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Moyen Orient et Monde - Syrie

Avion abattu : le double langage de Moscou avec Israël

L’armée de l’État hébreu accusée d’avoir fourni « des informations trompeuses »

Un Il-20 de l’armée russe. AFP/Archives – Nikita Shchyukin

Moscou caresse Israël avec sa main droite et lui donne une claque avec sa main gauche. Après l’incident qui a conduit au crash de l’Iliouchine-20, abattu lundi par la défense antiaérienne syrienne, Vladimir Poutine avait calmé le jeu en évoquant un « enchaînement de circonstances accidentelles tragiques », alors que le ministère russe de la Défense avait pointé du doigt quelques heures plus tôt la responsabilité de l’État hébreu dans le crash de l’avion. Les Syriens visaient en effet les appareils israéliens qui menaient un raid dans la région de Lattaquié. Se sont ensuivies plusieurs concertations entre les armées russe et israélienne pour éviter que pareil incident se reproduise et pour maintenir leur coordination en matière de déconfliction.

Malgré l’apparente volonté de calmer le jeu des deux côtés, les Russes ont poursuivi hier leur double langage à l’égard de leur partenaire, avec sans doute l’intention de faire porter la responsabilité de la mort de leurs soldats à l’État hébreu, plutôt qu’à leurs alliés syriens, auprès de leur opinion publique.

« Les informations trompeuses fournies » par l’armée israélienne sur les frappes qu’elle allait mener « n’ont pas permis à l’avion russe Il-20 de se déplacer à temps vers une zone sécurisée », a dénoncé le porte-parole de l’armée russe, Igor Konachenkov, lors d’un briefing présentant les conclusions de l’enquête. Selon lui, la Russie a reçu un appel du commandement israélien à 18h39 GMT avertissant qu’Israël frapperait le « nord de la Syrie », où l’avion de reconnaissance russe menait une mission au-dessus de la zone de désescalade d’Idleb. La Russie a alors ordonné à son appareil de revenir sur la base de Hmeimim, mais, « une minute » après l’appel des forces armées israéliennes, ses F-16 ont frappé Lattaquié, dans le nord-ouest du pays, proche de la base de Hmeimim. Là, « les avions israéliens ont vu l’Il-20 russe et l’ont utilisé comme un bouclier contre les missiles antiaériens alors qu’ils continuaient à manœuvrer dans la région », a affirmé Igor Konachenkov. « Les données objectives présentées attestent que les actions des pilotes de chasse israéliens, qui ont causé la mort de 15 militaires russes, étaient soit un manque de professionnalisme, soit une négligence criminelle », a-t-il poursuivi, dénonçant « l’aventurisme » de l’armée israélienne.

Israël a déjà nié la version russe, assurant que l’Il-20 se trouvait loin des lieux où les appareils israéliens ont attaqué l’armée syrienne et qu’il a été atteint à un moment où les F-16 avaient déjà regagné l’espace aérien de leur pays. La version russe a d’ailleurs été moquée par plusieurs experts militaires au cours de la semaine, à l’instar d’Amos Yadlin, ancien chef du renseignement militaire, directeur de l’Institut pour les études de sécurité nationale (INSS), qui a écrit sur Twitter : « Se cacher derrière un avion, ça n’existe pas. » C’est la première vraie crise entre les deux partenaires investis dans des camps opposés en Syrie. Elle ne devrait pas, a priori, modifier les règles de leur coordination militaire dans ce pays, mais Moscou pourrait toutefois utiliser cette affaire pour tenter de limiter l’action israélienne, notamment les raids aériens dans le nord du pays.

« Nous n’abandonnerons pas nos armes »

Par ailleurs, à Idlleb, les rebelles proturcs ont réservé un accueil prudent à l’accord russo-turc prévoyant la création d’une « zone démilitarisée » dans la province, dernier bastion insurgé en Syrie, où un groupe jihadiste l’a rejeté.

Vladimir Poutine et Recep Tayyip Erdogan ont surmonté la semaine passée leurs divisions concernant le sort de cette région menacée d’une offensive du régime, annonçant la création d’ici au 15 octobre d’une « zone démilitarisée » à Idleb, sous contrôle russo-turc. Cet accord a éloigné la perspective d’une offensive sur cette province.

Dominée par les jihadistes du groupe Hay’at tahrir al-Cham (HTS), cette province du Nord-Ouest syrien a accueilli ces dernières années des dizaines de milliers de rebelles et civils, évacués d’autres bastions insurgés repris par le régime. Dans un communiqué diffusé samedi, le Front national de libération (FNL), principale coalition rebelle d’Idleb, a affirmé qu’il « coopérerait pleinement avec son allié turc pour aider au succès des efforts visant à épargner aux civils les souffrances de la guerre ».

« Mais nous restons vigilants face à toute trahison de la Russie, du régime ou des Iraniens », a dit le communiqué du FNL. « Nous n’abandonnerons pas nos armes, notre terre et notre révolution », a promis le FNL. HTS, le groupe jihadiste dominant dans la province, n’a pas encore fait connaître sa position.

La zone démilitarisée de 15-20 km de large doit servir de zone-tampon entre les territoires insurgés d’Idleb et les zones tenues par le régime tout autour. Toutes les armes lourdes et les jihadistes doivent sortir de la zone, selon les termes de l’accord.

Sources : rédaction et agences

Moscou caresse Israël avec sa main droite et lui donne une claque avec sa main gauche. Après l’incident qui a conduit au crash de l’Iliouchine-20, abattu lundi par la défense antiaérienne syrienne, Vladimir Poutine avait calmé le jeu en évoquant un « enchaînement de circonstances accidentelles tragiques », alors que le ministère russe de la Défense avait pointé du doigt...

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