Après des mois et des mois de laborieuses tractations en vue de la répartition du butin (i.e. les portefeuilles ministériels), nous avions pensé que les grands patrons qui tiennent le pays en otage avaient finalement trouvé un accord qui leur permettrait de gouverner ensemble sans trop fâcher le Hezbollah et ses patrons irano-syriens. Et voilà qu’en un éclair, la mayonnaise gouvernementale a tourné. Rien ne va plus. Le Hezbollah exige qu’un sunnite de l’opposition (opposition à qui et à quoi ?) puisse bénéficier d’un portefeuille. Rebelote donc. Tout est à recommencer.
Qu’a dit, qu’a fait le président fort ? Il a pris acte semble-t-il de la situation de facto, ainsi que le Premier ministre désigné qui s’est envolé vers d’autres cieux. Pourquoi cette peau de banane au dernier moment ? Nul ne le saura et nul n’est supposé s’intéresser aux bas-fonds sordides de la politique libanaise pour le savoir.
Il est inutile d’analyser les tenants et les aboutissants d’un tel « couac », un de plus. Cela n’a aucun intérêt. L’essentiel n’est pas là. L’essentiel se résume en une question toute simple : y a-t-il un pilote dans l’avion ? L’avion Liban est-il conduit par un commandant-pilote assis aux commandes dans le cockpit ? Ou bien le Liban est-il devenu un de ces avions sans pilote, appelés drones, qui peuvent être télécommandés de n’importe où, fût-ce d’une autre planète ?
Jusqu’à plus ample informé, le Liban est, du moins sur le papier, un État de droit régi par une Constitution qui détermine la règle du jeu et qui demeure, en principe, la seule référence en matière de « pouvoir » et de « force » de telle ou telle haute fonction au sein de l’État.
On nous dit que le président actuel est particulièrement « fort » et qu’il est soucieux de travailler avec un Premier ministre tout aussi « fort ». L’un et l’autre tirent leur force non de la puissance de leurs biceps mais de la Constitution et des règles procédurales qu’elle prévoit. Dès lors, le président de la République n’a qu’une chose à faire, aujourd’hui avant demain : signer le décret de nomination du gouvernement conformément à la liste sur laquelle se sont accordés les acteurs de la sinistre farce gouvernementale.
Signez, Monsieur le Président, dans l’intérêt de la nation. Signez, conformément à la Constitution qui vous réserve le pouvoir de former un gouvernement avec le seul Premier ministre. Signez, puisque vous êtes fort. Signez, dotez le pays d’un gouvernement et advienne que pourra.
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Après des mois et des mois de laborieuses tractations en vue de la répartition du butin (i.e. les portefeuilles ministériels), nous avions pensé que les grands patrons qui tiennent le pays en otage avaient finalement trouvé un accord qui leur permettrait de gouverner ensemble sans trop fâcher le Hezbollah et ses patrons irano-syriens. Et voilà qu’en un éclair, la mayonnaise...
commentaires (5)
Mais voyons, Mr Kourban, le Président aurait signé depuis longtemps s’il avait les coudées franches et serait à égale distance de tous les protagonistes, un arbitre ultime quoi qui n’aurait que l’intérêt supérieur de la nation, réalisant la catastrophe économique qui nous attend etc... Or, vous comprenez bien que ce n’est pas le cas: il a des comptes à rendre à ses alliés, le Hezbollah, à qui il doit son siège, aurait des lignes rouges avec eux, invisibles pour nous, qu’il n’oserait jamais transgresser, et serait carrément pris en otage avec les bras liés! CQFD comme on disait à l’école.
Saliba Nouhad
14 h 52, le 06 novembre 2018