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Moyen Orient et Monde - Reportage

En attendant la reconstruction de Raqqa, la débrouille au quotidien des habitants

Selon l’ONG Amnesty International, 80 % de l’ancienne capitale de l’EI en Syrie est dévastée.


Une femme passant devant des immeubles détruits à Raqqa. Delil Souleiman/AFP

Toute la journée, des embarcations traversent le fleuve de l’Euphrate pour transporter les habitants dans Raqqa en Syrie, où ponts, maisons et écoles ont été détruits il y a un an par les combats et où la reconstruction peine à démarrer.

En octobre 2017, une force arabo-kurde, soutenue par des raids aériens de la coalition internationale dirigée par les États-Unis, a chassé, après une offensive d’envergure, le groupe jihadiste État islamique (EI) de cette ville septentrionale.

Un an plus tard, Raqqa est toujours en ruine. Et les ponts et les routes y menant sont détruits. Pour retrouver sa ville natale, Abou Yazan, 33 ans, a emprunté avec sa femme et ses trois enfants une embarcation à partir de la rive méridionale jusqu’à la rive nord du fleuve bordant Raqqa. Sans oublier leur mobylette, qu’ils enfourchent ensuite pour poursuivre leur chemin.

Un trajet de quelques minutes. « Mais c’est dur et les enfants ont toujours peur en raison du risque de naufrage, dit à l’AFP le père de famille. Nous voulons que le pont soit réparé car c’est plus sûr. » À proximité, ce qui reste d’un célèbre pont : deux pylônes énormes avec la structure supérieure démolie. Il a été détruit par une frappe de la coalition qui a bombardé tous les ponts menant à Raqqa pour empêcher l’acheminement de vivres et d’armes aux jihadistes et empêcher ces derniers de fuir. Quelque « 60 ponts doivent être réhabilités » dans l’ensemble de la province du même nom, indique Ahmad al-Khodr, un responsable du Conseil civil local en charge de la ville. Depuis la rive nord, le paysage est dominé par le chassé-croisé des bateaux, dont l’un transporte près de 16 passagers, un camion et trois mobylettes. À peine accostés, ils accueillent d’autres clients en partance de Raqqa.


(Lire aussi : Un an après la défaite de l'EI, le principal hôpital de Raqqa toujours en ruine)


Les écoles et hôpitaux aussi

Selon l’ONG Amnesty International, 80 % de la ville de Raqqa est dévastée, y compris écoles, hôpitaux, mais aussi maisons privées. « 30 000 maisons sont totalement détruites » et « 25 000 » « partiellement », indique l’ONG. Pas un seul quartier n’a été épargné par l’offensive, l’une des plus dévastatrices de la guerre syrienne. Certains habitants ont trouvé refuge chez des proches en espérant que leurs habitations seraient un jour reconstruites. Ismaïl Maaydi, 48 ans, vit aujourd’hui chez sa sœur avec sa femme et ses enfants dans le quartier d’al-Nahda.

Il a perdu son fils, combattant de la force arabo-kurde, pendant la bataille. « J’ai enterré mon fils avec mes deux mains », lâche-t-il.

Et sa maison a été détruite. « Comment je vais reconstruire cette maison ? Nous avons besoin d’aide pour retirer les débris. Personne ne nous a aidés », se lamente-t-il, très affecté par la perte de sa maison. Malgré tout, plus de 150 000 personnes sont retournées à Raqqa depuis la défaite de l’EI, selon l’ONU. « Les quartiers du centre-ville sont les plus détruits, ils sont rasés à 90 %, précise Ahmad al-Khodr, muni d’une carte de la ville. « La destruction est abyssale et le soutien (financier) insuffisant. »


(Lire aussi : « Raqqa est dangereuse, les cellules dormantes sont partout »)


Le danger des mines

Aux destructions s’ajoutent l’absence des services de base, mais aussi le danger des mines laissées par l’EI et qui continuent à faire des victimes. Samer Ferwati vend des boîtes de cigarettes posées sur une charrette, en face de sa maison détruite. « Il n’y a pas de reconstruction, il s’agit de paroles en l’air. » « Si nous recevions un peu d’aide, nous pourrions nous-mêmes » reconstruire, dit-il en dénonçant des promesses creuses des responsables. « Je travaille un jour sur dix et s’il n’y a pas de nourriture, nous ne mangeons pas. » Au bord d’une route dans le quartier proche d’al-Ferdous, Abed al-Ibrahim, 70 ans, attend tous les jours en vain des passants pour pouvoir remplir d’eau un galon vide en plastique qu’il tient entre les mains. L’eau ne coule plus depuis trois jours dans l’habitation qu’il squatte. Sa propre maison a été détruite. « Est-ce que mon âge me permet de porter un galon ? » lâche-t-il avant de fondre en larmes. « Ma maison ressemble à cet amas de décombres, dit-il en pointant du doigt un immeuble en ruine. Nous vivions dans un paradis. Regardez-nous maintenant, nous sommes réduits à mendier pour de l’eau. »




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