui ont entouré ce projet, M. Hasbani assure que la carte de santé ne va pas à l’encontre de la Caisse nationale de Sécurité sociale (CNSS). Au contraire, elle complète son rôle. « Le fait d’élargir le champ des groupes sociaux qui peuvent bénéficier des prestations de la CNSS permet de réduire la facture hospitalière du ministère de la Santé », souligne-t-il. Ainsi, la proposition de loi présentée en octobre dernier par Yassine Jaber et Anouar el-Khalil, députés du blocs parlementaire de Nabih Berry, pour amender certains articles de la loi sur la CNSS pour inclure les employeurs dans la liste des catégories pouvant bénéficier des prestations de cette caisse permettra d’alléger la facture du ministère de la Santé, puisque cette catégorie de patients, actuellement à la charge du ministère, sera couverte par la CNSS.

La carte de santé est presque gratuite. Seule la somme symbolique de 10 000 livres libanaises est prévue pour ouvrir un dossier médical biométrique. Ce qui soulève à juste titre la question du financement de la carte. Ce point a fait d’ailleurs l’objet d’une polémique lors des discussions de la proposition de loi par la commission des Finances et du Budget. Au final, plusieurs formules de financement ont été proposées et devront être discutées par le nouveau cabinet. Au nombre de ces propositions, le prélèvement d’un taux de 8 % sur la facture annuelle du téléphone mobile. « Il s’agit d’une contribution symbolique qui permet d’assurer une source de revenus et de soutenir le budget actuel de la santé », note M. Hasbani.

Quoi qu’il en soit, ce qui est sûr, selon le ministre sortant, c’est que la facture de la santé va aller crescendo au Liban pour moult raisons. Premièrement, la détection précoce de certaines maladies s’est améliorée, les gens sont de plus en plus soucieux de leur santé et consultent plus qu’avant. De plus, les médicaments sont de plus en plus onéreux, principalement ceux destinés à des traitements de maladies lourdes comme le cancer. Les nouvelles générations de médicaments sont plus efficaces, mais plus chères aussi. « Nous avons mené au ministère de la Santé une étude d’actuariat sur les changements démographiques et l’augmentation annuelle des frais de santé d’ici à 2050, note M. Hasbani. Il en ressort que sur le long terme, la carte de santé permettra d’économiser entre 30 % et 40 % sur la facture de santé. »


(Lire aussi : Carte de santé : la proposition de loi bientôt devant le Parlement)


Travail en amont
Aussi attendu soit-il, ce projet ne sera pas concrétisé tant que le nouveau gouvernement n’a pas vu le jour, puisque la proposition de loi doit encore être votée en séance plénière, « à moins qu’elle ne soit revêtue d’un caractère d’urgence et qu’elle ne soit inscrite par conséquent à l’ordre du jour de la nouvelle séance de législation de nécessité », et son mode de financement doit encore être résolu. Toutefois, le ministre de la Santé a déjà commencé à appliquer en amont certaines des mesures qu’elle prévoit et pour lesquelles il existe désormais un budget, comme le fait de couvrir les examens médicaux en externe, conformément à une décision prise dans ce sens par le ministre en novembre dernier. Le prix de ces examens est prévu dans le budget alloué à chaque hôpital gouvernemental.

De plus, grâce au projet de financement de la Banque mondiale en faveur de la résilience du système de santé au Liban, approuvé en juin 2017, « les dernières mesures sont en train d’être prises pour pouvoir entamer le processus d’ouverture de dossiers médicaux biométriques », avance M. Hasbani. D’une valeur de 150 millions de dollars sur une durée de cinq ans, ce projet de financement, rappelons-le, consiste à renforcer l’infrastructure des hôpitaux gouvernementaux et équiper les centres de soins de santé primaire sur l’ensemble du pays. « Dans un premier temps seront constitués les dossiers biométriques de quelque 300 000 personnes inscrites auprès du ministère des Affaires sociales et qui appartiennent aux souches les plus démunies », précise M. Hasbani. Et de noter : « Nous avons déjà mis sur les rails certaines dispositions prévues dans la proposition de loi sur la carte de santé. Cette loi reste toutefois nécessaire pour assurer la pérennité du projet. » En ce qui concerne le financement de la carte, il sera inclus dans un premier temps dans le budget du ministère « qui doit être de toute manière majoré puisque, actuellement, il ne suffit pas ». Dans cinq ans, lorsque le projet de la Banque mondiale prendra fin, « il faudrait prévoir un budget pour la carte dans la loi sur le budget annuel », conclut M. Hasbani.



Pour mémoire
Hasbani fait le point, pour « L’OLJ », sur le projet de la carte de santé

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DES PRESTATIONS SOCIALES MAIS QUI AUGMENTENT LA DETTE DU PAYS...

LA LIBRE EXPRESSION

07 h 08, le 17 décembre 2018

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  • DES PRESTATIONS SOCIALES MAIS QUI AUGMENTENT LA DETTE DU PAYS...

    LA LIBRE EXPRESSION

    07 h 08, le 17 décembre 2018

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